Un guide méthodologique pour répondre au risque incendie
A l'heure actuelle, le comportement au feu des ponts n'est pas traité par la réglementation française, qui ne porte que sur les bâtiments et les tunnels. La norme NF ISO 23932, applicable à toutes les configurations d'ouvrage, fournit les principes généraux aux ingénieurs pour évaluer le niveau de sécurité incendie des ouvrages, neuf ou existants.
En ce qui concerne la sécurité des personnes, pour les ponts, la problématique est très différente car la question de l'évacuation se pose à un moindre degré. Cependant, les enjeux socio-économiques imposent de s'intéresser au comportement des ouvrages en cas d'incendie, à travers des méthodes permettant d'améliorer la sécurité des usagers et de préserver la voie de circulation. Par ailleurs, après un incendie ayant endommagé un pont, la question du maintien ou non de la circulation sur l'ouvrage se pose et une réponse doit y être apportée, souvent dans l'urgence.
Lorsque le maître d'ouvrage décide d'avoir une exigence de protection de ses ouvrages vis-à-vis du risque d'incendie, il doit définir:
1. Pendant l'incendie : le scénario de feu contre lequel il veut protéger l'ouvrage, afin de conserver la fonction porteuse des structures durant une certaine durée d'exposition au feu.
2. Après l'incendie : il doit déterminer son niveau d'exigence vis-à-vis de l'état de l'ouvrage.
En réponse à ces enjeux, ce guide :
- expose, dans le cadre de la conception, des méthodes d'évaluation du transfert d'énergie et du comportement au feu des structures.
- donne des éléments quant à la conduite à tenir après un incendie et propose des méthodes d'évaluations structurales d'un ouvrage incendié.
- présente une méthode d'analyse simplifiée du risque "incendie" pouvant aider les maîtres d'ouvrage à déterminer leurs prescriptions. Cette analyse des risques peut être déclinée en deux étapes: d'abord une analyse simplifiée d'évaluation du risque, puis, si le risque est jugé très élevé, une analyse détaillée. Ce guide traite de l'analyse simplifiée uniquement.
- liste les dispositions envisageables pour améliorer le comportement au feu, depuis le surdimensionnement jusqu'à la protection.
Des retours d'expériences
En France, il existe peu d'exemples d'incendies survenus sur ou sous des ouvrages d'art, majoritairement en béton, et ils ont peu de conséquences car les incendies sont rapidement maîtrisés.
Pour les ouvrages métalliques, malgré des déformations importantes observées, aucun effondrement ne s'est produit. Par exemple, le pont Mathilde à Rouen a résisté à un incendie de deux heures bien qu'il ait été gravement endommagé.
Les exemples sont plus nombreux à l'étranger, avec des incendies ayant parfois entraîné l'effondrement de l'ouvrage.
Ce guide est basé sur des retours d'expériences variés, portant sur différents types de situations:
- incendie sous un pont dalle en béton précontraint à deux nervures
- incendie sous un viaduc à travées indépendantes à poutres VIPP
- incendie sous un pont dalle en béton armé
- incendie sur et sous une dalle orthotrope
- incendie sous un ouvrage mixte acier-béton
- viaduc en béton précontraint à précontrainte extérieure
Une analyse de 154 exemples de ponts incendiés entre 1997 et 2015
Par ailleurs, ce guide propose une analyse des cas répertoriés d'ouvrages incendiés, en s'appuyant sur une base de données de ponts incendiés dans différents pays entre 1997 et 2015, concernant 154 ponts.
Parmi les nombreux résultats issus de ce travail, il ressort que les ponts incendiés se trouvent dans deux tiers des cas dans une zone urbaine ou suburbaine. Les dommages les plus importants sont dus en grande majorité à des incendies de camions citernes transportant des hydrocarbures.
Il apparaît également que les feux intervenant sous les ouvrages sont nettement plus graves que ceux qui ont lieu sur l'ouvrage.
L'acier comme le béton souffrent des incendies, et on constate que les ponts à poutres sous chaussées représentent la majorité des structures ayant été fortement dégradées.