Les experts du Cerema étaient sur place dès le lendemain de la tempête. Dans l’urgence, il a fallu estimer l’ampleur de la crue, des principaux mouvements de terrain et dégâts majeurs. Dans les mois qui ont suivi, les compétences pluridisciplinaires du Cerema ont été mises à disposition de ce territoire pour accompagner les actions “post-crise” de reconstruction à moyen et long terme.
Plusieurs missions relatives à l‘expertise de vulnérabilité des infrastructures sur la vallée de la Roya et à la qualification de l’aléa mouvement de terrain sur des zones à enjeu ont été menées. Pour les infrastructures, les missions ont concerné des expertises en urgence et suivi des travaux sur les ouvrages d’art ferroviaires, et sur les ouvrages d’art et les infrastructures du conseil départemental.
Une expertise hydrologique sur les bassins versants du Var et de la Roya
Le Cerema a été chargé de coordonner une expertise hydrologique. Ce travail a permis de fournir des estimations de débit des crues liées à la tempête Alex à l’échelle des grandes vallées en l’état actuel de connaissance des parties prenantes.
Même si ces estimations doivent être considérées avec prudence, elles apportent néanmoins d’ores et déjà d’importants éléments de connaissance de l’aléa inondation sur les territoires impactés, afin de mieux comprendre et prévenir les évènements de ce type.
La tempête Alex a provoqué des pluies intenses et persistantes dans les Alpes-Maritimes, le vendredi 2 octobre jusqu’au milieu de la nuit, avant de s’évacuer en direction de l’Italie. La pluviométrie de cet épisode est localement exceptionnelle, sur des durées comprises entre 6 heures et 24 heures, et dépasse les maximums connus dans les Alpes-Maritimes et la région Provence-Alpes-Côte-d’Azur. Avec 663 mm en 24 heures au poste des Mesces sur le bassin de la Roya, l’évènement du 2 octobre 2020 rejoint la catégorie des évènements extrêmes et des records historiques recensés en France sur le pourtour méditerranéen.
Ces fortes pluies, particulièrement intenses sur certaines parties des hauts bassins versants ont provoqué une rapide augmentation des débits ; les pics de crue ont été atteints en quelques heures seulement. L’étude réalisé a permis de quantifier les débits en différents points des cours d’eau touchés par l’événement.
Rétablir l'accès au tunnel de Tende
Un pont de secours pour désenclaver 21 familles
Le maire de Breil-sur-Roya a sollicité l’intervention d’une équipe spécialisée du Cerema, le Centre National des Ponts de Secours (CNPS), pour améliorer les conditions d'accès au domicile de 21 familles isolées à cause des dégâts de la tempête.
En effet, après la destruction du tablier du pont de Veil lors de la tempête, le passage busé provisoire installé permettant aux habitants de traverser la Roya a lui aussi été détruit par la nouvelle crue causée par la fonte des neiges et les fortes précipitations de janvier dernier.
L’installation d’un pont provisoire modulaire d’une portée de 33 mètres apporte une solution beaucoup plus sûre et pérenne aux habitants du chemin de Veil.Le chantier a débuté le mercredi 17 février 2021 et le pont a pu être installé en 5 jours par une équipe de trois agents du CNPS avec l’appui d’agents des services techniques du Conseil départemental des Alpes-Maritimes.
Une expertise transversale mobilisée pour la reconstruction des ponts du Caïros et d’Ambo
Le Cerema a apporté une assistance au Conseil départemental des Alpes-Maritimes dans l'élaboration des projets de reconstruction des ponts du Caïros et d'Ambo sur la commune de Saorge. Ces deux ouvrages ont été fortement impactés par les inondations, notamment le pont d'Ambo qui a été presque entièrement emporté par la crue. Les nouveaux ponts prévus en remplacement sont des ouvrages non courants complexes de type bowstring.Le Cerema a étudié différents scénarios hydrauliques
Conforter en urgence le mur à arcature de Fontan
Le mur poids à arcatures de Fontan est un ouvrage de 121 mètres de long et 16m de hauteur en maçonnerie de moellons mis en service en 1928. Il est implanté dans un talweg, et soutient la voie ferrée italienne gérée par la SNCF (reliant Coni à Vintimille) perchée 52 mètres au-dessus de la Roya. Les pluies torrentielles et la crue exceptionnelle de la Roya ont emporté le mur de berge se trouvant en butée de pied et ainsi érodé et déstabilisé le talus situé à l’aval de cet ouvrage.
