11 septembre 2024
Panneau de signalisation de la zone 30 à Bruxelles
Bruxelles © Bruxelles Mobilité
Ces dernières années, de nombreuses villes en Europe et même certains pays, ont adopté la limitation à 30 km/h en milieu urbain. Cette mesure, motivée principalement par des enjeux de sécurité routière, vise à réduire les risques et la gravité des accidents, notamment dans les zones à forte densité de piétons et de cyclistes. Elle répond également à la volonté des décideurs de favoriser une mobilité plus durable (marche, usage du vélo et des transports en commun) et un cadre de vie plus agréable pour les habitants.

Cet article du Cerema propose de faire le point sur les stratégies menées en Europe afin d'améliorer la sécurité routière par la réduction des vitesses.

 

Échanges institutionnels européens 

En février 2020, ministres et chefs de délégation, ainsi que représentants d'organisations gouvernementales et non gouvernementales internationales, régionales et sous-régionales, et du secteur privé, se sont réunis à Stockholm, en Suède, pour la troisième conférence ministérielle mondiale sur la sécurité routière. Ils ont signé la "Déclaration de Stockholm". Ils ont débattu sur de nouvelles mesures visant à réduire de moitié le nombre de morts et de blessés d’ici à 2030, conformément aux objectifs mondiaux convenus dans le cadre des objectifs de développement durable (ODD) des Nations Unies.

Dans cette déclaration, ils ont décidé différentes mesures dont la mesure 11 qui met l'accent sur la gestion de la vitesse, notamment en renforçant l'application de la loi pour prévenir les excès de vitesse et imposer une vitesse maximale de 30 km/h dans les zones où les usagers de la route et les usagers vulnérables se mélangent de manière fréquente et planifiée, sauf lorsqu'il existe des preuves solides que des vitesses plus élevées sont sûres.

En août 2020, l’Assemblée générale des Nations Unies a adopté le principe du 30 km/h généralisé. Elle fait sienne la Déclaration de Stockholm. Les Nations Unies ont donc approuvé la fixation de limites de vitesse maximales de 30 km/h (20 mph) partout où des piétons, des cyclistes ou d’autres usagers vulnérables de la route se mêlent à des véhicules à moteur.

Dans son rapport de proposition de résolution d’octobre 2021, le parlement Européen “engage la Commission à formuler une recommandation pour l’application de limitations de vitesse garantissant la sécurité conformément à l’approche pour un "système sûr" sur tous les types de routes, telles que la limitation établie par défaut à 30 km/h dans les zones résidentielles et les zones où le nombre de cyclistes et de piétons est élevé, prévoyant en outre la possibilité de revoir à la hausse les limitations de vitesse pour les grandes artères couplée à une protection appropriée des usagers de la route vulnérables”. 
(Extrait du RAPPORT sur le cadre politique de l’UE en matière de sécurité routière pour la décennie d’action 2021-2030 – Recommandations pour les prochaines étapes de la campagne "Vision Zéro")

En juin 2024, le Conseil de l’Union Européenne a émis des conclusions sur le rapport spécial d’avril 2024 de la Cour des comptes européenne concernant les efforts consentis par l'UE pour atteindre ses objectifs en matière de sécurité routière. Le conseil « renvoie à la déclaration de Stockholm notamment à la résolution nº 11 (voir ci-dessus) ; indique que l'espace public est par définition limité et que les vitesses doivent donc être ajustées, ainsi qu'il convient, de manière à en garantir une utilisation partagée en toute sécurité; se félicite des mesures qui ont été prises à cet égard dans l'ensemble de l'UE. »

En juillet 2024, un groupe européen d’experts de la Commission sur la mobilité urbaine (EGUM) propose, dans un rapport, six recommandations à la Commission européenne pour la stratégie européenne de sécurité routière. La première conseille à la Commission d’« émettre une recommandation formelle aux gouvernements nationaux, régionaux et locaux de mettre en œuvre une limitation de vitesse à 30 km/h dans les zones urbaines. » 
 

Pays et grandes villes d’Europe à 30 km/h

On considère ici des villes qui ont plus de 70 % de la voirie avec une limitation de vitesse à 30 km/h ou moins (zone de rencontre, aire piétonne, voie verte ou autre dénomination selon les pays) et quelques axes structurants qui restent à 50 km/h, voire plus rarement à 70 km/h. On a rarement toutes les voiries à 30 km/h ou moins.

Cette approche s’accompagne généralement d’une série de mesures visant à promouvoir et sécuriser les modes actifs et les transports publics
La décision du passage à 30 peut se faire au niveau du pays ou au niveau des villes :

 

Mesures de généralisation du 30 km/h prises au niveau national (en Europe, analyse non exhaustive)

Les Pays Bas ont généralisé le 30 km/h à 70 % de leur voirie urbaine au début des années 2000.

