« Nous avons mené une expérimentation, en 2021, sur la renaturation d’un délaissé routier avec le Cerema. Cet accompagnement nous a aidé à structurer une nouvelle politique technique, qui revisite notre manière d’intervenir sur le réseau routier. En effet, travailler à la déconstruction d’une route départementale était une nouvelle approche opérationnelle. Nous avions ainsi besoin d’un appui méthodologique et d'ingénierie, de toute l’expertise du Cerema, qui nous a donné une vision sur la biodiversité et les fonctionnalités du milieu environnant. » considère Aurélie Metrard, chargée d’études au service entretien sécurité routière au Département de Loire-Atlantique, qui a mené le projet sur un délaissé routier sur 1,4 ha avec une action de désimperméabilisation et de renaturation globale du site, sur la commune de Rougé au nord du département.
Le Cerema qui avait un accord-cadre avec la collectivité depuis 2019, est intervenu en tant assistant à maître d’ouvrage sur ce délaissé issu d’une rectification de virage (travaux pour rétablir un tracé plus rectiligne de la route et augmenter la sécurité routière). Les espaces de part et d’autre de la route, qui étaient constitués d’aires de pique-nique et de trois zones de parkings, ont été reconsidérés afin d’y favoriser la biodiversité.
Une solution ambitieuse en termes de biodiversité
« Nous avons été sollicités par le conseil départemental pour apporter des réponses en termes de gestion de ces espaces, de leur renaturation, mais aussi pour limiter au maximum leur entretien et donc les coûts de fonctionnement. Les études ont montré qu’une partie de la route étaient très polluée avec des hydrocarbures aromatiques polycycliques (HAP). L’ensemble de ces éléments ont été déposés dans une décharge spécifique car les matériaux n'étaient pas recyclables. Nous avons aussi réalisé une analyse environnementale du site et des alentours, ainsi qu’une étude naturaliste, qui a révélé l’absence d’espèces patrimoniales. Après une analyse technique de la chaussée, nous avons proposé au département différents scénarios. Pour cette opération pilote, la collectivité a choisi la solution la plus ambitieuse en termes de biodiversité et de dépollution. » détaille Éric Le Mitouard, chargé de cette opération au sein de la Direction territoriale Ouest du Cerema.
Outre la déconstruction de la majeure partie de la chaussée, ce projet a nécessité de prendre en compte deux accès à des surfaces agricoles qui ont été aménagées en petits cailloux. Des peupliers ainsi que des résineux en fin de vie, ont dû être abattus et leur branchages ont été maintenus pour constituer des tas, intéressants pour les insectes. Côté végétation, une trentaine d’espèces locales ont été plantées. « Même si pour accélérer le processus de végétalisation, un peu de terre a été appliquée, l'idée était de favoriser une renaturation passive. » précise Christophe Pineau, chef du groupe ingénierie écologique au Cerema. Pour une meilleure gestion de l’eau, une mare a été créée.
Co-production d’un guide technique
Sur ce délaissé même si tous les espaces n’ont pu être renaturés, en particulier les chemins d’accès aux champs, tous ont pu être désimperméabilisés. Le budget total de ce projet est de 140 000€. Et dans ce département une vingtaine de délaissés ont ainsi été réalisés depuis cette opération pilote. En Gironde et dans les Bouches-du-Rhône des projets de ce type sont à l’étude. Mais en Loire-Atlantique, la particularité de ce travail de renaturation des délaissés routiers rentre dans une politique en faveur du Zéro artificialisation nette. Ces espaces offrent la possibilité de compenser et font ainsi partie du décompte du ZAN des surfaces désimperméabilisées, désartificialisées et renaturées.
Ce projet ambitieux a été récompensé lors du congrès de l'IDRRIM les 26 et 27 mars à Montpellier. Il s’est vu mettre le prix Infrastructures pour la mobilité, Biodiversité et Paysage. Le Cerema a co-produit un guide technique sur ce sujet avec le département de Loire-Atlantique, fruit de cette collaboration sur les délaissés routiers.