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L’accotement revêtu : principe et fonctionnement
L’accotement revêtu, couramment appelé “bande multifonctionnelle” ou bande dérasée de droite (BDD), peut être défini comme une surlargeur revêtue adjacente à la chaussée. Cet aménagement permet les manœuvres d’évitement, les manœuvres de récupération des véhicules en perte de contrôle, le stationnement des véhicules et facilite le partage des routes avec les engins agricoles, cyclistes et piétons.
Devant une pratique du vélo en forte progression, des réflexions autour de l’utilisation de l’accotement revêtu en solution cyclable se multiplient. Néanmoins cet aménagement ne peut satisfaire aux besoins des cyclistes que sous certaines conditions.
Alors que ce type d’aménagement existe dans bon nombre de territoire en France, rares sont les retours d’expériences locaux. Le Cerema et Vélo & Territoires ont décidé d’organiser un webinaire pour présenter ce sujet.
Plus de 380 participants ont été recensés pour cette conférence. Les supports de présentation ainsi que le replay de la conférence sont disponibles ci-dessous. De plus une partie Q&R a été mis place afin de compléter les différentes informations fournis dans le webinaire et apporter des éléments de réponses aux questions qui n'ont pu être répondu durant le webinaire.
Recommandations et principes d'aménagement
Suite à l'introduction de Stéphane Chanut du Cerema, deux interventions ont été réalisées sur les recommandations et principes d'aménagements concernant les accotements revêtus :
- Matthieu Holland du Cerema a réalisé une première partie sur les principes généraux à respecter lors de la mise en place des accotements revêtus, ses différentes fonctions et caractéristiques;
- Thomas Jouannot du Cerema a ensuite évoqué de manière plus spécifique l'intérêt de cet aménagement en lien avec l'utilisation du vélo. Un exemple particulier a notamment été mis en avant : la chaussée à voie centrale banalisée (CVCB).
Retours d'expériences locales:
Suite à ces présentations générales, trois intervenants ont réalisé un retour sur les accotements revêtus mis en place dans leur département :
- Philippe Chauvin du département de Seine-Maritime;
- Bruno Gidon du département du Calvados;
- Yvan Lecann du département de la Manche.
Le webinaire s'est ensuite finalisé par une conclusion de Benoit Hiron du Cerema.
Le replay :
Séquence question / réponse
Ci-après quelques-unes des questions posées dans le tchat en ligne qui n'ont pas forcément trouvé de réponse dans les présentations, dont voici les principales réponses.
Questions axées sur les principes généraux de fonctionnement de l'accotement revêtus....
1) " Quelle condition de trafic routier et sur quels types ou catégories de route faut-il prévoir cet aménagement ?"
Les accotements revêtus sont à réaliser en priorité sur les routes à fort trafic (réseau structurant).
2) "Le fait que cet espace (l'accotement revêtu) soit multiusages interdit de fait la mise en place de glissières ?
Concernant l'implantation de dispositifs de retenue, elle doit se faire au-delà de la bande dérasée de droite qui constitue la zone de récupération qui doit être dégagée de tout obstacle. La berme supporte en revanche les équipements : barrières de sécurité, signalisation verticale, dispositif d'assainissement...
3) "Est-ce que l'accotement revêtu et créneau de dépassement sont incompatibles ? "
La mise en oeuvre d'une bandé dérasée de droite n'est pas du tout incompatible avec des créneaux de dépassement. En effet, si à l'échelle d'un itinéraire, il n'y a pas d'accotement revêtu et pas de possibilité de récupération d’un véhicule en perte de contrôle (dénivellation en rive, accotement herbeux), il paraît intéressant d'étudier la possibilité de mettre en oeuvre un accotement revêtu. Celui ci pourra être complétés par des dispositifs d’alerte sonore en rive (DAS - cf. arrêté du 14 janvier 2020).
4) " Existe-t-il un panneau spécifique pour l'accotement revêtu pour indiquer sa multifonctionnalité ?
