Le 7 novembre, date anniversaire de la naissance de Marie Curie, a été retenue pour la Journée européenne du radon, gaz radioactif, indolore et incolore, naturellement présent dans certaines formations rocheuses du sous-sol, et qui est la deuxième cause de cancer du poumon en France, après le tabac.
L’exposition au radon est responsable chaque année de 3000 décès, soit le même ordre de grandeur que celui des décès par accidents de la route.
Le radon, enjeu de santé publique
La problématique du radon est très présente en Bretagne, Normandie, Pays de la Loire et dans le centre de la France.
À l’occasion de la journée européenne du radon, le 7 novembre, le Cerema revient sur une étude réalisée dans une école des Hautes-Alpes touchée par les émissions de radon.
Il a développé une expertise unique sur le confort et la performance des installations à l’intérieur des bâtiments afin d’en améliorer la qualité de l’air.
Cette approche lui permet de bien appréhender la question radon et ce, depuis plus de 10 ans :
- Le Cerema mène des "expertises bâtimentaires radon" dans le résidentiel comme dans le tertiaire, dans les établissements recevant du public. L’objectif est d’identifier les causes de la pénétration du radon et de son accumulation dans le bâtiment, pour proposer, au regard de ces constats, des pistes de travaux adaptées au cas par cas afin d’abaisser la concentration de ce polluant dans l’air intérieur ;
- Avec ses retours d’expériences de terrain et son appui technique, le Cerema accompagne l’Etat pour adapter la réglementation et en particulier sa stratégie nationale radon ;
- Il soutient les services déconcentrés porteurs d’actions de sensibilisation sur leur territoire en apportant son expertise technique notamment lorsque des mesurages en radon montrent des taux élevés, et que le particulier a besoin d’un expert pour lui proposer des solutions de remédiation pour faire diminuer ces concentrations ;
- Fort de ces expériences, le Cerema est aussi en capacité d’assurer une assistance à maîtrise d’ouvrage dans la rénovation d’un parc de bâtiments ou dans la construction de bâtiments se voulant exemplaires dans la gestion du risque radon et de la qualité de l’air intérieur en général ;
- Le Cerema mène enfin des actions de formation à l’égard des professionnels du bâtiments (bureau d’étude, architectes, entreprises) pour transmettre son savoir et ainsi favoriser l’émergence de professionnels aptes à résoudre cette problématique sur le territoire. Il a par exemple conçu une grille d'audit simplifié pour détecter la présence de radon dans les bâtiments où le niveau de référence de 300 Bq/m3 est dépassé:
Expertise radon : une étude à l'école primaire de Saint-Chaffrey dans les Hautes-Alpes
Le Cerema est intervenu en 2017 à l'école primaire de Saint-Chaffrey, suite à une demande de la commune, qui cherchait à comprendre pourquoi les niveaux de radon dans l'établissement dépassaient les 300 Bq/m3 et pour qu'il propose des travaux afin de réduire ces concentrations.
Saint-Chaffrey est une commune de Hautes-Alpes classée en zone 3 [1], ce qui signifie que les sols ont un potentiel radon significatif.
Le bâtiment de l'école primaire, construit en 2006, est performant sur le plan énergétique, les murs et les fondations sont en béton banché et son architecture est typique des maisons en région montagnarde. On y accède sur 3 niveaux différents, l'école Maternelle au rez-de-pré (R+0), l'école élémentaire au rez-de-cours (R+1) et rez-de-rue (R+2), et la garderie et bibliothèque au rez-de-rue (R+2). Les deux niveaux inférieurs sont semi-enterrés Le bâtiment est construit sur terre-plein et présente un vide sanitaire au niveau R+0 accessible par l'intérieur du bâtiment.
Dépassement de concentrations de radon
Suite à un dépistage radon réalisé en 2007/2008, conformément à la réglementation en vigueur, des concentrations en radon comprises entre 300 et 1000 Bq/m3 ont été détectées au niveau le plus bas.
Pour rappel, l’unité pour évaluer la concentration en radon d’un espace est le Becquerel (unité d’activité radioactive : 1Bq=1atome qui se désintègre/seconde) par unité de volume : Bq/m³. L’Organisaiton Mondiale de la Santé estime que le risque sanitaire existe au-delà du seuil de 100Bq/m³. En Europe, la directive Euratom fixe comme seuil d’action la valeur de 300Bq/m³. Cette dernière n’est opposable en France que dans les ERP, le résidentiel n’étant pas concerné par la réglementation.
