Les différentes interventions et les temps de travail collectifs ont permis de mieux comprendre l’intérêt de travailler la transversalité pour mettre en synergie le document d'urbanisme avec les démarches territoriales Bas Carbone, et ainsi gagner en efficacité sur leur mise en œuvre.
Retrouvez les présentations, enregistrements et comptes rendus illustrés des différentes séquences de cet atelier sur le site Expérimentations Urbaines de l'ADEME/ rubrique bas carbone/ateliers .
La transversalité des démarches territoriales bas carbone, objectif et moyen
Pour ouvrir cet atelier, un "brise-glace" sous forme de photolangage et une première intervention ont permis aux participants de se familiariser avec la notion de transversalité et ses implications pour entreprendre et mener une démarche de transition écologique sur leur territoire.
- Lors du brise-glace, des cartes du jeu de société Dixit ont été présentées aux participants qui devaient s’en inspirer pour exprimer ce que représente la transversalité sur leur territoire.
- Puis, une première intervention de Fanny Fleuriot de l'ADEME, sur la définition de la neutralité carbone et le rôle des collectivités locales en la matière, a montré l’importance d’assurer la transversalité vue comme solidarité entre les démarches territoriales à différentes échelles :
- La neutralité carbone est définie comme l’équilibre entre les émissions de gaz à effet de serre (GES) et leur absorption à travers les puits de carbone, mais l’enjeu majeur pour répondre à cet objectif est la réduction des émissions de GES
- Or, il existe une absence d’équité entre les territoires, entre ceux qui disposent de potentiels de séquestration et ceux qui ne pourront être neutres en carbone en raison de leur caractère très urbain.
Sur la base de ces deux premiers temps, le sujet a été introduit avec un atelier. Le document d’urbanisme faisant partie d’un paysage institutionnel complexe, l’atelier a été découpé en trois séquences représentant trois articulations possibles du SCoT ou du PLU(i) avec d’autres démarches territoriales :
- avec les échelles supérieures et d’autres territoires ;
- avec des dispositifs contractuels en lien avec la transition écologique ;
- avec la planification sectorielle et particulièrement le PCAET.
Un sondage a montré que les représentants de territoires ont peu de difficulté à faire des liens entre leurs documents d’urbanisme et les documents de planification d’autres échelles. Cependant, cela semble plus complexe pour eux de les articuler avec les planifications sectorielles et les dispositifs contractuels.
Comment articuler les échelles et mettre en œuvre les solidarités territoriales ?
Dans cette première séquence, il s’agissait d’explorer les possibilités pour dépasser les périmètres administratifs afin de répondre collectivement à l’enjeu du bas carbone.
1. Dans un premier temps avec l’intervention de Yannick Régnier, du CLER (Réseau pour la transition énergétique). Ce témoignage portait sur les solidarités entre territoires urbains et territoires ruraux qui sont interconnectés en interagissant sur de nombreux domaines comme l’alimentation ou encore l’énergie.
Il a montré, à travers notamment des exemples territoriaux, comment réunir et rassembler les acteurs concernés, de manière à ce qu’ils visualisent leurs interdépendances pour réfléchir à une coopération interterritoriale. Pour que celle-ci fonctionne, il est nécessaire de construire un "panier de réciprocité", c’est-à-dire de trouver un accord pour développer une relation de "gagnant-gagnant" entre les territoires pour qu’ils y trouvent des co-bénéfices.
Ces solidarités peuvent être mises en œuvre selon trois leviers :
- La planification (la réalisation d’un PCAET conjoint par exemple)
- La mutualisation d’ingénierie, d’études
- Les échanges avec une logique de co-investissement notamment.
2. Puis avec un temps de travail collectif sur ces solidarités territoriales, l’enjeu pour les participants était d’analyser les liens de dépendances de leur territoire avec d’autres territoires voisins ou plus éloignés. Après avoir présenté des exemples de solidarités urbain-rural à travers 5 thématiques qui déterminent l’habitabilité d’un territoire (co-habiter, se nourrir, accéder à l’énergie, agir/travailler, se déplacer), c’était au tour des participants de révéler ces liens.