Il n'y a pas lieu de mettre une signalisation horizontale pour les accotements revêtus (pour ne pas restreindre son usage à un type d'usagers). À ce jour, il n'existe pas de panneau règlementaire pour signaler un accotement revêtu : c'est le code de la route qui s'applique quant à l'usage des accotements.
5)" Au niveau des voies dans les agglomérations qui sont séparées par une zone centrale, s'il n'y a pas la place de réaliser 2 bandes multifonctionnelles, est-ce que la mise en place d'une seule bande serait préférable à la zone centrale?"
Il est souhaitable de travailler sur une redistribution du profil en travers symétrique par marquage et donc d'avoir une largeur de bande dérasée de droite de largeur équivalente dans les deux sens de circulation. Il faut tendre vers une largeur de 1,50m mais celle-ci peut être inférieure si l'emprise ne le permet pas.
On peut envisager de réaliser ponctuellement un accotement revêtu permettant notamment d’offrir des possibilités d’évitement (principalement des mouvements de tourne-à-gauche) et permettre la circulation des usagers vulnérables (piétons, deux-roues) hors chaussée au droit du bâti.
Toutefois sur ce type d’implantation, le gestionnaire doit définir un niveau d’aménagement en fonction de la typologie des accidents, de la densité du bâti, du trafic sur l’axe, du profil en long, du profil en travers et des vitesses pratiquées.
6) "L'évitement par la droite dans un carrefour en croix n'engendre t-il pas des situations conflictuelles (circulation sur la voie secondaire)?"
L'aménagement doit prendre en considération les données trafic et qu'en fonction de celles-ci, le carrefour en croix peut justifier d'être reconsidéré.
7) Comment prendre aussi en compte les nouveaux usagers de type "e-EDP" ? Est-ce un enjeux émergeant en zones périurbaines que nous devons anticiper ?
Selon la définition du Code de la route, les engins de déplacement personnel sont des véhicules de petite dimension. Ils peuvent être motorisés ou sans moteur. C'est le décret du 23 octobre 2019 qui a introduit dans l'article R 311-1 du Code de la route, la définition de ces engins (alinéa 6-14) en distinguant les engins de déplacement personnel non motorisés (aliné 6-16), curieusement sans en proposer une description technique, et les engins de déplacement personnel motorisés (EDPM). Sont des EDP non motorisés a priori les skates, rollers, trottinettes dépourvues de moteurs. Le code de la route assimile ces engins à des piétons selon l'article R 412-34, alors qu'il assimile les EDPM à des vélos.
Les EDP sont donc ainsi autorisés sur les BMF comme sur les trottoirs. En revanche, si les EDPM sont assimilés à des vélos, il y a une exception concernant la circulation hors agglomération où ils sont interdits sauf sur les voies vertes et les pistes cyclables (art. R412-43-1 du code de la route).
Cette disposition peut être modifiée sur les routes dont la VMA est inférieure ou égale à 80 km/h par décision motivée de l'autorité investie du pouvoir de police. Par ailleurs, un EDPM comme un vélo conduit à la main est considéré comme un piéton.
8) "Quel est le prix / m d'une bande sonore ?"
Pour information l'ordre de grandeur sur le Département de Seine-Maritime est de 2 860 €/km TTC au km de route.
9)" Existe-t-il un lien entre vitesse pratiquée et des routes avec ou sans accotements revêtus ?"
Il n'a pas été constaté, de manière générale, une augmentation ou baisse significative de la vitesse lors de la mise en place d'accotement revêtus.
10) "Quels(s) types(s) de revêtement possibles pour les accotements revêtus ? Ne faut-il pas préconiser une couleur de revêtement différenciée pour les accotements revêtus ? "
Une couleur de l'accotement revêtu différente de celle de la chaussée reste envisageable car cela participe à une meilleure lisibilité de l'aménagement. Toutefois, les aspects coûts et entretien devront être pris en compte. Cet accotement revêtu doit présenter un niveau d'adhérence équivalent à celle de la chaussée, une structure résistante au passage occasionnel des poids lourds et une surface régulièrement entretenue et accueillante pour les deux-roues légers et les piétons (pas de gravillons).
