Lieu d'échange privilégié entre acteurs publics du foncier, les Rencontres des acteurs publics du foncier sont l'occasion de partager les experiences et les réflexions autour des thématiques d'actualité dans le domaine du foncier.
Plusieurs spécialistes du Cerema ont contribué à l'organisation et à la capitalisation de ces rencontres, notamment à travers l'animation de quatre des cinq ateliers sur les outils de la transition foncière qui ont eu lieu durant l'après-midi.
Ce rendez-vous était consacré aux différents aspects de la transition foncière et à ses enjeux:
- lutte contre l'artificialisation des sols,
- choc d'offre pour le logement et mobilisation du foncier public,
- revitalisation des coeurs de villes et des petites centralités,
- requalification des friches urbaines.
Le foncier, au coeur des enjeux de territoire
La matinée a permis d’introduire les enjeux liés à l’artificialisation des sols pour les territoires, à la rareté du foncier, et aux outils aujourd’hui mobilisés par certains acteurs du territoire.
Les rencontres ont été ouvertes par Emmanuel de Lanversin, directeur adjoint de l’habitat, de l’urbanisme et des paysages, qui a rappelé les enjeux pesant sur le foncier :
- construire davantage de logements,
- mieux et moins chers,
- répondre au problème de la spéculation foncière
- tendre vers un taux de zéro artificialisation nette.
La rareté du foncier en fait un enjeu prioritaire des politiques d’aménagement, afin de permettre aux collectivités d’agir sur le foncier. Des propositions seront faites à l’automne pour pouvoir en 2020 identifier les gisements fonciers.
Un autre enjeu important est la cohésion des territoires, et d’éviter la ségrégation spatiale pour tendre vers un maillage territorial équilibré. L’intervenant a également abordé la création de l’Agence Nationale de Cohésion des Territoires, qui devrait faciliter les démarches des collectivités en matière de stratégies foncières notamment.
Jean-Luc Lagleize, député de Haute-Garonne, membre de la commission des affaires économiques à l’Assemblée Nationale a rappelé, dans une vidéo diffusée en plénière, la question des zones tendues et celle de l’augmentation des loyers, qui amènent une partie de la population à s’éloigner des centres urbains, la rendant plus sensible à l’augmentation des prix du carburant.
Aujourd’hui, il serait pertinent d’inclure le coût des transports quotidiens dans le coût du loyer. La question du pouvoir des maires a été soulevée, car les maires semblent ne pas considérer être le bon échelon pour octroyer les permis d’urbanisme. Pourtant, étant les plus proches du terrain, ce sont eux qui en ont la meilleure connaissance.
Parmi les outils à développer, un système permettant de connecter les infos entre PLU, PLH et autres documents d’urbanisme serait utile pour permettre aux collectivités de connaître précisément les prix de l’immobilier et d’agir sur le foncier.
Des outils fiscaux sont aussi pertinents, et l’on pourrait s’inspirer du dispositif Pinel en le révisant pour intégrer davantage les familles et proposer des logements plus grands.
Différents freins existent également comme, par exemple, le système des plus-values foncières qui ne sont exonérées qu’après trente ans de conservation du bien incitant à la rétention du foncier. Parmi les solutions à envisager, Jean-Luc Lagleize a évoqué la mise à disposition du foncier en locatif, la surélévation d’immeubles dans les centres urbains, l’accession sociale à la propriété ... Les maires doivent saisir tous les outils qui existent dans le code de l’urbanisme pour disposer d'un foncier abordable et pour mettre en place de véritables politiques foncières.
Table ronde: vers une "transition foncière"
La table ronde "vers une "transition foncière", de la planification à l’action", animée par David Bérard de Happening Sud a réuni Laurence Rouède, conseillère régionale de Nouvelle Aquitaine, présidente de l’EPF Nouvelle Aquitaine, Patrice Duny, directeur de l’agence d’urbanisme de Caen Métropole, Emmanuel Hyest, président de la FN SAFER, Hélène Bouveau, directrice générale de la SAEML NordSEM, Olivier Sassi, directeur général de l’EPA Plaine du Var et Hélène Geoffroy, vice-présidente de Lyon Métropole et maire de Vaulx-en-Velin.
Des échanges au cours de cette table ronde, il ressort plusieurs messages :
- L’importance du schéma régional d'aménagement, de développement durable et d'égalité des territoires (SRADDET) dans les outils de planification et la nécessité d’anticiper le foncier dès l’amont des projets,
- La limitation de l’étalement urbain en privilégiant la revitalisation et la réoccupation du bâti ancien dans les centre-bourgs,
- Certains paradoxes qui continuent de favoriser l’expansionnisme : d’un côté, des lois amènent à réduire la consommation d’espaces, de l’autre des dispositifs fiscaux poussent les communes à se développer, à avoir plus de voirie, plus de constructions,
- Intégrer les enjeux des territoires agricoles : enjeux liés à l’eau, à l’autonomie alimentaire, au captage du carbone,
- Renforcer tout ce qui peut réduire la charge foncière,
- Améliorer la transparence des processus de vente, qui mobilise différents acteurs,
- Faire de la stratégie foncière le socle des autres politiques publiques, et notamment celles du logement en lien avec les politiques d’aménagement.