Les inspections du mur réalisées au lendemain de la tempête ont montré que l’ouvrage n’avait pas subi de désordres structurels majeurs bien que ses fondations aient été déchaussées. L’instrumentation et l’inspection régulière de l’ouvrage ont par la suite mis en évidence un début d’endommagement de l’ouvrage, entrainé progressivement par le glissement de terrain. Étant donné la ruine des infrastructures routières de la vallée, le mur à arcature étudié constituait un ouvrage stratégique pour l’acheminement des secours et du matériel par voie ferrée. Le désenclavement de la vallée de la Roya étant une priorité, il fallait agir très vite pour sauver l’ouvrage. La SNCF a donc mobilisé dans l’urgence l’ensemble de son ingénierie, l’expertise géotechnique du Cerema ainsi que l’expertise de l'entreprise NGE en travaux de confortement associés aux risques naturels. Les inspections structurelles et géotechniques ont été menées conjointement par le Cerema et la SNCF. Sur cette base, le Cerema a produit, en à peine 3 jours, le diagnostic géotechnique du phénomène, réévalué la profondeur du mécanisme de rupture ainsi que l’extension du glissement (impactant près de 200 mètres de voie) et proposé des principes de confortement et un premier design. L’étude de conception NGE a été lancée en parallèle et en forte synergie avec l’ingénierie de la SNCF et du Cerema.
In fine, le confortement constitué de plus de 10km de clous et d’une butée de pied massive a été conçu sans la moindre reconnaissance géotechnique. Les sondages géotechniques usuels, lancés a posteriori de la conception, ont permis de valider le projet de confortement retenu dans l’urgence. La réactivité et la synergie des différents intervenants, le pilotage agile de la SNCF, l’expertise géotechnique du Cerema ainsi que l’expertise travaux-risques naturels démontrée par NGE ont contribué pour beaucoup au sauvetage de l’ouvrage dans un contexte particulièrement difficile. S’il en était besoin, la fracturation de deux pilastres de l’ouvrage en cours de travaux a permis d’illustrer son extrême précarité.
Retour d’expérience sur les mouvements de terrain
En matière de mouvements de terrain, sur la base des différentes expertises menées sur le terrain depuis la tempête Alex, le Cerema a précisé les mécanismes en jeu et la temporalité des différentes phases des mouvements. Ainsi, près de 500 zones de mouvements de terrain ont été mises en évidence avec des caractéristiques très variées (géométrie, lithologique, pente, etc.). Sur ces 500 zones, 6 sites importants dans la Tinée, la Vésubie et la Roya continueront à être observés dans le cadre du Retour d’expérience Mouvements de terrain qu'a initié le Cerema.
accompagner les démarches de reconnaissance de l’état de catastrophe naturelle
Le Cerema eu en charge une partie des dossiers communaux de demande de reconnaissance de l'état de catastrophe naturelle (CATNAT) pour événements de mouvements de terrain sur les trois vallées impactées par la tempête Alex.
Les expertises géologiques réalisées dans le cadre de ces demandes ont permis à 12 communes d'être reconnues en état de catastrophe naturelle pour des phénomènes de glissements de terrain et de désordres liés à la création de cavités souterraines dans des terrains très sensibles à la dissolution (gypse).
L'ensemble des études menées et les caractérisations du phénomène montrent que la totalité de la vallée a été impactée. De fait le Cerema, en complément de son expertise technique largement mobilisée, est actuellement engagé avec les services de l'Etat dans une démarche prospective de prise en compte de la résilience dans les projets de reconstruction.