Faisant suite à plusieurs journées de travail sur le coût Global en 2018 et 2019, cet atelier avait pour objectif d’échanger sur les bonnes pratiques de la gestion alternative des eaux pluviales et des conséquences de son intégration au sein de l’aménagement. La journée a réuni plus une vingtaine de participants : collectivités, aménageurs, partenaires de la démarche EcoQuartiers, Cerema et services de l’Etat.
Les objectifs et modalités de ces groupes de travail sur le coût global en aménagement sont les suivants : réunir les collectivités, leurs opérateurs, les partenaires et les services de l’État intéressés par le sujet afin d’échanger sur leurs expériences et produire collectivement des enseignements à destination de l’ensemble du club.
Présentation de C. VENTURINI: missions et objectifs de la Direction de l’Eau et de la Biodiversité (DEB)
Actuellement, la DEB lance le 11ᵉ programme d'intervention es agences de l'eau (2019-2024). Les agences de l'eau attribuent des aides financières pour des projets destinés à réduire la pollution rejetée au milieu naturel (sujet prioritaire) à destination des établissements compétents en matière d’assainissement. Un des revenus des agences de l’eau est les redevances prélevées à chaque usager de l’eau.
Une feuille de route nationale sur la gestion des eaux pluviales est en cours de préparation avec un plan d’action partenarial intitulé « Une décennie des eaux pluviales » sur 4 axes (mission confiée au Conseil Général de l’Environnement et du Développement Durable en 2017, rapport en 2018) :
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améliorer les connaissances pour mieux gérer pluviales : valoriser, capitaliser et dresser une photographie de l’état actuel pour agir ;
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Accélérer la réduction des pollutions des milieux aquatique par temps de pluie et faciliter l’exercice de la police des réseaux ;
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renforcer la prise en compte des eaux pluviales dans les politiques d’aménagement du territoire : renforcer les « villes éponges » et gérer la pollution le plus en amont possible et insister auprès des collectivités afin d’avoir un plan de zonage, une réglementation adéquate ;
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mieux faire connaître les eaux pluviales et les services qu’elles rendent.
L’ensemble de ces objectifs sera lancé dès la fin du premier semestre 2019.
Présentation de C. GIBELIN, responsable unité eau du Cerema Île-de-France: la gestion intégrée des eaux pluviales"
L’urbanisation grandissante, l’imperméabilisation des sols toujours plus importante et la gestion des eaux de ruissellement par canalisation provoquent notamment l’augmentation du volume de ruissellement, la baisse du temps de concentration de la pollution.
La gestion de l’eau de pluie actuelle fausse bien souvent le cycle naturel de l’eau, en rejetant les eaux pluviales loin de là où elles sont tombées, en collectant la pollution par ruissellement, et par conséquent en transférant la pollution en aval provoquant des chocs sur le milieu récepteur. C’est pour cela qu’il est nécessaire de réfléchir à une gestion intégrée des eaux pluviales et de ne pas connecter systématiquement une surface imperméabilisée à une canalisation.
Ils existent différentes solutions, dont la plupart sont fondées sur la nature. Par exemple, les les noues permettent de retarder l’apport des précipitations dans les canalisations, de réduire fortement le volume d’eau rejeté et de bénéficier d’effet d’îlot de fraîcheur. Les noues sont une technique de surface, peu profonde. Ce sont des ouvrages linéaires, enherbés voire végétalisés.
La présentation illustre avec une comparaison des eaux récoltées entre 2 bassins versant : l’EcoQuartier de Bottière Chenaie et le quartier Pin Sec à Nantes. Les noues de l’EcoQuartier induisent un décalage et une diminution du pic, voire du volume global sur certain épisode pluvial. Pour 23 % des pluies, on constate un débit nul à la sortie de l’EcoQuartier.
Parmi les autres solutions possibles, on trouve les toitures végétalisées qui diminuent également le volume de ruissellement avec une variation selon sa composition. Le Cerema Île-de-France a expérimenté depuis 2011, plusieurs structures de toiture et leur volume d’eau de pluie rejetée, ce qui a permis de comparer les différentes installations. Pour exemple, les toitures végétalisées permettraient d’abattre 80 % des pluies sur un territoire au Nord de la Loire (équivalent à 16 mm de pluie). De cette expérience, un outil a été créé par le Cerema sur les performances hydriques des toitures végétalisées permettant de mesurer le rejet des eaux de ruissellement sur un projet de construction et d’aider les concepteurs à faire des choix plus avisés et plus juste avec le contexte : http://faveur.cerema.fr
En aménagement, il est également possible de travailler sur des revêtements perméables (substrats et végétations, revêtement poreux, non jointés, des pavés enherbés…). Ces choix d’aménagement permettent également de réduire le coefficient de ruissellement : selon la méthode choisie, la rétention varie de 25 à 90 %.
La gestion intégrée des eaux pluviales a également de nombreux avantages et leviers autre que la prévention des inondations : amélioration du cadre de vie, le retour de la nature en ville, limitation des effets des îlots de chaleur urbain.
