Comment les territoires, mais aussi les organisations, peuvent-ils se préparer, s’adapter, se transformer, pour mieux faire face aux perturbations ponctuelles et aux évolutions de long terme comme le changement climatique ou l’effondrement de la biodiversité ? L’approche globale et transversale de l'adaptation que porte le Cerema dessine des réponses à ces questions et des pistes d’action à saisir.
Les territoires sont confrontés à différents aléas, qui par leur ampleur peuvent prendre la forme de crise. L’impact est d’autant plus important quand il n’a pas été possible d’anticiper et de préparer la réponse à cet aléa.
Une approche transversale de la résilience pour accompagner des stratégies de territoire
Le changement climatique par exemple, entraîne une augmentation des risques et des catastrophes naturels, qui sont plus fréquents et plus intenses. L’adaptation des territoires passe par la mise en œuvre de véritables stratégies de territoire, qui correspondent à une approche résiliente de l’aménagement.
Le Cerema a développé de nombreux travaux et construit une expertise reconnue autour de cette notion de résilience, c'est-à-dire, l'anticipation et l'adaptation des territoires.
La diversité et la complémentarité des compétences du Cerema, que reflète celle de ses champs d’action (ville durable, stratégie territoriales, transition écologique, climat, risques, normalisation, etc.), ont contribué à faire émerger une vision originale de la résilience et en permettent aujourd’hui la traduction opérationnelle dans des démarches et projets sur les territoires.
C'est pour accompagner les collectivités et les organisations dans ces démarches que le Cerema a développé un outil, la boussole de la résilience, et une méthode pour faciliter la compréhension des enjeux, aider à se poser les bonnes questions et intégrer la transversalité du sujet.
Cette méthode a été utilisée par le Cerema le plus souvent dans le cadre de projets de territoires de toutes tailles, par exemple l'élaboration des Contrats de Relance et de Transition Energétique, celle du ScOT du Pays Basque ou le renforcement du Plan Climat Air Energie territorial (PCAET) de la Communauté d’Agglomération des Portes de l’Isère (CAPI), ou encore:
- l’appel à projets "les solutions fondées sur la nature pour des territoires littoraux résilients",
- l’appel à partenaire lancé conjointement avec l’ANEL sur des projets de gestion intégrée du littoral,
- le projet de recherche RELEV sur l’anticipation de la reconstruction des territoires à la suite d’une catastrophe.
Face à des crises plus fréquentes et globales, les territoires s'adaptent
L’ère de l’anthropocène dans laquelle l’humanité est entrée est marquée par un bouleversement des équilibres de la planète – dérèglement climatique, effondrement de la biodiversité – propres à générer des crises systémiques.
La pandémie de Covid-19 montre que les formes et les origines des crises peuvent être très diverses et leurs effets de plus en plus systémiques, touchant tant la santé, l’économie, que le cadre de vie, affectant in fine les populations, en particulier les plus fragiles. En première ligne, les territoires découvrent leur grande vulnérabilité, mais aussi leur capacité à réagir, à s’adapter et à se transformer, dans l’espoir d’être mieux préparés aux futures crises.
Afin d’aider les territoires à élaborer et mettre en œuvre des stratégies d’adaptation sur le long terme, le Cerema a conçu un "mode d’emploi" qui permet de guider les acteurs dans leurs démarches.
Les collectivités disposent de nombreux leviers pour agir face à des défis qui sont eux aussi locaux, comme la gestion de l’eau, de l’énergie, la préservation des sols et des milieux naturels, le développement de l’économie circulaire…
Ces démarches sont aussi l’occasion d’ouvrir le dialogue avec les différents acteurs des territoires (élus, acteurs économiques, associations, habitants…) pour élaborer des réponses adaptées aux réalités de terrain et aux aléas présents comme futurs.
Le mot-clé de ces démarches est l’anticipation, pour ensuite réduire les vulnérabilités en mettant en œuvre des actions couvrant tous les pans de la vie des territoires. Pour cela, il faut changer de regard, et c’est l’objet d’un outil innovant créé par les équipes du Cerema : une boussole pour orienter les actions d’adaptation.