Les interactions interterritoriales suivantes sont revenues le plus souvent : les déplacements professionnels ; la disponibilité des matériaux de construction ; la disponibilité de la ressource en eau. Les participants ont ensuite réfléchi aux solutions qui pourraient aboutir dans les documents d’urbanisme pour favoriser ces coopérations.
Des solutions à mettre en œuvre dans les PLUi ont été proposées par les participants comme la préservation des terres agricoles, l’interdiction des nouvelles constructions lorsque la capacité du territoire à fournir de l’eau est insuffisante, rapprocher les zones résidentielles des pôles économiques ou encore l’obligation des énergies renouvelables dans les nouvelles constructions.
Quelle articulation entre document d’urbanisme et dispositifs contractuels liés à la transition écologique ?
Lors de cette deuxième séquence, il était question de voir comment les différents contrats et autres outils pouvaient se répercuter et inspirer les porteurs de documents d’urbanisme dans leur démarche Bas carbone. Comment le document d’urbanisme peut-il s’en saisir ? En quoi ils enrichissent le contenu énergie-climat des SCoT et PLUi ?
Les dispositifs et outils qui accompagnent l’élaboration et la mise en œuvre d’un projet de territoire sont nombreux. Dans un "web des dispositifs" les participants se sont exprimés sur tous les liens possibles et souhaités entre leur planification et les différents contrats territoriaux existant.
Sur tous les territoires représentés à l'atelier, il existe toujours au moins un dispositif contractuel mis en œuvre et son impact est plus ou moins important sur le document d’urbanisme : les programmes Action cœur de ville ou Petites villes de demain (PVD), par exemple, sont en lien fort avec les leviers disponibles dans les PLU(i) pour leur mise en œuvre : "Mon PLU dispose de règles permettant de préserver les commerces en centre-ville" "Le PLUi fixe un objectif d’accueil de nouvelles familles par le biais du réinvestissement de logements vacants ambitieux pour la ville retenue PVD"
Le témoignage qui a suivi de Clémentine Saves-Julien et Mathilde Lefèvre du Pays Val de Garonne Guyenne Gascogne et Val de Garonne Agglomération a apporté des clés pour comprendre l’articulation entre plusieurs dispositifs qui se chevauchent sur un même territoire : un contrat de relance et de transition écologique (CRTE), un contrat d’objectifs territorial (COT) avec l’ADEME, le SCoT en cours de révision ainsi que la feuille de route NéoTerra de la Région Nouvelle-Aquitaine.
Ainsi, le même bureau d’études a été sélectionné sur ce territoire pour les deux démarches de révision du SCoT et d’élaboration du CRTE. Les diagnostics sont donc mutualisés et les grandes orientations stratégiques du CRTE (qui sera bientôt signé), servent de cadre et seront reprises dans le SCoT de manière à coordonner l’action. Un jeu d’itération est mis en œuvre entre ces deux démarches, elles s’enrichissent mutuellement pour plus de cohérence et pour gagner en opérationnalité.
Le COT poursuit parallèlement des objectifs chiffrés précis qui, s’ils sont atteints, débloqueront des financements de la part de l’ADEME. Il trouve sa source dans le CRTE du Pays et constitue son application opérationnelle.
Ce territoire saisit l’opportunité de la réalisation du CRTE, en tant que démarche intégratrice, comme "gouvernail" pour mettre en œuvre la transition écologique sur le territoire. Il est par ailleurs évalué au regard de la feuille de route régionale de la transition NeoTerra, dans le cadre de l’accompagnement Cerema dont il bénéficie.
améliorer l’articulation des planifications territoriale et sectorielles pour la mise en œuvre des objectifs Bas Carbone
Pour débuter cette dernière séquence, un débat a été proposé à propos des nouveautés liées à l'ordonnance de juin 2020 sur la modernisation des SCoT.
Ces derniers peuvent désormais tenir lieu de PCAET, le sujet de l’atelier étant la transversalité des documents d’urbanisme, les participants ont été invité à exprimer leur avis sur la question suivante : "Le SCoT tenant lieu de PCAET (SCoT-AEC) va faire gagner en ambition et en opérationnalité le volet PCAET".