11) "Si passage piéton, est ce que le marquage se fait sur chaussée uniquement ou sur chaussée + accotement revêtu ?"
Selon l'IISR, le marquage des passages piéton se fait selon la largeur roulable de la chaussée (comportant la chaussée et la bande dérasée de droite). La traversée piétonne hors agglomération devra faire l'objet d'une attention particulière en fonction de l'environnement et pourra nécessiter un aménagement spécifique.
Questions axées sur l'utilisation de l'accotement revêtus en lien avec le vélo et la chaussée à voie centrale banalisée (CVCB)....
1) "La circulation des cyclistes est-elle autorisée sur les accotements revêtus ?"
La circulation des cyclistes est autorisé sur accotement revêtu hors ET en agglomération article R 431-9 du code de la route depuis 6 ans.
2) "En développant les accotements revêtus, ne risque-t-on pas de limiter la possibilité de développer de véritables bandes cyclables plus protectrices pour les cyclistes ( puisque règlementairement les bandes cyclables n’autorisent pas l’automobiliste à franchir la bande hormis lorsqu’il quitte la chaussée )?"
Les accotements revêtus répondent à plusieurs besoins relatifs à la circulation routière. Si l'objectif principal est de prévoir un aménagement sécurisé et optimal pour les cyclistes, la bande cyclable est en effet, en théorie, une meilleure réponse. Mais si d'autres points sont à améliorer, e.g avec la circulation d'engins agricoles, problématique de dépassement de véhicules, l'accotement revêtu peut être une solution de compromise acceptable. À noter qu’une bande cyclable très étroite n’offre pas forcément un niveau de service aux cyclistes supérieur à une rive large, dans le cas d’une CVCB par exemple.
3) "Quelle condition de trafic et sur quels types ou catégories de route faut-il prévoir la mise en place d'accotement revêtu pour les vélos ? Si l'on imagine un nombre de cyclistes important, les dépassements de VM par la droite ou les évitements ne serait-ils pas dangereux pour les modes doux ?"
Concernant les conditions de trafics et le type de route pour l'utilisation de l'accotement revêtu pour le vélo, les recommandations sont indiquées dans le tableau au niveau du guide cerema "rendre sa voirie cyclable" https://www.cerema.fr/fr/centre-ressources/boutique/rendre-sa-voirie-cyclable.
Nous ne pronons pas, pour les vélos, d'utiliser les accotements revêtus comme aménagement unique et pertinent pour les vélos à chaque fois (d'où le tableau de choix indicatif des aménagements). Le sujet du webinaire est de faire un zoom sur les accotements revêtus donc les autres solutions techniques n'ont pas été évoquées. Pour autant elles ont toute leur pertinence.
4) "Existe-t-il un panneau réglementaire pour l'accotement spécifique qu'est la chaussée à voie centrale banalisée (CVCB) ?"
Concernant la CVCB, de même que pour l'accotement revêtu de manière générale, il n'y a pas de panneau dans la réglementation. Là encore, c'est le code de la route qui s'applique mais la difficulté est la compréhension par l'usager quant au fait que les bandes latérales sont considérées comme une BDD et donc circulable très ponctuellement.
5) "A-t-on observé une augmentation des chocs frontaux lors d'aménagement CVCB ?"
Dans le cadre de nos études, il n'a pas été observé une augmentation des chocs frontaux lors de la mise en place de CVCB.
6) " Comment expliquer l'usage d'une CVCB aux automobilistes ?"
Il est important de bien mettre en place une communication autour du dispositif (radios, journaux, panneaux d'informations) pour permettre une bonne compréhension par les usagers.
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