La Trame Verte et Bleue est un maillage d’espaces naturels permettant à la flore et à la faune de réaliser son cycle de vie (se nourrir, se reproduire, hiverner, se reposer…), qui comprennent les réservoirs de biodiversité où vivent les espèces et les corridors écologiques qui leur permettent de se déplacer d’un site de vie à l’autre, dans un paysage plus ou moins artificialisé. Le Cerema a accompagné l’Eurométropole de Metz pour réaliser sa cartographie de la trame Verte et Bleue sur son territoire en 2017-2019.
A la suite de cet accompagnement, la collectivité a souhaité mettre en place un plan d’actions pour préserver ou restaurer les continuités écologiques identifiées et a répondu à un appel à projets régional avec le Cerema dans ce cadre. L’Eurométropole de Metz comporte des espaces naturels que l’on peut qualifier de "remarquables", qui sont classés en tant que site Natura 2000, Espace Naturel Sensible ou encore en Zone Naturelle d’Intérêt Ecologique, Faunistique et Floristique (ZNIEFF), en raison de la présence avérée d’espèces animales et végétales rares ou menacées. Ces espaces naturels sont diversifiés : forêts, pelouses calcaires, prairies, zones humides.
Dans un premier temps, les périmètres de ces différents sites ont été recensés et rassemblés dans une cartographie générale présentant les espaces naturels du territoire.
Une méthode d’identification des zones à enjeux
L’objectif de la méthode du Cerema est d’identifier d’une part les sites où vivent et circulent les espèces, d’autre part les obstacles à leur déplacements.
Des modélisations ont d’abord été réalisées pour 16 espèces d’animaux représentatives du territoire (Ecureuil roux, Hérisson d’Europe, Salamandre tachetée, tritons, Renard roux, papillons, sauterelle…) afin de mettre en évidence la qualité écologique de l’habitat en fonction de la distribution de ces espèces sur le territoire, à une résolution de 5 mètres. Les espèces ont d’abord été choisies sur la base d’une approche multi-critères : milieux fréquentés (forêts, prairies, pelouses calcaires, zones humides…), besoins vitaux, capacités de déplacement, espèce emblématique… Les modèles obtenus pour ces espèces ont permis d’identifier des zones à forts enjeux pour la biodiversité.
Ensuite, une carte de résistance paysagère a été construite en exploitant le modèle précédent, afin de mettre en évidence la perméabilité du paysage, c’est-à-dire la plus ou moins grande facilité pour les espèces de circuler. Sur chaque pixel de cette carte, un coefficient de perméabilité a été attribué par le modèle statistique, qui représente les possibilités dont dispose l’espèce pour se déplacer dans le milieu représenté. Plus un milieu est artificialisé ou éloigné des exigences de l’espèce, plus il sera difficile à traverser et donc limitera les possibilités de circulation.
Enfin, la connectivité écologique a pu être représentée en simulant les chemins les plus courts et maximisant la perméabilité paysagère pour les espèces entre les réservoirs de biodiversité de l’Eurométropole.
En croisant ces corridors écologiques avec les infrastructures de transport, des zones de conflit, c’est-à-dire des obstacles potentiels aux déplacements des espèces, ont pu être identifiées.
Outre les infrastructures de transport et le trafic routier, ce modèle intègre les cours d’eau qui constituent des barrières et les ouvrages d’art qui peuvent au contraire représenter des passages à faune pour les animaux. Enfin, des données sur les collisions entre la faune et les véhicules ont également été prises en compte, pour identifier les zones à risque de mortalité.
Les corridors identifiés se trouvent majoritairement sur la périphérie de la zone urbaine, mais la plupart entre en conflit avec des infrastructures difficilement franchissables (autoroute A31, nationales à 2x2 voies, canal de la Moselle…). Pour certains animaux, des corridors existent aussi en zone urbaine, entre les zones de parcs, jardins et espaces verts. C’est le cas pour l’Ecureuil roux et le Hérisson.