Une boussole pour naviguer vers un cap fixé en concertation
Fruit de la synthèse des travaux et retours d'expériences nationaux et internationaux sur le sujet, la Boussole de la résilience défini 6 leviers pour renforcer la résilience du territoire. Au-delà des leviers "classiques" que partage l'adaptation des territoires avec la gestion des risques, la boussole affirme notamment l’importance de la transformation comme principe clé d’une approche nécessairement globale et transversale.
La boussole de la résilience, que les utilisateurs peuvent très facilement s’approprier, a vocation à alimenter les réflexions de la collectivité ou de toute autre organisation en éclairant son "degré de maturité" sur ce sujet.
Mobilisée sur des projets ou actions existantes, elle en permet une lecture sous l’angle de l’adaptation. Elle peut en révéler les failles, pour les enrichir et renforcer leur contribution à la résilience globale du territoire.
Les 6 principes d’action sont illustrés par des exemples concrets qui facilitent ce travail d’opérationnalisation du concept. La boussole est adaptée à tout type de projet ou de politique publique. L’utilisation de cet instrument par chaque territoire implique une appropriation propre à enrichir la boussole, à la rendre plus robuste. Le Cerema intègre dans la vie de la boussole ce principe de capitalisation des expériences et d’évolution.
Un "guide express" présentant la boussole de manière détaillée et la démarche et qui explicite les différents leviers a été publié :
utiliser la boussole
La "boussole de la résilience" du Cerema est un cadre de coopération et d'action qui s'utilise à différentes étapes d'une démarche pour :
Elle peut ainsi être mobilisée pour comprendre les forces et vulnérabilités de son territoire, pour renforcer son plan d'action et sa stratégie en évitant la mal-adaptation, ou comme une grille de lecture et de cohérence pour prioriser ses actions.
Se poser les bonnes questions :
FOCUS - Un atelier autour de la boussole de la résilience à Mens-en-Trièves
La commune de Mens est déjà très engagée et impliquée dans la transition écologique et solidaire. Forte d’un terreau associatif très mobilisé et actif, elle met en place depuis de nombreuses années des actions et des projets alliant sobriété énergétique, prise en compte de l’environnement et inclusion sociale, avec par exemple un projet de logements durables partagés et inclusifs et la végétalisation et désimperméabilisation de la place de la Mairie.
Vis-à-vis de la résilience, l’équipe municipale en place a déjà eu l’occasion de vivre une Fresque du Climat, qui lui a permis de renforcer sa prise de conscience de l’urgence à agir.
L’inscription de la ville de Mens dans le programme Petites Villes de Demain est l’occasion d’élargir son approche des aléas pouvant impacter le territoire et d’anticiper pour améliorer la résilience de la ville. La municipalité a sollicité le Cerema pour l’accompagner dans cette démarche.
Début mars 2022, le Cerema a organisé et animé un atelier réunissant une vingtaine d’élus et de techniciens de la Ville de Mens, de la communauté de communes du Trièves et de la région Auvergne-Rhône-Alpes, pour aborder la résilience à Mens-en-Trièves.
Les participants ont été invités à réfléchir aux aléas pouvant impacter leur territoire, en s’appuyant sur des notions en lien avec la résilience. Le partage de ces réflexions individuelles, enrichi d’apports théoriques, a permis au collectif de construire une vision partagée des menaces pouvant perturber le fonctionnement et l’équilibre actuel de la ville de Mens et d’esquisser une vision des enjeux vis-à-vis de ces aléas.
Sur la base d’une présentation des principes de résilience et de la boussole de la résilience, les participants à l’atelier, répartis en plusieurs groupes, ont ensuite sélectionné quelques-uns des projets en cours ou envisagés par la commune, pour les passer au crible de la boussole. Cela a donné lieu à de riches échanges, à des questionnements sur les choix possibles vis-à-vis de ces projets et à l’émergence de solutions pour développer les leviers de résilience du territoire.
Résultat notable : face au libre choix des projets à examiner au regard de la résilience, le sujet des fêtes traditionnelles et des manifestations culturelles a été sélectionné par chacun des groupes, révélant combien l’enjeu de partage, de rencontres et de temps collectifs et festifs, en un mot de lien social, est fort et facteur de résilience.