Les routes sont durement impactées par les sécheresses et les effets du changement climatique à travers des dommages caractérisés le plus souvent par des fissures longitudinales proches des bords et des déformations très significatives constituant un danger pour la sécurité des usagers. Les routes ne sont pas assurées et la charge due à leur entretien revient à l’État à travers leurs gestionnaires (les départements par exemple pour les Routes Départementale).
Il devient ainsi urgent d'intégrer l'impact des sécheresses successives et intenses (en particulier depuis 2015) sur les routes dans une politique globale de résilience face au changement climatique pour s'orienter vers l'adaptation et l'atténuation de leurs vulnérabilités.
Consolidation de la structure de chaussée par pose de blocs de polystyrène expansé
Les routes construites sur des sols argileux sensibles au phénomène de retrait et gonflement des sols argileux (RGA) subissent l’impact des sécheresses à travers un certain nombre de facteurs dont :
- les conditions climatiques caractérisées par les cycles de séchage-humidification,
- le sol argileux très plastique sujet au phénomène RGA,
- l’évapotranspiration du sol superficiel au niveau des accotements,
- l’influence de la succion par la zone d’influence racinaire de la végétation qui borde la route.
- les conséquences matérialisées le plus souvent par des fissures longitudinales et des tassements différentiels proches des bords de chaussée.
Selon l’avis technique n°166 de l’IDRRIM, le Compostyrène® est un procédé de remblai léger utilisé sur sols compressibles ou instables, ou pour diminuer les surcharges permanentes d’ouvrages de génie civil et routiers. Il utilise les qualités de résistance et de légèreté des polystyrènes expansés (EPS). La technique de consolidation de la structure de chaussée par pose de blocs de Compostyrène® peut-elle ainsi convenir comme solution de remédiation efficace, économique, écologique et durable pour le confortement des routes exposées à la sécheresse et au phénomène de RGA ?
Dans le cadre de l’ORSS, le Cerema et le département du Cher lancent, en partenariat avec l’entreprise de travaux publics Colas, une nouvelle expérimentation sur une portion de 170 m de la RD3 reliant Morlac et Vallenay. Il s’agit d’une solution de stabilisation mécanique de la structure de chaussée par pose de blocs de Compostyrène® pour limiter la remontée de fissures de sécheresse en lien avec le RGA des sols argileux en place.
Une instrumentation dans le sol a été mise en place, via des capteurs de teneur en eau fournis par GreenCityZen et un suivi sera assuré par le Cerema jusqu'en 2025. Les travaux de réalisation des planches d’essais et la pose de l’instrumentation tensiométrique ont été réalisés du 06 septembre au 1er octobre 2021.
pose des blocs de Compostyrène® et mise en œuvre de la technique par Colas
Pour la mise en place des blocs de polystyrène expansé, des travaux de terrassement complet de la largeur de chaussée sont nécessaires jusqu’à environ 1 m de profondeur. Ensuite, un géotextile anti-contaminant est d’abord posé au fond de la fouille avant l’épandage de 15 cm d’un drainant constitué de gravillon 10/20. Ainsi, les blocs de Compostyrène® sont posés sur deux rangées et brochés au moyen de connecteurs métalliques pour éviter le glissement des blocs pendant les travaux. Le drainant a été également utilisé pour border les blocs de Compostyrène® sur les côtés (cf. illustration).
Le concept du Compostyrène® a été élaboré en incluant un matériau drainant sous les blocs de polystyrène et sur les côtés afin d’obtenir une sorte de coque permettant de stabiliser les blocs et éviter la remontée de l’eau.
Deux épaisseurs de blocs sont expérimentées ; 20 cm pour une épaisseur totale des deux lits de 40 cm (planche 1) et 30 cm pour une épaisseur totale des deux lits de 60 cm (planche 2). Une zone tampon, non confortée, sépare les deux planches afin de permettre la comparaison des deux configurations distinctement. Avant la mise en place de l’enrobé pour reconstituer la chaussée, une dalle de répartition en béton armé (épaisseur de 15 cm) est coulée directement sur le lit supérieur des blocs avec un débordement de 50 cm sur accotements (cf. illustration).
Instrumentation des planches d’essais et suivi par le Cerema
Les expérimentations menées dans le cadre de l’ORSS nécessitent à minima 3 périodes de sécheresse pour pouvoir analyser l’efficacité et la durabilité de la solution de remédiation testée et son impact environnemental en termes d'éventuels effets secondaires.
Afin d’évaluer l’apport de cette technique de stabilisation mécanique par pose de blocs de Compostyrène®, une instrumentation du sol argileux en place a été réalisée par l’équipe de sondages du Cerema et l’entreprise GreenCityZen. Il s’agit de sondes de teneur en eau, de modèle Waterscout® SM100, implantées entre 0,5 et 2,5 m de profondeur permettant un suivi en continu et à distance.
De plus, deux capteurs de teneur eau TRIME®-PICO32, posés sous chaque accotement, complètent cette instrumentation pour disposer de mesures de référence complémentaires. Au total, 2 tranchées de 0,5 m de profondeur et 0,5 m de largeur ont été réalisées au niveau des accotements par Colas, afin de raccorder les sondes et les capteurs de référence aux centrales d’acquisition au niveau de l’instrumentation.
Par ailleurs, un levé topographique post-travaux a été réalisé par le Cerema au niveau des planches d’essais composant cette nouvelle expérimentation. Le suivi et l’interprétation des résultats sera assuré par le Cerema durant au moins 3 périodes de sécheresse, jusqu’en 2024 dans le cadre de l’ORSS.