Les résultats des modélisations obtenus en ville pour ces deux espèces permettent d’identifier les zones à enjeux de végétalisation pour améliorer la trame verte urbaine. Un lien entre ces enjeux de restauration de la TVB urbaine et d’autres enjeux d’adaptation au changement climatique, a pu être mis en évidence sur l’Eurométropole. En effet, les secteurs à enjeux de végétalisation mis en évidence, sont presque identiques à ceux identifiées dans le cadre d’une étude antérieure portant sur les ilots de chaleur urbains, c’est-à-dire les zones où l’on observe des phénomènes localisés d’élévation des températures, ou dômes de chaleur, liés à l’artificialisation des sols.
Ce travail a permis d’identifier 3 types de zones à enjeux, selon qu’il soient liés à l’habitat des espèces, à la connectivité ou aux collisions, qui ont fait l’objet de cartographies séparées et d’une synthèse.
En complément, un diagnostic a été établi sur les cours d’eau du territoire, avec la mise en évidence d’enjeux de restauration de ces derniers.
30 fiches actions pour préserver les zones d’habitat des espèces et pour faciliter leur circulation sur le territoire
Les fiches actions proposent des scénarios illustrés d’intervention pour la requalification d’ouvrages d’art existants, afin de les rendre plus favorables à une utilisation par la faune pour le franchissement des infrastructures. La création de plusieurs passages à faune dédiés, écuroducs ou écoponts, est également proposée dans les zones qui concentrent les principaux enjeux, en l’absence d’autres possibilités de franchissement pour la faune.
Les scénarios d’intervention pour la requalification des ouvrages et la proposition d’ouvrages neufs, s’appuient largement sur les récents guides du Cerema sur les passages à faune, mais aussi sur de nombreux retours d’expérience du Cerema. Les travaux proposés sont adaptés aux enjeux, depuis des aménagements légers de végétalisation des ouvrages ou poses d’andains (alignement de pierres, bûches et autres matériaux, utilisés comme support de déplacement pour des petits mammifères, des reptiles ou des invertébrés), jusqu’à des interventions plus lourdes sur les ouvrages, incluant la désimperméabilisation des sols, la pose de parapets d’occultation du trafic routier ou encore de banquettes. Ces dernières permettent de transformer des ouvrages hydrauliques en passages utilisables par la faune terrestre.
Le guide des passages à faune pour les projets d'infrastructures - 2021
Préservation et restauration des continuités écologiques dans le cadre d’un projet d’infrastructure linéaire de transport. Guide des passages à faune. Un guide complet qui présente aux maîtres d'ouvrages les solutions pour concevoir des passages pour la petite comme la grande faune.
Le guide des passages à faune pour la requalification des infrastructures
Paru en 2019, ce guide présente aux maîtres d'oeuvre et maîtres d'ouvrage la méthode pour rétablir les transparences écologiques au niveau des infrastructures de transport, en l’illustrant par de nombreux exemples de réalisations pris sur l’ensemble du territoire.
Une évaluation du coût de ces scénarios est également proposée, avec des montants estimatifs compris entre environ 2000 euros pour des travaux légers à 2 millions d’euros pour la création d’un écopont.
Concernant la mortalité par collisions routières, sur la base des zones à enjeux identifiées, les fiches abordent deux actions sur des tronçons routiers distincts : la mise en place d’un dispositif détecteur / avertisseur pour les conducteurs en cas de traversée d’un animal et la réduction de la vitesse de circulation.
Enfin, des mesures d’accompagnement sont également proposées, telles que le suivi systématique des ouvrages d’art par piégeage photographique (détection de la faune utilisant les ouvrages pour franchir l’infrastructure), afin d’évaluer l’efficacité des travaux réalisés.
La mise en application de ce programme d’actions ambitieux est désormais à l’étude au sein de l’Eurométropole. Les réflexions sur la faisabilité des opérations sont menées entre les services de la collectivité, dans le contexte particulier du récent transfert de l’entretien de la voirie départementale à la métropole. Ce transfert, prévu par la loi Notre du 7 août 2015 (Nouvelle organisation territoriale de la République), est effectif depuis le 1er juin 2021. Il impose notamment à l’Eurométropole de Metz d’assurer l’entretien des ouvrages d’art sur les voiries départementales. Une nouvelle approche, dont le principal enjeu est d'intégrer les problématiques liées aux transferts des compétences sur les voiries, pour mieux concilier leur gestion et celle des ouvrages d'art avec les objectifs de restauration de la transparence écologique des infrastructures de transport sur les territoires.