12 juillet 2018
Intervention de Julien Denormandie lors des RNA le 5 juillet 2018
Le 5 juillet 2018, les Rencontres Nationales des Aménageurs étaient consacrées à la question de la sobriété économique dans l’aménagement, à partir d’échanges et de retours d’expériences par des professionnels issus aussi bien de la sphère publique que privée. Parmi les sujets forts de cette journée : les nouveaux modes de faire et l’opportunité que représente l’objectif de la sobriété pour aménager différemment.

La 3e table ronde de la matinée s'est tenue en présence de Julien Denormandie, secrétaire d’Etat à la Cohésion des Territoires, auquel les co-présidents du réseau ont remis le rapport annuel, et qui lui même a salué la dynamique fédératrice du RNA ainsi que sa contribution pour relever les nombreux défis de l’aménagement.

Lancé en 2015, ce réseau permet à des professionnels de l’aménagement issus du secteur public et du secteur privé, de petites et grandes structures, de se rencontrer, d’échanger sur des problématiques communes et de partager leurs expériences .

Durant l’année 2018, le cycle des conférences du Réseau National des Aménageurs (RNA) porte sur la sobriété : sobriété environnementale, sobriété en termes de consommation foncière (ce sera le thème des Rencontres du 22 novembre 2018), et ce 5 juillet les participants ont échangé sur le défi de la sobriété économique en aménagement urbain, dans le cadre d’une séance plénière séquencée en trois tables rondes suivies de trois ateliers..

Le Cerema accompagne le ministère en charge du logement et de l’urbanisme (aujourd’hui le ministère de la Cohésion des territoires) pour l’animation et l’organisation des rencontres du Réseau National des Aménageurs depuis sa création en 2015. Il est à la manœuvre pour la préparation des rencontres et notamment l’élaboration des trois ateliers, dont il assure également l’appui à l’animation en séance  auprès des aménageurs qui en sont chefs de file et la restitution disponible sur le site du RNA. 

 

Mise en perspective historique et internationale autour de la sobriété économique en aménagement

Intervenants de la première table ronde
Dominique Lorrain, Perrine Laon et Aude Debreil - Crédit : Cerema

C’est d’abord une mise en perspective historique et internationale qui a été proposée, à travers les expériences de Laurent Théry, urbaniste, préfet honoraire, Dominique Lorrain, directeur de recherche émérite au CNRS, LATTS, et à l’Ecole des Ponts Paris Tech, et de Perrine Laon, directrice de l’aménagement et de l’urbanisme à la ville de Grenoble.

Il ressort de ces échanges que la sobriété est d’abord une attitude, voire une valeur, qui guide les projets urbains.  L’inscription dans le territoire, son histoire et sa géographie, le choix du maître d’œuvre, sont autant d’éléments importants dans la conduite du projet pour tenir une continuité qui fera la force du lieu.

La sobriété est aujourd’hui synonyme d’efficacité, et cette question est au cœur de l’action des élus.  Il apparaît également qu’écouter la population, tenir compte des remarques, permet de faire des économies dans les projets d’aménagement.

Il est aussi important de  pouvoir mesurer les consommations pour objectiver l’impact des actions en faveur de la sobriété .

Parmi les clés de succès des opérations dans le cadre de la sobriété, il faut penser le temps long, intégrer le processus de transformation urbaine dans une vision du territoire et tenir un fil rouge dans la durée pour faire des choix entre toutes les priorités. Pour cela, un portage politique fort est fondamental. Enfin, il faut garder à l’esprit que la qualité ne dépend pas du niveau de la dépense.

 

Retour d’expériences autour des projets d’aménagement Manufacture et Plaine Achille à Saint-Etienne

Intervenants de la deuxième table ronde
Stéphane Quadrio, Julien Leclercq,  Loïc Parmentier et Yvan Okotnikoff

Cette deuxième table ronde visait à montrer comment des projets relevant de la sobriété ont été menés à Saint-Etienne, à partir du retour d’expérience de différents intervenants : Stéphane Quadrio, directeur de l’aménagement de l’Etablissement public d'aménagement de Saint-Etienne (EPASE), Julien Leclercq, architecte associé de l’agence Vurpas, Loïc Parmentier, du collectif d’architectes Virage et Yvan Okotnikoff, de l’Atelier Georges.

Au départ du projet de réhabilitation d’un site industriel il y a dix ans, l’EPASE n’avait pas comme objectif principal de mener un projet s’appuyant sur la sobriété. Cette approche  s’est développée avec l’apport d’Alexandre Chemetoff, maitre d’oeuvre de 2009 à 2018 qui a proposé des interventions par petites touches au sein d’un plan guide  sans passer par une phase de maîtrise foncière préalable.

Il apparaît qu’à chaque fois qu’on pouvait associer le maître d’œuvre à la programmation, ou que l’on pouvait travailler des consultations d’entreprises avec des DCE à affiner dans le dialogue , les compétences des uns et des autres ont pu être mobilisées plus en amont, et ce processus itératif a montré son efficacité.

La phase initiale de diagnostic est  une étape à investir fortement par la maîtrise d’ouvrage pour construire la suite du projet. Enfin il s’agit de veiller à l’adhésion des acteurs privés pour les embarquer  dans la démarche, et intégrer également les gestionnaires en amont.

 

Quels leviers pour optimiser les dépenses d’investissement d’un projet urbain, tout en alliant qualité et attractivité ?