Depuis mai 2021, l’Espagne a inversé la règle de limitation de vitesse en agglomération en généralisant la vitesse maximale à 30 km/h en ville pour les rues qui comportent une voie par sens. 
La ville de Bilbao avait dès 2020 généralisé le 30 km/h dans toutes ses rues sauf exception, devenant la première ville européenne de plus de 300 000 habitants à avoir instauré cette mesure.

En septembre 2023, le Pays de Galles, au Royaume-Uni (RU), a adopté une limitation de vitesse par défaut en ville de 20 mph (soit 32 km/h).

 

Mesures de généralisation du 30 km/h prises au niveau local (villes européennes, hors France, analyse non exhaustive)

La première grande ville européenne à introduire ce type de mesure est Graz, en Autriche, en 1992. Elle a introduit une limitation de vitesse généralisée de 30 km/h dans tous les quartiers de la ville sauf exception pour les axes prioritaires (20 % du réseau).

 

Graz - © Rue de l’Avenir

 

  • A Munich, en Allemagne, la limitation de vitesse à 30 km/h a été introduite en 2011 sur 80 % des voiries urbaines, et à Münster en juillet 2021. 
  • En 2012 et 2013, Zurich, en Suisse, a mis en place des zones limitées à 30 km/h et depuis, la ville continue de généraliser progressivement le 30 km/h. Elle a déjà mis en place cette limitation de vitesse à 30 km/h sur 400 km de ses routes, pour un total de 750 km.

Depuis de nombreux pays ou villes en Europe ont instauré ces dernières années des limites de vitesse de 30 km/h en milieu urbain.

  • Helsinki en Finlande a limité la vitesse à 30 km/h sur 2/3 du réseau routier en mai 2019. 
  • En janvier 2021, Bruxelles, en Belgique, a mis en place une limitation de vitesse à 30 km/h maximum dans toute la ville sauf exception. Dans le cadre de cette mesure, la vitesse maximale a été fixée à 30 km/h sur toutes les routes de la région de Bruxelles-Capitale, à l'exception des grandes artères où la limite de vitesse reste à 50 ou 70 km/h.
  • En septembre 2021, 75 % des rues de Vienne en Autriche, ont eu leur vitesse maximale à 30 km/h. 
  • En Italie, la ville de Bologne a abaissé la limite de vitesse en ville à 30 km/h depuis juillet 2023. 
  • À partir du 8 décembre 2023, Amsterdam, aux Pays-Bas, a réduit la limitation de vitesse à 30 km/h sur la plupart de ses rues (80 % des rues d'Amsterdam).
  • A Berlin, en Allemagne, 80% des voiries sont à 30 km/h maximum, plus des axes principaux restés à 50 km/h ou plus en journée sont au 30 km/h nocturne.
Berlin - © Rue de l'Avenir

En étant bien loin d’être exhaustif, ces exemples montrent que la majorité des pays de l’Europe occidentale sont concernés par ce phénomène.

Au-delà de l’Europe, le Mexique et le Pérou passent aussi au 30 km/h en milieu urbain ; par exemple au Pérou des nouvelles limitations de vitesse en milieu urbain sont appliquées depuis mi-juillet 2022 : 30 km/h (auparavant 40 km/h) dans les rues urbaines à l’exception des voiries à voies multiples qui sont à 50 km/h (avant 60 km/h).

 

En France, depuis quinze ans, la ville 30 se développe, les précurseurs étant Lorient (2009) puis Grenoble (2016). La loi Notre en 2015 a donné une assise légale pour l’autorité de police de choisir une vitesse limite différente du 50 km/h sur "tout ou partie" de sa voirie. 

Depuis 2019, le phénomène s’accélère en France avec aujourd’hui plus d'une trentaine de villes préfectures en "ville 30", et plus de 300 villes de tailles variées sur tout le territoire.

Sécurité 

Les résultats indiquent une amélioration de la sécurité routière, avec en moyenne :

  • Réduction de 23 % des accidents
  • Baisse de 37 % des décès
  • Diminution de 38 % des blessés 
Environnement 

L'impact environnemental est également à relever avec en moyenne :

  • Diminution de 18 % des émissions
  • Réduction de 2,5 dB des niveaux sonores
  • Baisse de 7 % de la consommation de carburant

Le réseau Rues

Le réseau RUES est un réseau d'échanges francophone entre experts en mobilité urbaine composé de membres belges, français (dont le Cerema), luxembourgeois, québécois, suisses et italiens. 
Les rencontres annuelles permettent de partager, entre pays francophones membres, les bonnes pratiques en matière d’aménagement, de réglementation, de gouvernance, d’actions de communication et de sensibilisation, visant à produire des espaces publics plus conviviaux et plus sûrs mais également de présenter leurs activités phares et publications de chaque année sur ces sujets.  

Ces différents échanges permettent à chaque délégation de revenir avec des éléments d'évaluations sur des sujets communs. La récurrence annuelle de cette rencontre aide à rester à jour sur les actualités internationales et à anticiper les tendances.

Pour plus d’information sur le réseau RUES, voir la page dédiée sur le site Rue de l’Avenir - Suisse