Cet article fait partie du dossier : Les Rendez-vous Mobilités du Cerema
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Cette conférence a été l’occasion de rappeler les enjeux pour les piétons et de montrer un premier panorama des démarches de collectivités françaises, avec un zoom sur quelques petites collectivités. Deux collectivités ont pu mettre en avant leurs retours d’expériences sur des plans piétons élaborés depuis plusieurs années : à Rennes Métropole et à Strasbourg. Ces exemples ont été complétés par l’Académie des Mobilités Actives (Adma), qui a dévoilé les premiers résultats de deux études sur la planification et les actions en faveur de la marche dans quelques villes françaises et européennes.
Enjeux et panorama des plans piétons et des stratégies en faveur de la marche
Ce "RDV Mobilités" du Cerema a été introduit par Stéphane Chanut, responsable du domaine Mobilités au Cerema, et par Catherine Pilon, Secrétaire générale du Club des Villes et Territoires Cyclables et Marchables. Si la marche est un pilier essentiel d’une mobilité plus durable, en particulier pour l’inter-modalité, son développement répond aussi à des enjeux de santé, de développement économique, de cadre de vie et d’adaptation face au changement climatique.
Catherine Pilon a rappelé comment la marche avait longtemps été la grande oubliée des politiques de mobilité, tant ce mode de déplacement paraissait être une évidence pour les pouvoirs publics.
En ajoutant la marche à son nom, le Club des villes et territoires cyclables et marchables a ainsi voulu envoyer le signal de la nécessaire alliance des modes actifs pour une véritable conquête spatiale qui s’appuie sur une nouvelle vision de l’aménagement, de la vitesse et de la sécurité. Le Club se réjouit donc d’accompagner cette dynamique et de ce temps d’échanges via ce webinaire qui permet de diffuser largement les outils, méthodes, compétences et savoir-faire indispensables aux politiques en faveur de la marche.
Un état des lieux interactif des plans piétons de collectivités françaises a été présenté par Romain Legros du CVTCM et Cédric Boussuge du Cerema. Ce travail en cours est visible sur cette plateforme. Une quinzaine de collectivités ont élaboré un "plans piétons", un "plan marche", ou une stratégie piétons. Cela concerne principalement des grandes villes.
Ces plans ou stratégies sont assez complets, validés politiquement, avec diagnostic et plans d’actions sur des thématiques multiples. A ceux-ci s’ajoutent des plans en cours d’élaboration et des collectivités qui ont plutôt une "stratégie" interne sur la marche, pas toujours formalisée dans un document.
Plusieurs exemples de schémas d’itinéraires piétons ont aussi été repérés. Plutôt portés par des petites villes, ces schémas abordent principalement des actions liées à l’aménagement et aux continuités des itinéraires piétonnes.
L’élaboration de ce type de plans est l’occasion de se poser un certain nombre de questions sur les enjeux et les besoins des piétons. C’est également l’occasion de créer une culture commune sur la marche au sein des différents services ou de mieux associer les piétons et leurs représentants associatifs.
Focus sur 4 villes de 800 habitants à 30 000 habitants
De petites collectivités montrent qu’une réflexion sur une stratégie piétonne est à la portée de toutes les tailles de ville. A La Chapelle-Glain, petite ville de 800 habitants en Loire-Atlantique, de nombreux sentiers piétons perpendiculaires aux axes routiers sont aménagés depuis plusieurs années. Cet ensemble structure tout un réseau dans la ville pour rejoindre facilement à pied les commerces, les écoles, la mairie ou l’étang. L’aménageant des nouveaux quartiers est aussi réfléchi pour garantir la perméabilité de la ville au lieu de créer des impasses.
A Bièvres, 5 000 habitants dans l’Essonne, c’est à l’occasion de la révision du PLU qu’un schéma de circulations douces a été élaboré. Il contient notamment un plan d’actions opérationnel visant à conforter ou rétablir des continuités piétonnes, via par exemple la création de zones de rencontre dans un tissu résidentiel ou par la mise en place d’emplacements réservés au PLU pour supprimer une coupure urbaine.
