Développer la diversité des gestions intégrées nécessite de poursuivre la production de connaissances et le développement d’outils à l’intention des divers acteurs opérationnels, et en particulier des collectivités.
C’est l’objectif du projet Gestion Intégrée de l’Eau en Milieu Urbain (GIEMU) mené par le Cerema en partenariat avec l’Ifsttar et l’Irstea et avec les soutiens de l’Agence française de la biodiversité et du Ministère de la transition écologique et solidaire. Dans un cadre pluridisciplinaire et en s’appuyant sur des cas d’étude avec des collectivités locales, des recherches et retours d’expérience ont été menés pendant 4 ans.
Les enseignements de ces travaux ont été présentés en partenariat avec la Fédération nationale des collectivités concédantes et régies (FNCCR) le 19 novembre 2019 au pavillon de l’eau à Paris. Plus d’une centaine de personnes, majoritairement des collectivités locales, ont ainsi pu découvrir les résultats de nos travaux enrichis par des témoignages de collectivités pionnières.
La journée a été l’occasion d’échanges nombreux et fructueux entre chercheurs et techniciens des collectivités sur la bonne mise en œuvre de la gestion intégrée des eaux pluviales.
Les supports des présentations de la journée sont en ligne sur le site de notre partenaire la FNCCR. La journée a été structurée autour de 3 séances principales avec des présentations et des débats.
Pratiques en matière de gestion patrimoniale des techniques alternatives
Cette s’est organisée autour de la présentation de deux retours d’expérience menés par le Cerema et l’Ifsttar, des témoignages de la Roannaise de l’Eau et de la Communauté d’Agglomération d’Hénin Carvin, puis d’un temps d’échange avec la salle.
Ces présentations ont été l’occasion de souligner:
- la multiplicité des acteurs susceptibles d’être impliqués dans la production ou la gestion des ouvrages
- la nécessité d’une organisation au cas par cas, en fonction du contexte local et des services en charge de la gestion des eaux pluviales. Le partage des responsabilités d’entretien et les moyens mis en œuvre pour la coordination des différents intervenants semblent en particulier demeurer variables d’un territoire à l’autre, tout en constituant un réel point d’attention pour les collectivités.
Si une standardisation des réponses à apporter aux difficultés inhérentes à la gestion des techniques alternatives est clairement apparue comme illusoire voire contre-productive, les différentes interventions ont néanmoins permis de réaffirmer l’intérêt de certaines pratiques et outils.
Les systèmes d’information géographiques sont notamment apparus comme des solutions pertinentes, tant pour le suivi et l’entretien des ouvrages que pour le déploiement d’une stratégie de gestion des eaux pluviales à l’échelle d’un territoire. Les échanges avec les gestionnaires comme les enquêtes ont enfin confirmé l’importance de l’accompagnement et de l’animation territoriale pour s’acheminer vers une gestion intégrée des eaux pluviales, tout au long du cycle de vie des ouvrages.
Des outils innovants pour mettre en œuvre une gestion intégrée
Le Cerema et l’Irstea ont abordé au cours de la session suivante la multifonctionnalité des ouvrages végétalisés de gestion des eaux pluviales ainsi que les coûts et bénéfices associés aux techniques alternatives. A travers l’expérience de la collectivité du Grand Chalon, les différentes motivations pour la gestion intégrée ont été présentées.
Fort de ses 25 ans d’expérience, le président de l’Association pour le Développement Opérationnel et la Promotion des Techniques Alternatives (ADOPTA) a émis un certain nombre de recommandations pour le développement des techniques alternatives et a mis en lumière les économies réalisées sur le territoire du Douaisis.
Il ressort des débats un besoin d’évaluation des coûts des dommages évités par la mise œuvre d’une gestion intégrée des eaux pluviales. L’évaluation des bénéfices immatériels tels que les services culturels constitue également une perspective de travail.
Mobiliser les usagers et citoyens pour une gestion intégrée, est-ce possible ?
Enfin, une dernière séance a permis de questionner la mobilisation des usagers et citoyens pour une gestion intégrée des eaux pluviales urbaines. De nombreuses collectivités notamment à l’international proposent déjà des programmes pour impliquer les citoyens dans la gestion de l’eau chez eux à même la parcelle.
A partir de l’analyse d’un panorama d’environ une centaine de programmes, majoritairement anglo-saxons, plusieurs facteurs de réussite se dégagent :
- Communiquer sur les enjeux liés à l’eau : pour faire connaître les enjeux liés à l’eau, des événements festifs (fêtes des plantes, concours de jardins de pluie) sont organisées en lien avec des actions pédagogiques scolaires ;
- Impliquer et responsabiliser les habitants : certains programmes insistent sur la responsabilité de chacun et visent à modifier nos pratiques en interpellant les passants, comme par exemple, les marquages d’avaloirs avec des slogans du type « tout part à la mer » ;
- Monter des programmes complets : un simple soutien financier ne suffit pas pour mobiliser les citoyens comme le rappelle l’exemple de l’Eurométropole de Strasbourg. Son programme de déconnexion au réseau des eaux pluviales intègre une aide technique, une assistance administrative en plus du soutien financier ;
- Mutualiser les connaissances et les bonnes pratiques : c’est souvent à l ‘échelle métropolitaine ou régionale que ces programmes se généralisent après des phases locales expérimentales. Enfin, ce sont des partenariats avec des associations, fondations et universités qui participent grandement à la réussite de ces actions.
La journée a donc bien illustré que les gestions intégrées des eaux pluviales se développent et sont mises en œuvre aujourd’hui sur une diversité de territoires. Les travaux de recherche présentés constituent des leviers pour mieux mettre en œuvre ces gestions intégrées, et ainsi les développer. La plurifonctionnalité des ouvrages de gestion est apparue clairement comme un atout mais implique aussi des complexités dans les phases de conception et de gestion qu’il faut continuer à étudier.
La question des performances de ces ouvrages plurifonctionnels, qui se posent à différentes échelles spatiales et temporelles, sont apparues comme pas encore entièrement résolue, y compris en intégrant les liens sociaux. Il est aussi apparu le besoin de mettre en perspective ces multi-performances avec leur impact sur l’environnement (concepts d’analyse du cycle de vie, de génie écologique) et avec leurs coûts d'entretien en multi services et le consentement à payer de la part des usagers et citoyens.