1 octobre 2021
Vallée Roya
Cerema - Crues dans la vallée de la Roya en 2020
À la suite du passage de la tempête Alex dans les Alpes-Maritimes la nuit du 2 au 3 octobre 2020, le Cerema a mobilisé de nombreuses compétences pour accompagner ce territoire fortement impacté : géotechnique, ouvrages d’art, spécialistes des inondations, du bâtiment, des infrastructures ... Après l’état des lieux, et l’évaluation de l'impact sur les sols, les bâtiments et les infrastructures, le Cerema s’implique depuis un an dans la phase de reconstruction.

Les experts du Cerema étaient sur place dès le lendemain de la tempête. Dans l’urgence, il a fallu estimer l’ampleur de la crue, des principaux mouvements de terrain et dégâts majeurs. Dans les mois qui ont suivi, les compétences pluridisciplinaires du Cerema ont été mises à disposition de ce territoire pour accompagner les actions “post-crise” de reconstruction à moyen et long terme.

Plusieurs missions relatives à l‘expertise de vulnérabilité des infrastructures sur la vallée de la Roya et à la qualification de l’aléa mouvement de terrain sur des zones à enjeu ont été menées. Pour les infrastructures, les missions ont concerné des expertises en urgence et suivi des travaux sur les ouvrages d’art ferroviaires, et sur les ouvrages d’art et les infrastructures du conseil départemental.

Une expertise hydrologique sur les bassins versants du Var et de la Roya

expertise hydrologieLe Cerema a été chargé de coordonner une expertise hydrologique. Ce travail a permis de fournir des estimations de débit des crues liées à la tempête Alex à l’échelle des grandes vallées en l’état actuel de connaissance des parties prenantes.

Même si ces estimations doivent être considérées avec prudence, elles apportent néanmoins d’ores et déjà d’importants éléments de connaissance de l’aléa inondation sur les territoires impactés, afin de mieux comprendre et prévenir les évènements de ce type.

La tempête Alex a provoqué des pluies intenses et persistantes dans les Alpes-Maritimes, le vendredi 2 octobre jusqu’au milieu de la nuit, avant de s’évacuer en direction de l’Italie. La pluviométrie de cet épisode est localement exceptionnelle, sur des durées comprises entre 6 heures et 24 heures, et dépasse les maximums connus dans les Alpes-Maritimes et la région Provence-Alpes-Côte-d’Azur. Avec 663 mm en 24 heures au poste des Mesces sur le bassin de la Roya, l’évènement du 2 octobre 2020 rejoint la catégorie des évènements extrêmes et des records historiques recensés en France sur le pourtour méditerranéen.

Ces fortes pluies, particulièrement intenses sur certaines parties des hauts bassins versants ont provoqué une rapide augmentation des débits ; les pics de crue ont été atteints en quelques heures seulement. L’étude réalisé a permis de quantifier les débits en différents points des cours d’eau touchés par l’événement.

Rétablir l'accès au tunnel de Tendetunnel Tende

Suite aux intempéries, la plateforme d'accès au tunnel historique du col de Tende a été détruite directement par les intempéries (crue de la Roya) tandis que les deux ouvrages d'art d'accès aux têtes des deux tunnels (dont un en cours de percement) ont été emportés par un phénomène gravitaire entre 24 et 48h après les précipitations exceptionnelles.

C'est dans ce contexte que la DREAL PACA a sollicité le Cerema afin d'évaluer la possibilité de rétablir les accès aux têtes des deux tunnels. Cette étude exploratoire de faisabilité du rétablissement des accès au tunnel du col de Tende a permis d’évaluer la faisabilité technique d'un tel rétablissement et pointe les incertitudes liées à la réalisation de ce projet.

Un pont de secours pour désenclaver 21 familles

Le maire de Breil-sur-Roya a sollicité l’intervention d’une équipe spécialisée du Cerema, le Centre National des Ponts de Secours (CNPS), pour améliorer les conditions d'accès au domicile de 21 familles isolées à cause des dégâts de la tempête.

En effet, après la destruction du tablier du pont de Veil lors de la tempête, le passage busé provisoire installé permettant aux habitants de traverser la Roya a lui aussi été détruit par la nouvelle crue causée par la fonte des neiges et les fortes précipitations de janvier dernier.

L’installation d’un pont provisoire modulaire d’une portée de 33 mètres apporte une solution beaucoup plus sûre et pérenne aux habitants du chemin de Veil.Le chantier a débuté le mercredi 17 février 2021 et le pont a pu être installé en 5 jours par une équipe de trois agents du CNPS avec l’appui d’agents des services techniques du Conseil départemental des Alpes-Maritimes.

Une expertise transversale mobilisée pour la reconstruction des ponts du Caïros et d’Ambo

pont Cairos

Le Cerema a apporté une assistance au Conseil départemental des Alpes-Maritimes dans l'élaboration des projets de reconstruction des ponts du Caïros et d'Ambo sur la commune de Saorge. Ces deux ouvrages ont été fortement impactés par les inondations, notamment le pont d'Ambo qui a été presque entièrement emporté par la crue. Les nouveaux ponts prévus en remplacement sont des ouvrages non courants complexes de type bowstring.Le Cerema a étudié différents scénarios hydrauliques pour permettre une conception résiliente de ces nouveaux ouvrages vis-à-vis des risques de crue. L'assistance du Cerema a également porté sur le dimensionnement des ouvrages : des appuis, dans un contexte sismique et hydraulique complexe, à la structure du tablier en s'assurant notamment de sa robustesse vis-à-vis de phénomènes accidentels.

