Des sols menacés mais pourtant vitaux : un Essentiel du Cerema pour agir dans les territoires
Une des deux co-autrices, Manon Martin, directrice de projets Sols et Aménagement au Cerema, est revenue sur les enjeux en matière de gestion des sols et les actions que les collectivités peuvent mettre en œuvre dans une interview en 3 questions.
Le Cerema publie un nouvel Essentiel sur l'importance des sols et de la prise en compte de leurs fonctions dans les documents de planification et l'aménagement. "Des sols menacés mais pourtant vitaux" présente une approche qui prend en compte les fonctions écologiques des sols et les éléments de connaissance utiles pour agir dans le cadre de l'aménagement du territoire. Dans une interview en 3 questions, Manon Martin, directrice de projets Sols et Aménagement au Cerema et co-autrice du document, présente la démarche.
Pourquoi est-il important de prendre en compte les types de sols dans les pratiques d'aménagement ?
Il existe une grande diversité de sols qui se distinguent par des caractéristiques variées. Par exemple, ils peuvent être à dominance sableuse ou argileuse, compacts ou aérés, riches en matière organique, engorgés temporairement ou de manière permanente, etc. Ces caractéristiques intrinsèques ou naturelles permettent au sol d’assurer des fonctions écologiques comme le stockage du carbone, l’infiltration et le stockage des eaux pluviales mais aussi leur dépollution, la production de biomasse, des habitats pour la biodiversité. Ces fonctions s’expriment différemment selon le type de sols.
La prise en compte de la qualité des sols est nécessaire dans les pratiques d’aménagement puisqu’elle permet d’évaluer la capacité des sols à assurer leurs fonctions écologiques pour répondre aux mieux aux enjeux spécifiques des territoires. Ces fonctions écologiques des sols peuvent être fortement dégradées par les pressions exercées par l’homme comme l’artificialisation, la pollution, l’érosion etc.
Leur préservation puis leur restauration est nécessaire puisqu’ils rendent de nombreux services répondant aux enjeux sociétaux et environnementaux des territoires comme l’adaptation au changement climatique, la lutte de l’érosion de la biodiversité et l’amélioration du cadre de vie.
Est-ce qu'on observe une évolution dans les pratiques d'aménagement? De quoi ont besoin les collectivités?
La prise de conscience des collectivités concernant l’importance de mieux intégrer la qualité des sols dans la planification du territoire et l’aménagement opérationnel s’opère peu à peu. Elle est appuyée par de récents cadrages juridiques comme la loi Climat et Résilience de 2021 et par la Stratégie Nationale Biodiversité 2030.
Certaines collectivités utilisent leurs connaissances des sols pour objectiver des choix d’aménagement à différentes échelles, de la planification jusqu’au projet, en intégrant par exemple des indicateurs dans leurs documents d’urbanisme comme l’indice de multifonctionnalité des sols ou le coefficient de pleine terre, ou en réalisant des sondages pédologiques. Cette approche est loin de faire l’unanimité puisque la majorité des collectivités utilisent des indicateurs surfaciques comme l’occupation des sols, ce qui n’est pas suffisant pour caractériser la qualité d’un sol. De même, rares sont les études d’impacts ou évaluation environnementale intégrant le compartiment sols dans leur diagnostic pourtant demandé au même titre que l’eau ou la biodiversité.
Quels travaux le Cerema mène-t-il actuellement autour des sols urbains?
Le Cerema accompagne les collectivités dans leur démarche de désimperméabilisation, de renaturation et dans la mise en œuvre de leur stratégie "Zéro artificialisation nette" en intégrant une approche de gestion durable des sols. Cet accompagnement peut prendre différentes formes : l’aide à la rédaction de cahier des charges, sensibilisation, formations, plan d’action, diagnostics du territoire...
Le Cerema accompagne par exemple, avec le bureau d’étude Sol Paysage, la commune de Ris-Orangis lauréate de l’AMI ZAN de l'Ademe dans la définition de leur stratégie ZAN en utilisant une approche croisée entre des méthodes cartographiques et des investigations de terrain pour diagnostiquer leur territoire et identifier les espaces à préserver, des espaces aux potentiels de renaturation et de densification à intégrer dans leurs documents d’urbanisme.
Le Cerema et ses partenaires travaillent sur le développement de méthodes opérationnelles permettant de fournir des porter à connaissance pour mieux intégrer les sols dans l’aménagement. Par exemple, la méthode MUSE permet d’intégrer la multifonctionnalité des sols dans les documents d’urbanisme à l’échelle du SCoT. Cette méthode a été déployée sur quelques territoires et des réflexions concernant la faisabilité de la déployer à l’échelle nationale sont en cours dans le cadre du projet cartoMUSE – cartographie de la multifonctionnalité des sols sols avec les données IGCS.