A Pontarlier, commune de 25 000 habitants située dans le Doubs, c’est la mise en place d’un Plan de mise en accessibilité de la voirie et des aménagements des espaces publics (PAVE) qui a donné l’impulsion à une politique en faveur des modes doux via un programme nommé "Ponta’doux". Une attention particulière est donnée au confort des piétons dans leurs déplacements : renforcement de l’éclairage public pour sécuriser les cheminements et les traversées piétonnes, acquisition d’emplacements réservés pour établir une continuité des cheminements piétons, intégration de cheminements doux dans les opérations d’aménagement urbain, etc. Un travail important doit également être mené sur la signalétique afin que celle-ci devienne plus lisible pour les piétons et cyclistes.
A Aix-les-Bains (30 000 habitants, Savoie), un diagnostic de continuités piétonnes est actuellement en cours de finalisation. Il servira ensuite de base à un plan piéton communal qui sera composé d’un volet aménagements (schéma directeur) et d’un volet d’accompagnement comprenant des actions de concertation, de sensibilisation et de communication. Ce diagnostic de continuité piétonne permettra de déterminer les axes structurants de la ville, dans la perspective d’établir un réseau magistral piéton.
Retours d’expériences à Rennes et à Strasbourg
Le plan piétons de Rennes Métropole
Le Plan piéton de Rennes, présenté par Gildas Bourven, du Service Mobilité Urbaine de Rennes Métropole, a été initié en 2003, avec un plan d’action portant sur l’identification des itinéraires structurants, du jalonnement, des expérimentations, de la communication et des aménagements. Les approches différentes selon qu’on est dans l’hyper-centre ou en secteur diffus. En hyper-centre, où les piétons sont nombreux, de l’urbanisme tactique a par exemple permis la transformation de zones 30 en zones de rencontre sur un grand périmètre, et en anticipant l’arrivée du métro.
Les itinéraires structurants en secteurs diffus ont fait l’objet d’un travail différencié sur les quartiers, à dominante d’activité ou d’habitat. Cela aboutit à un maillage basé sur des tronçons de 1,3 km maximum, soit environ 15 minutes de marche, reliant des centralités liées aux transports ou aux commerces. Des fiches diagnostic ont été réalisées pour plusieurs tronçons, pour faciliter le passage à l’opérationnel au sen des services : elles identifient les statuts des voies, les points noirs, l’état des trottoirs, les cheminements privilégiés.
Ce plan piéton permet aussi des actions d’expérimentations, par exemple sur la gestion des carrefours à feux, ainsi que des réaménagements de rues hors projets urbains classiques ou de grandes traversées piétonnes.
Le plan vélo au service des piétons à l'Eurométropole de Strasbourg
Comment utiliser le plan vélo pour améliorer en même temps les itinéraires piétons ? Comment peut-on créer une ingénierie "piétons" au sein des services ? Clément Gerber, de la Ville et l’Eurométropole de Strasbourg, a explicité quelques réflexions et actions menées lors de mis en place deux plans piétons successifs, sur les périodes 2013 - 2020 et 2020-2027.
D’après les enquêtes ménages, puis le baromètre des villes marchables, la marche a une place importante dans la mobilité Strasbourgeoise. En particulier, et cela se confirme au niveau national, les femmes marchent un peu plus que les hommes, mais elles sont moins positives sur la prise en compte des piétons dans la ville, par exemple sur les conflits avec d’autres modes ou la sécurité des trajets vers les écoles.
Les principes du deuxième plan piéton visent le développement de la marche à la fois sur les déplacements de courtes distances, en interne aux quartiers ou pour les motifs loisirs et achat, l’inclusivité, mais aussi l’intermodalité et la marche à grande échelle sur le territoire. Toutefois, l’élaboration et la mise en œuvre de ces plans fait apparaître quelques points de difficultés, sur des aspects législatifs ou les budgets et subventions à identifier spécifiquement pour les piétons. Les services aux piétons sont également difficiles à rendre concrets et planifiables, de même que l’évaluation quantitative des déplacements piétons.