CHANGER LES PRATIQUES : TÉMOIGNAGE D’ACTEURS
Présentation Béatrice COUTURIER de Lyon Métropole sur “L’approche ville perméable au Grand Lyon : approche en coût global de la gestion alternative des eaux pluviales en milieu constitué”
La métropole de Lyon a lancé une étude sur l’éventuelle désimperméabilisation de son territoire urbain et notamment sur la conséquence budgétaire de ces aménagements sur le fonctionnement de la collectivité, en identifiant les coûts de gestion par métier, par directions.
La collectivité a étudié, sur un aménagement de 100 ml au centre d’un quartier urbain moyennement passant, différentes solutions de gestion des eaux pluviales afin de comparer le coût tant au niveau investissement qu’au niveau gestion et entretien. Sept scenarii d’aménagement de voirie ont été choisis avec une gestion des eaux pluviales plus ou moins intégrée à l’aménagement : une gestion des eaux pluviales par un ouvrage dédié (noue, puits d’infiltration, réservoir sous chaussée) ou par la réalisation d’un revêtement poreux ou par un aménagement classique et habituellement réalisé (bassin d’infiltration situé en dehors de l’aménagement).
Une comparaison des coûts et bénéfices a été développé selon la temporalité des acteurs : selon le regard des gestionnaires et habitants (60 ans) et selon le regard du chef de projet et du Maire (10 ans).
L’étude démontre, pour la métropole de Lyon, que l’aménagement intégrant une noue comme technique alternative de gestion des eaux pluviales reste la solution la moins onéreuse en investissement.
La comparaison en coût global sur 10 et 60 ans démontre également que les aménagements intégrant des techniques alternatives de gestion des eaux pluviales sont moins coûteux en entretien, sur le budget global de la collectivité.
L’étude s’est penchée également sur certaines externalités : bien-être en ville, adaptation à l’augmentation des volumes d’eau, protection des milieux naturels et production de déchets non valorisables la solution de la noue présente le plus de bénéfices.
Cependant des différences sont à noter selon les services. En effet, les coûts de gestion par métier (par direction de la collectivité : gestion hydraulique / gestion voirie / gestion espaces verts et horticole/ nettoiement) ont été isolés et selon les techniques utilisées, les coûts en fonction des gestionnaires métiers varient et cela impacte différemment les différents services et leurs budgets.
Présentation de Thierry Maytraud, ATM « Gestion des eaux pluviales pour une économie globale du projet »
Historiquement en France, l’enjeu majeur était la lutte contre les inondations, tandis que les autres pays qui ont réfléchi à la gestion de l’eau étaient plutôt tournés sur la qualité des eaux. C’est sur ce constat que le département de la Seine Saint Denis, dès 1994-1995, a choisi de promouvoir une nouvelle approche de l’assainissement avec une gestion des eaux pluviales « à ciel ouvert », très visible et intégré à l’aménagement. Il s’agissait de proposer un assainissement multifonctionnel afin de valoriser la ville.
La présentation s’est également attardée sur plusieurs autres exemples illustrant la pertinence et la qualité des aménagements intégrant une gestion alternative des eux pluviales. De ces retours d’expériences, plusieurs enseignements ont été tirés sur un même thème : une démarche de multifonctionnalité.
En effet, pour un aménagement de qualité, la gestion des eaux pluviales doit être intégrée dès la conception de l’espace, en intégrant également la lutte contre les inondations, le réchauffement climatique et la création d’îlot de fraîcheur, l’amélioration du cadre de vie, l’écologie urbaine…
La présentation a également abordé « le zéro rejet », comme exemple d’une autre forme de réseau séparatif, moins coûteux et plus durable. Ces solutions sont des éléments d’une ville bioclimatique, en favorisant le plus long cheminement de l’eau pour maîtriser les inondations.
Aujourd’hui la multifonctionnalité est une réponse aux enjeux bioclimatiques et de réchauffement des villes et un élément d’identité territoriale et de bien-être urbain.
« Retour sur l’atelier des territoires PACA »
L’atelier des territoires PACA (commencé en 2018) avec DDT13, DREAL PACA et AE RMC est basé sur 3 sites en PACA (Marseille, EcoQuartier de Coudoux et tissu urbain sur Aix). Le premier travail a été un travail d’arpentage au regard de la gestion de l’eau : regarder, cheminer la ville à la place de la goutte d’eau. Le second travail était un d’atelier où chaque groupe se projetait sur un métier : paysagiste, hydraulique… L’enjeu est de déboucher sur une feuille de route métropolitaine.
Présentation de C. Fréchet, Cerema, "Approche en coût global : qui paye quoi ?" "X-mind" pour la gestion des eaux pluviales
Cette carte mentale présente l’ensemble des acteurs de l’aménagement (aménageurs, promoteurs, collectivité, syndicat mixte…) avec une décomposition de leur budget en investissement et en fonctionnement (pour la collectivité et les habitants). Ce document développe ainsi « qui paye quoi ? », fait apparaître les différents objectifs des acteurs de l’aménagement : la plupart des acteurs interviennent uniquement dans la phase « investissement » de l’aménagement, laissant la collectivité et les habitants face aux problématiques liés au fonctionnement, l’exploitation ou l’entretien de l’espace, du quartier ou de la ville.
Suites
Après la gestion des eaux pluviales, c'est la question de l'approche en coût global dans les EcoQuartiers qui sera traitée en 2019.
D'autres travaux d'approfondissement sont prévus en 2020.