Intervenants de la troisième table ronde
Emmanuel Weibel, Julio Da Silva et Delphine Négrier

La troisième table ronde, animée par Sonia Guelton, enseignante chercheuse à l’école d’urbanisme de Paris, a vu les  interventions de Emmanuel Weibel, directeur adjoint de la filiale aménagement du groupe Crédit Mutuel-CIC, Delphine Négrier, co-gérante de l’agence de programmation urbaine Alphaville, et Julio Da Silva, architecte co-gérant de l’Atelier LD.

Il est ressorti des échanges que la recherche d’économies dans le projet est finalement une opportunité pour les architectes et les techniciens de trouver de nouvelles solutions. L’un des éléments de succès est le mode de fonctionnement interne des aménageurs : travailler en parallèle le projet urbain et les moyens financiers de sa réalisation, plutôt que ‘dessiner’ puis chiffrer l’investissement.

Il convient de s’appuyer sur l’existant, en particulier sur la topographie et l’hydraulique des terrains, pour minimiser les coûts, mais aussi de se fonder sur le marché local pour assurer la concrétisation de l’opération,  et enfin de trouver la conception avec le meilleur rapport qualité – coût, à chaque étape du projet. 

L’enjeu de mutualiser les équipements publics ainsi que celui de travailler très tôt sur les typologies de logements pour bien dimensionner les équipements publics ont aussi été abordés par les intervenants.

 

Des ateliers pour échanger les expériences autour de la sobriété économique

Durant l’après-midi, trois ateliers ont permis de décliner le thème de la sobriété économique en 3 approches.

Atelier 1 : Fondamentaux de l’aménagement : comment proposer des espaces publics pérennes, durables, offrant un confort d’usage, tout en maîtrisant les dépenses ?

Le groupe du premier atelierCe groupe de travail a été animé par Anne Blondeau, directrice générale adjointe de Citallios et par Olivier Morlet, directeur du développement aménagement chez ADIM Vinci Construction, et a été préparé avec Juliette Maître du Cerema Territoires et Villes.

Ce groupe de travail s’est plus particulièrement intéressé à certains aspects de l’espace public :

  • La sobriété limitera-t-elle l’espace public à sa plus simple expression et à des fonctions circulatoires, ou est-ce une occasion de repenser l’espace public et son rôle, ainsi que sa conception et son entretien ? La participation des habitants et usagers peut-elle contribuer à concevoir des espaces publics plus adaptés aux usages et mieux appropriés ?
  • Quels sont les leviers pour réaliser des aménagements sobres, pérennes, et proposant un véritable confort d’usage ? Comment les travaux sur les matériaux, notamment sur leur réemploi, peut contribuer à répondre à ces enjeux ?
  • Les questions environnementales et écologiques (au travers de la gestion alternative des eaux pluviales et de la place de la nature) sont-elles une opportunité pour l‘espace public de retrouver sa fonction première de bien public ?
  • Le numérique est-il lui aussi une opportunité pour les espaces publics ? Comment le numérique peut-il contribuer à la bonne conception et à la bonne gestion de l’espace public, voire à renforcer ses fonctions ?

 

Atelier 2 : Quel renouvellement de la filière aménagement ? Les nouveaux acteurs et usages, les modèles associés, notamment économiques, et la participation de ces acteurs à la dynamique de sobriété.

Intervenant du deuxième atelierCe groupe de travail a été animé par Anne Fraisse d’Europolia et Jose-Michael Chenu, de Vinci Développement Urbain, et vice-président d’EGF BTP, et a été préparé par Marion Benoist-Mouton et Marion Demarquet  du Cerema Ile de France.

La notion de sobriété implique une pluridisciplinarité dans l’approche des projets, entraînant de nouvelles manières de travailler. L’innovation est désormais au cœur des pratiques, interrogeant sur les nouvelles pratiques et les nouveaux besoins pour mener à bien un projet urbain.

La sobriété économique a différents impacts sur les projets :

  • Sur la gouvernance du projet : quels nouveaux acteurs doivent rejoindre le projet, à quel moment ?
  • Sur les outils et la conduite du projet : quelle nouvelle organisation de projet (nouvelle ingénierie, modes de coopération, pilotage, apport du numérique, quelles évolutions de ces outils ?) ?
  • Sur le temps du projet : quelle adaptation du projet urbain dans le temps et dans l’espace ?
  • Sur les risques pour les porteurs de projet, notamment liés au caractère innovant du projet.

 

Atelier 3 : Comment utiliser les cadres de travail coopératifs et juridiques pour atteindre les sobriétés ? Proposer des équipements publics de qualité tout en maîtrisant les dépenses : les leviers des aménageurs et des collectivités.

Le troisième atelierCe groupe de travail était animé par Camille Roccaserra, responsable du département aménagement à la fédération des EPL et Yann Le Corfec, directeur juridique à l’UNAM, et a été préparé avec Agnès Pouillaude du Cerema Ouest.

De plus en plus, les équipements publics sont appelés à être adaptés en fonction du contexte et des besoins, afin de répondre au double objectif de maintenir un haut niveau de service public, et de maîtriser les dépenses d’investissement ainsi que de fonctionnement.

L’atelier a permis d’aborder plusieurs questions :

  • Quelles stratégies de programmation et de financement des collectivités, afin d’offrir des équipements publics tout en réduisant les coûts ? Quels effets présents et à venir de la loi Notre et des budgets locaux qui sont plus contraints ?
  • Quels montages, quels nouveaux modes de faire et quelles coopérations permettent d’optimiser l’offre d’équipements publics ?
  • Quels sont les freins à l’évolution des équipements publics vers davantage de sobriété économique ?

 

Dans le dossier Réseau National des Aménageurs : des rencontres entre les acteurs publics et privés de l'aménagement

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