Les avis sont partagés :
- D’accord : certains participants estiment que l’échelle du SCoT pour traiter des enjeux énergie-climat et l’articulation entre stratégie et action sont pertinentes ; la diminution du nombre de documents stratégiques et donc du risque d’incohérence entre eux est aussi mise en avant, ainsi que l’intérêt d’afficher des ambitions communes entre SCoT et PCAET.
- Pas d’accord : pour d’autres participants, cette articulation risque de complexifier davantage la planification territoriale, en associant un document opposable en urbanisme, avec un document d’action.
- Entre deux : certains sont partagés, cette articulation dépend selon eux du contexte territorial et des relations interpersonnelles locales.
- Ensuite, le témoignage de Katell Chomard et Isabelle Malot, de Lorient Agglomération, a donné des clés pour mieux articuler le PCAET avec les documents d’urbanisme et notamment pour transcrire les enjeux énergie-climat dans les PLU et les appliquer de manière opérationnelle sur le territoire.
Le SCoT et le PCAET ont en effet été élaborés conjointement sur le territoire. Mais la labellisation Cit’ergie de ce dernier en 2015 a révélé des problèmes quant à la traduction réglementaire et opérationnelle de ces enjeux énergie-climat.
Pour l’améliorer, une expérimentation a été mise en œuvre sur le PLU d’une des communes puis a été dupliquée sur plusieurs PLU de l’EPCI avec l’appui d’un bureau d’études. Ainsi, il y a eu une mise en réseau des acteurs et un diagnostic énergie territorialisé dans tous les PLU sur la base du PCAET. Une réflexion commune a été menée sur les prescriptions en matière énergétique pour essaimer le travail de la commune initiale sur tout le territoire de Lorient Agglomération.
Ensuite, pour garantir l’efficacité et l’application de ces règles pouvant être complexes, une formation a été organisée pour les chargés de PLU et les instructeurs. Un formulaire supplémentaire portant sur ces questions énergétiques a aussi été ajouté au formulaire CERFA des demandes de permis de construire afin de faciliter l’instruction.
Le temps de travail qui a suivi était consacré à cette articulation entre le PCAET et les documents d’urbanisme. D’une part, les objectifs du PCAET et des documents d’urbanisme (SCoT ou PLU) doivent s’enrichir mutuellement et se concorder. D’autre part, les actions du PCAET doivent être suffisamment explicites pour être appliquées par les PLUi et inversement, les orientations et règles des PLUi doivent être suffisamment ambitieuses pour répondre aux actions du PCAET (voir schéma ci-dessous).
Cette articulation parfois complexe permet pourtant aux PLUi d’accroître ses ambitions et son opérationnalité en matière d’énergie-climat. Les participants ont alors travaillé sur les deux questions suivantes :
Comment assurer la concordance entre les objectifs PCAET et les objectifs des PLUi et SCoT (flèche du haut du schéma ci-contre) ?
Les participants étaient invités à exprimer leurs idées en termes de gouvernance, de vision stratégique, de diagnostic et de pédagogie. Pour assurer cette concordance entre les objectifs de chaque document, les participants proposent notamment de mutualiser les groupes de travail entre ces démarches et d’améliorer le dialogue entre urbanistes et « énergéticiens ». Une phase de de co-construction entre les acteurs des deux démarches sur les enjeux énergie-climat semble aussi très importante.
Comment articuler les actions du PCAET et les orientations et règles du document d’urbanisme pour satisfaire les objectifs énergie-climat ?
Les participants étaient invités à inscrire des exemples de gouvernance à mettre en place, des actions, des moyens complémentaires ou encore des études à inscrire dans le PCAET pour satisfaire les objectifs énergie-climat dans le document d’urbanisme.
Ici, les participants ont aussi évoqué la nécessaire mutualisation des travaux entre les documents d’urbanisme et le PCAET ainsi que l’utilisation des mêmes outils pour ces deux démarches. Le PCAET semble aussi le bon outil pour impulser diverses études ou l’élaboration de documents complémentaires (schéma des énergies renouvelable, plan de paysage, cadastre solaire…) pouvant servir la stratégie bas carbone d’un territoire.