Le gestionnaire de l'établissement a donc fait procéder à différents types des travaux de remédiation :
- étanchéification des points d'infiltration identifiés de radon (2009 et 2010),
- pose d’un extracteur dans le vide sanitaire pour permettre l'aspiration du radon avant sa pénétration dans le bâtiment (2010),
- pose d’une grille d’aération dans la porte extérieure du dortoir pour permettre la dilution du radon.
Des mesures de contrôle ont été réalisées après ces travaux à l'hiver 2015/2016 et ont montré une concentration toujours supérieure au niveau de référence de 300 Bq/m3 dans le dortoir. Le dépistage décennal à l'hiver 2017/2018 a identifié 3 zones dont les résultats étaient supérieurs à 300 Bq/m3 et un résultat supérieur au niveau de 1000 Bq/m3 pour le dortoir.
Le bâtiment expertisé par le Cerema
Suite à ce constat de résultats persistants au-delà de 300 Bq/m3 ainsi qu'au dépassement du niveau de 1000 Bq/m3, conformément à la réglementation [2], la mairie de la commune devait faire réaliser une expertise de son bâtiment. Elle a sollicité le Cerema pour cela, qui est intervenu fin 2017.
L'expertise technique radon a pour objectifs d'expliquer la présence du radon dans le bâtiment et de proposer des travaux pour faire diminuer ces concentrations. Le Cerema a mené une visite technique afin derecueillir les informations sur les caractéristiques du bâtiment, réaliser des mesures continues en radon dans le but d'identifier les points d'entrée et les points de transfert du radon, et des mesures de ventilation pour qualifier le renouvellemetn d'air.
Ces constats ont permis d'identifier:
- Des défauts d'étanchéité persistant à l'interface sol/bâti constituant autant de points de pénétration du radon dans le bâtiment,
- Des dysfonctionnements dans l'installation du système de ventilation en place, ayant comme conséquence une baisse du renouvellement de l'air global du bâtiment favorisant l'accumulation du radon.
Le Cerema a donc proposé différents types de travaux, dans le but:
- En priorité 1 d'empêcher le radon de pénétrer dans le bâtiment et de rectifier les dysfonctionnement du système de ventilation mécanique par insufflation en place,
- Et en prioirité 2, si les mesures de contrôle après travaux proposés en priorité 1 ne permettent pas de redescendre sous le niveau deréférence de 300 Bq/m3, d'améliorer l'extration du radon dans le vide-sanitaire avant sa pénétration dans le bâtiment.
Des travaux pour réduire la concentration de radon
De nombreux travaux ont été mis en oeuvre par le gestionnaire de l'école en 2019 avec l'étanchéification des points de pénétration de radon identifiés au niveau de la jonction sol/mur/plafond.
Au niveau du système de ventilation mécanique en place, le caisson a été remplacé, un organe d'équilibrage automatique a été incorporé, l'étanchéité des réseaux aérauliques a été renforcée, et la réalisation d'un détalonnage des portes intérieures a permis d'améliorer la circulation de l'air du système de ventilation.
L'ensemble de ces travaux se sont avérés efficaces puisqu'ils ont permis de faire redescendre les concentrations en radon dans le bâtiment en dessous de la valeur de référence de 300 Bq/m3. Ce qui a permis la ré-intégration de la classe maternelle de l'école dans ses locaux.
Ce retour d'expérience montre que la gestion du radon est une démarche itérative et progressive. Seul le dépistage permet de valider l'efficacité des travaux réalisés. L'expertise radon nécessite de nombreuses compétences (ventilation, perméabilité à l'air, métrologie, etc) et permet d'optimiser la définition des travaux de remédiation en fonction des constats identifiés propres à chaque situation de dépassement.
[1] Selon l'arrêté du 27 juin 2018 portant délimitation des zones à potentiel radon du territoire français, par réf. aux délimitations administratives en vigueur à la date du 01/01/16.
[2] Arrêté du 26 février 2019 relatif aux modalités de gestion du radon dans certains établissements recevant du public et de diffusion de l'information auprès des personnes qui fréquentent ces établissements.