Située dans les Côtes d’Armor, la commune de Penvénan possède un littoral attractif et diversifié, anthropisé, composé de plages et dunes, de cordons de galets, de falaises et de digues supportant notamment le boulevard de la mer. Suite à plusieurs évènements tempêtueux, des submersions marines et des reculs du trait de côte, la question de la pérennité d’ouvrages, d’accès et de bâtiments présents le long du littoral s’est progressivement imposée.
Un objectif de mobilisation des acteurs pour envisager l’avenir
La commune, précurseur dans le département en se saisissant des questions de gestion du littoral, a rejoint l’appel à partenaires Gestion intégrée du littoral dès 2019. Commune touristique, Penvénan dispose d’un littoral de 11 km, accueille jusqu’à 7 000 personnes en période estivale et comprend 40% de résidences secondaires.
Dans un premier temps, une réflexion sur les besoins de la collectivité a été menée. Elle a permis de définir conjointement un programme d’accompagnement technique sur le littoral, dans le cadre d’une démarche impliquant les élus de la collectivité, ses partenaires impliqués dans l’aménagement du littoral, ainsi que les habitants.
La démarche co-construite avec la commune, comprenait plusieurs volets :
Le Cerema a constitué une équipe multidisciplinaire pour accompagner la collectivité : des compétences en gestion des risques littoraux, en ingénierie écologique et en participation des citoyens et association des parties prenantes ont été mobilisées.
Comprendre le fonctionnement du littoral présent et futur
Le premier objectif était de dresser un état des lieux du fonctionnement du littoral et de ses enjeux environnementaux afin d’anticiper ses évolutions futures.
Le diagnostic de la situation actuelle intègre la géologie, la géomorphologie et la topographie, la connaissance des phénomènes marins actuels et prévisibles (marées, houles et niveaux marins extrêmes), les constats d’impacts des tempêtes, des évolutions de la position du trait de côte, de la résultante des transits sédimentaires et de l’état des nombreux ouvrages et aménagements : enrochements, murs en béton, pierres sèches ou maçonnerie. Les zones en accrétion ou érosion ont ainsi pu être identifiées, tout comme les zones submersibles, et deux sites particuliers touchés par l’érosion ont fait l’objet d'analyses complémentaires :
- le marais du Launay situé face à la mer, bordé d’habitations et abrité par un cordon de galets remanié à plusieurs reprises , sensible à la rupture et à la submersion. Plusieurs trajectoires d’évolution du marais (avec ou sans interventions sur le cordon de galets et le marais) calculées avec l’indicateur d’évaluation et de prédiction définis dans le cadre du projet Life ADAPTO ont montré sa salinisation progressive. L’emprise d’une submersion potentielle a été évaluée en s’appuyant sur la Méthode Nationale d’Evaluation des Fonctions des Zones Humides.
- la falaise de Disken An Aod, falaise composée de matériaux meubles qui supporte le sentier des douaniers et qui a subi plusieurs mouvements de terrain au cours des dernières années. Le Cerema a inspecté le site en détail après la fermeture du sentier, pour diagnostiquer les risques et identifier les solutions de réouverture. Une surveillance ainsi que des travaux d’entretien et de réparation du site (le sentier et son environnement) ont également été recommandés.
Les enjeux environnementaux, les mesures et périmètres de protection existants ont été identifiés, tant au niveau des marais, des zones humides et petits fonds, qu’en ce qui concerne les espèces patrimoniales, sensibles et les espèces envahissantes. Les enjeux patrimoniaux ont aussi été listés.
Un volet participatif, sous la forme d’une enquête en ligne, a enfin permis de recueillir les perceptions des habitants et leurs préoccupations vis-à-vis de l’évolution du littoral. Ce travail a montré le fort attachement de la population au littoral, que les usages du littoral sont nombreux et s’intensifient, ou encore que son évolution est perçue notamment en lien avec les effets du changement climatique.
Un comité de pilotage a été mis en place pour le suivi et la réalisation de l’étude, avec notamment des élus de la commune, des habitants, des acteurs associatifs, des représentants de l’intercommunalité et de la DDTM22.
Partager des connaissances communes sur le littoral et les enjeux
Des ateliers ont été organisés pour réfléchir collectivement au devenir du littoral et des sites les plus impactés par l’érosion et les submersions marines (le marais du Launay en particulier). Des cartographies, des éléments de connaissance sur le littoral ont été fournis aux participants lors des trois ateliers participatifs, qui ont notamment permis de partager les perceptions du littoral, d’identifier les usages, les attachements et le positionnement des différents acteurs, puis d’envisager des solutions d’adaptation face aux aléas littoraux en se projetant aux horizons 2050 et 2100.
Atelier sur les enjeux 6 février 2023 :
L’atelier avec les élus et techniciens de la commune et des partenaires membres du comité de pilotage de l’étude, s’est appuyé sur les éléments de diagnostic disponibles, pour identifier les usages et pratiques et réfléchir à l’impact des évolutions du littoral sur ces usages et pratiques, autour de trois thématiques : environnement et patrimoine, loisirs et activités socio-économiques, vivre à l’année en bord de mer.