Des ateliers sur les leviers de la transition foncière
L’après-midi a été consacré à des ateliers sur les outils de la transition foncière afin d’identifier collectivement, avec les acteurs publics du foncier, la tonalité générale sur les dispositifs, un point fort et un point faible. Les restitutions complètes seront diffusées prochainement.
Atelier 1 - Nouveaux dispositifs issus de la loi Elan (opération de revitalisation de territoire ORT, projet partenarial d’aménagement PPA/GOU) : quel intérêt de ces nouveaux outils pour accélérer les projets et maîtriser les coûts d’aménagement ?
Avec les changements opérés par la Loi ELAN, ces outils sont en émergence dans leur utilisation avec des finalités multiples dans leur déploiement dans les territoires.
Au cours de cet atelier, les intervenants ont échangé sur leurs retours d'expériences en matière de PPA, d'ORT, sur l'intérêt de ces outils pour leurs stratégies d'aménagement.
Atelier 2 - Offices fonciers, Organismes Fonciers Solidaires (OFS) /Bail réel Solidaire (BRS) : comment contribuent-ils à la maîtrise des coûts ?
Ces dispositifs qui permettent de produire du logement abordable et de manière pérenne et répondent à la problématique des zones tendues sont entrés en vigueur en 2017 à la suite de la loi ALUR.
Ils rencontrent un intérêt de la part des acteurs publics du logement. Les intervenants de cet atelier ont manifesté leur intérêt, et celui des accédants, pour cet outil et son objectif anti-spéculatif, qui cependant ne doit pas être utilisé pour répondre à toutes les problématiques et situations territoriales.
Le Cerema a publié récemment une fiche pratique sur les OFS et BRS.
Atelier 3 - Renaturation, désartificialisation : un levier indispensable pour atteindre l’objectif "zéro artificialisation nette" ?
En matière de zéro artificialisation, les opérations de renaturation et de désimperméabilisation sont au premier plan au moins au même titre que la limitation de l’artificialisation même si des projets significatifs existent et qu’il existe un potentiel de projet : site artificialisé redonné à la biodiversité ou à la nature en ville, de manière pérenne ou temporaire sur des sites en attente d'aménagement.
Se pose la question de leur connexion aux enjeux de limitation de l’artificialisation pour renforcer leur mise en œuvre et les moyens financiers consacrés.
Une journée technique a été consacrée récemment à la question de la renaturation des sols.
Atelier 4 - Requalification des friches en milieu urbain : comment parvenir à équilibrer les opérations ?
Les intervenants et participants de cet atelier ont pointé la nécessité d’anticiper les risques en développant des outils d’observation des friches, le besoin de traiter les enjeux financiers de la requalification des friches dans une logique d’équilibre des opérations.
La situation des friches en secteurs tendus ou détendus conditionnent l’équilibre des opérations, lesquelles sont toujours déficitaires dans le dernier cas.
Les risques sanitaires et environnementaux seront d’autant mieux traités qu’ils seront identifiés dans le cadre de la cessation d’activité par l’exploitant.
Les préoccupations sanitaires, environnementales, ainsi que les aléas et les risques doivent tenir compte de la situation des friches en secteurs tendus ou détendus, alors que dans ces derniers les opérations sont toujours déficitaires.
Atelier 5 - Ouverture des données DVF : quel impact sur la connaissance des marchés fonciers, quelles perspectives ?
Les données DVF sont ouvertes au public depuis avril 2019. Cependant, face à la multitude de données foncières et immobilières mises à disposition du public et issues des données DVF, il est important de rester vigilant sur la qualité de certaines données dérivées mises en ligne, et l’interprétation que l’on peut en faire.
Ces données peuvent aussi être mises en cohérence avec d'autres bases de données publiques, s'articuler avec d'autres données issues des professionnels.
Clôture des rencontres par Jean-Baptiste Butlen, sous-directeur à l’aménagement durable
L’artificialisation des sols représente un enjeu majeur. Elle est liée à trois facteurs principaux :
- L’imperméabilisation des sols
- L’étalement urbain
- Le changement d’usage des sols, avec chaque année une baisse des surfaces agricoles.
Par ailleurs, l’artificialisation des sols n’est pas forcément corrélée à la démographie. Cependant, nous manquons de données fiables pour suivre l’évolution de l’artificialisation. C’est pourquoi un groupe de travail se penche actuellement sur les outils à développer.
Certaines recommandations sont à faire :
- Ce phénomène d’artificialisation peut entraîner une augmentation de la pollution de l’eau, ce qui est à prendre en compte.
- On observe un empilement des dispositifs, qu’il faut simplifier. Il faut aussi rendre plus cohérents entre eux les différents documents d’urbanisme.