Plusieurs pistes de solutions ont été élaborées, par exemple : utiliser les grands projets pour développer la marche, réaliser des magistrales piétonnes, mais aussi associer les partenaires publics, citoyens et associatifs, et mobiliser l’ensemble des services.
Stratégies piétonnes et pistes d’actions de villes françaises et européennes
Elin Lundmark, experte à l’Académie des mobilités actives (ADMA), a présenté les études en cours au sujet de la marche. Ces études reposent sur une méthodologie commune, basée sur des entretiens avec différents acteurs (collectivités, bureaux d’étude, acteurs associatifs, etc.).
La première étude, intitulée "Planifier en faveur de la marche", vise à comprendre comment la marche est intégrée dans les documents de planification des collectivités engagées en faveur du développement de la marche sur leur territoire.
Planifier en faveur de la marche, c’est, dans un premier temps, prendre en compte les différents besoins des usagers.
Ces derniers présentent en effet une grande diversité dans leurs conditions de déplacement, selon leur âge, leur genre, leur handicap, etc.
Mener une politique en faveur de la marche implique également d’assurer une transversalité appuyée des actions. Différents services de la collectivité doivent travailler ensemble tandis que les citoyens doivent être également être impliqués dans la démarche, via notamment des temps de concertation. Enfin, pour être efficace, une politique en faveur de la marche doit être portée politiquement de manière ambitieuse et assumée.
La seconde étude, intitulée "La diversité des actions et des acteurs", présente un panorama des actions plus ou moins lourdes mises en place pour favoriser la marche par différents acteurs. Un focus sur deux exemples internationaux, Stockholm et Gand, permet de rendre compte des grandes actions à mettre en œuvre. Celles-ci peuvent être de différentes natures. Elles peuvent concerner l’échelle d’un réseau ou un territoire via l’apaisement de la ville, le développement d’un réseau piéton ou encore l’affichage des temps de parcours à pied afin de faciliter l’orientation piétonne.
Des actions ponctuelles nécessitent également d’être envisagées pour favoriser le confort et la sécurité des habitants : sécurisation des abords scolaires, traitement des points noirs conflictuels, etc. Le développement d’une expertise en interne de la collectivité est également une condition indispensable à la bonne réalisation d’actions en faveur de la marche.
Enfin, pour que la politique menée se concrétise au sein de la population, il est nécessaire de faire preuve de pédagogie et de multiplier les canaux de communication. La publication des deux études est attendue pour fin 2022.
Élodie Barbier-Trauchessec, coordinatrice Mobilités Actives et Partagées à l’ADEME, a mis en relief l’importance de la marche dans la transition écologique. Le contexte actuel montre tout particulièrement comment la marche est un mode de déplacement résilient, qu’il s’agit donc de considérer à sa juste mesure. Plus qu’un sujet d’urbanisme, la marche est un levier indispensable pour une population en meilleure santé, des espaces publics apaisés et plus sécurisés ou encore une meilleure cohésion sociale.
Conclusion du webinaire
Romain Legros a rappelé l’importance pour le CVTCM de connaître et de valoriser les actions en faveur de la marche qui ont lieu sur le territoire. A ce titre, les résultats de l’Enquête nationale sur les politiques modes actifs - réalisée avec Vélo & Territoires – qui seront bientôt dévoilés constitueront des informations précieuses. C’est la première fois que cette étude interroge les collectivités sur leurs actions en faveur de la marche.
Le CVTCM a également lancé cette année la première édition des Talents de la marche, sur le modèle des Talents du Vélo. Ce concours, qui a suscité un grand intérêt, permet de valoriser les initiatives en faveur de la marche à l’échelle nationale, qu’elles soient portées par des associations, des entreprises ou encore des collectivités.
Marion Ailloud, responsable du secteur Espace public et voirie urbaine au Cerema, note en particulier la richesse et la précision des questions et réponses apportées. Elle rappelle la possibilité de solliciter le Cerema pour des formations et des accompagnements sur la marche et le vélo. Pour répondre aux besoins de montée en compétence, une communauté sur les aménagements piétons sera bientôt ouverte aux collectivités sur la plateforme Expertises.Territoires.
Pour télécharger les diaporamas présentés
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