En parallèle, le Cerema réalisé une étude hydraulique au niveau de ces ouvrages :

  • inventaire des données disponibles et de leurs limites (données topographiques , images aériennes post-crue, zone d’intensité)
  • estimation locale du débit lors de la crue à l’aide de modélisation hydraulique 2D. Cette étape majeure consiste à analyser les « couples » débits/coefficient de frottement qui permettent de reproduire les éléments de vérifications disponibles tout en restant dans des gammes physiques acceptables. Elle permet d’estimer les niveaux atteints sur le secteur lors de la crue Alex.
  • calculs en phase projet (suppression de la culée actuelle rive gauche du pont d’Ambo) effectués avec les débits correspondants à la période de la tempête Alex pour connaître les niveaux atteints pour une crue de ce type dans l’état projeté de reconstruction des ponts d’Ambo et Caïros ainsi que les vitesses d’écoulement.

Par ailleurs une étude de sensibilité à d’autres types de paramètres et débits a été menée pour fournir un outil d’aide à la décision du dimensionnement.

Conforter en urgence le mur à arcature de Fontan

Mur Fontan

Le mur poids à arcatures de Fontan est un ouvrage de 121 mètres de long et 16m de hauteur en maçonnerie de moellons mis en service en 1928. Il est implanté dans un talweg, et soutient la voie ferrée italienne gérée par la SNCF (reliant Coni à Vintimille) perchée 52 mètres au-dessus de la Roya. Les pluies torrentielles et la crue exceptionnelle de la Roya ont emporté le mur de berge se trouvant en butée de pied et ainsi érodé et déstabilisé le talus situé à l’aval de cet ouvrage. 

Les inspections du mur réalisées au lendemain de la tempête ont montré que l’ouvrage n’avait pas subi de désordres structurels majeurs bien que ses fondations aient été déchaussées. L’instrumentation et l’inspection régulière de l’ouvrage ont par la suite mis en évidence un début d’endommagement de l’ouvrage, entrainé progressivement par le glissement de terrain. Étant donné la ruine des infrastructures routières de la vallée, le mur à arcature étudié constituait un ouvrage stratégique pour l’acheminement des secours et du matériel par voie ferrée. Le désenclavement de la vallée de la Roya étant une priorité, il fallait agir très vite pour sauver l’ouvrage. La SNCF a donc mobilisé dans l’urgence l’ensemble de son ingénierie, l’expertise géotechnique du Cerema ainsi que l’expertise de l'entreprise NGE en travaux de confortement associés aux risques naturels. Les inspections structurelles et géotechniques ont été menées conjointement par le Cerema et la SNCF. Sur cette base, le Cerema a produit, en à peine 3 jours, le diagnostic géotechnique du phénomène, réévalué la profondeur du mécanisme de rupture ainsi que l’extension du glissement (impactant près de 200 mètres de voie) et  proposé des principes de confortement et un premier design. L’étude de conception NGE a été lancée en parallèle et en forte synergie avec l’ingénierie de la SNCF et du Cerema.

In fine, le confortement constitué de plus de 10km de clous et d’une butée de pied massive a été conçu sans la moindre reconnaissance géotechnique. Les sondages géotechniques usuels, lancés a posteriori de la conception, ont permis de  valider le projet de confortement retenu dans l’urgence. La réactivité et la synergie des différents intervenants, le pilotage agile de la SNCF, l’expertise géotechnique du Cerema ainsi que l’expertise travaux-risques naturels démontrée par NGE ont contribué pour beaucoup au sauvetage de l’ouvrage dans un contexte particulièrement difficile. S’il en était besoin, la fracturation de deux pilastres de l’ouvrage en cours de travaux a permis d’illustrer son extrême précarité.

Retour d’expérience sur les mouvements de terrain

effondrement terrrainEn matière de mouvements de terrain, sur la base des différentes expertises menées sur le terrain depuis la tempête Alex, le Cerema a précisé les mécanismes en jeu et la temporalité des différentes phases des mouvements. Ainsi, près de 500 zones de mouvements de terrain ont été mises en évidence avec des caractéristiques très variées (géométrie, lithologique, pente, etc.). Sur ces 500 zones, 6 sites importants dans la Tinée, la Vésubie et la Roya continueront à être observés dans le cadre du Retour d’expérience Mouvements de terrain qu'a initié le Cerema.

 

accompagner les démarches de reconnaissance de l’état de catastrophe naturelle

Le Cerema eu en charge une partie des dossiers communaux de demande de reconnaissance de l'état de catastrophe naturelle (CATNAT) pour événements de mouvements de terrain sur les trois vallées impactées par la tempête Alex.

Les expertises géologiques réalisées dans le cadre de ces demandes ont permis à 12 communes d'être reconnues en état de catastrophe naturelle pour des phénomènes de glissements de terrain et de désordres liés à la création de cavités souterraines dans des terrains très sensibles à la dissolution (gypse).

L'ensemble des études menées et les caractérisations du phénomène montrent que la totalité de la vallée a été impactée. De fait le Cerema, en complément de son expertise technique largement mobilisée, est actuellement engagé avec les services de l'Etat dans une démarche prospective de prise en compte de la résilience dans les projets de reconstruction.