L’atelier s’est déroulé en 3 temps :
- Identification des enjeux actuels sur le littoral, des usages, des pratiques et des fonctionnalités.
- Présentation des projections cartographiques des effets potentiels d’une élévation du niveau de la mer à l’horizon 2050 et 2100, et de la marge d’incertitude qui reste importante.
- Détermination des pratiques potentiellement menacées, et classement de celles-ci selon leur caractère local ou transversal à l’ensemble du littoral puis principal et secondaire, vis-à-vis de l’intérêt général.
Atelier sur les orientations du 3 avril 2023 :
Dans la continuité de l’atelier du 6 février 2023, il s’agissait de déterminer les grandes orientations pour la gestion du littoral, en accompagnant la réflexion des élus communaux par l’apport de connaissances sur le littoral : enjeux et usages issus de l’atelier précédent, dynamiques du littoral, diversité des actions possibles... Un jeu sérieux a permis aux acteurs d’échanger sur les actions pertinentes à mettre en œuvre dans un contexte contraint et de préciser les orientations dominantes de gestion d’ici à 2050 par secteur du littoral (plage et habitations, marais et dunes, coteau agricole, marais et front de mer, anse…) sur l’ensemble du littoral. Les participants ont également pu se projeter à 2100 en choisissant pour chaque secteur de la commune, des principes de gestion :
- En ce qui concerne le trait de côte : évolution libre du site, mise en œuvre d’actions pour ralentir légèrement ou fortement le recul du trait de côte, ou fixation du trait de côte,
- En ce qui concerne la gestion des enjeux : sensibilisation du public, réduction de la vulnérabilité des infrastructures publiques, des constructions et des activités, relocalisation.
Les travaux des participants ont par la suite alimenté le contenu de la stratégie de gestion du littoral. Un atelier de travail des élus du conseil municipal au contenu similaire a été organisé le 9 mai 2023 pour réfléchir aux solutions possibles en matière de gestion du littoral.
Atelier 5 juin 2023 : Mise en situation
Le dernier atelier, réalisé notamment à partir des résultats de l’atelier du 3 avril et d’analyses complémentaires, s’est intéressé au secteur du marais du Launay, identifié en tant que secteur sensible par la commune. Un jeu de rôle a permis aux participants de concevoir puis de jouer six persona (propriétaire foncier, randonneur, habitant permanent, agriculteur exploitant, vacancier, membre d’une association de protection de l’environnement) dans un contexte de rupture de barrière littorale et de submersion du marais.
Les participants ont d’abord pu identifier les perceptions et ressentis des personae, notamment vis-à-vis de la rupture du cordon de galets littoral et de l’inondation des terres en conséquence, leur rapport au littoral. Dans le cadre d’un jeu de rôle, où chacun incarnait un persona, ils ont établi des propositions d’intérêt général concertées à l’attention des pouvoirs publics pour accompagner les acteurs dans l’adaptation du littoral.
Le COPIL a pris connaissance des avancées de l’étude et des ateliers tout au long de leur déroulement, pour poser les orientations de la future stratégie de gestion du littoral.
Un bilan sur la démarche
Ce travail a porté ses fruits, en permettant à la collectivité et aux acteurs concernés par le sujet du recul du trait de côte de mieux appréhender la situation actuelle et celle à venir, de mieux saisir les enjeux et les pistes d’action, ainsi que les limites de la gestion du littoral. De nouvelles questions se posent, notamment sur les aspects opérationnels de la relocalisation ou de l’implication d’une large partie de la population et des acteurs du littoral.
La commune dispose désormais de cartographies de projection et d’analyses qualitatives du recul du trait de côte, de fiches thématiques, de livrables issus des études et ateliers menés, constituant un corpus que la commune peut utiliser pour communiquer vers la population sur la problématique et la stratégie qui sera mise en œuvre.
La commune a d’ores et déjà affiché en grand devant le centre nautique, face à la digue, des posters produits dans le cadre de l’étude, sur le diagnostic, le patrimoine, les usages. Elle a également rendu public l’ensemble des rapport produits dans le cadre du partenariat.
LIMITES | SUCCES |
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Une difficulté à impliquer des personnes diversifiées, y compris au sein de la commune et parmi les acteurs associatifs. Le relais entre les participants aux ateliers et l’ensemble de la population. Les suites immédiates données à la démarche d’ateliers mise en place. L’échelle de la démarche au regard des compétences intercommunales (Gemapi, PLUi…). Des questions importantes qui restent à résoudre sur les aspects opérationnels. | Une équipe centrale motivée qui porte la démarche. La réappropriation de l’atelier 2 pour une session de travail au conseil municipal. Une appropriation du sujet et des problématiques, une meilleure connaissance du littoral dans la collectivité, et une meilleure visibilité sur les enjeux présents et à venir. Les bases d’une démarche de long terme sont posées. |