Dans les territoires ruraux, les villes petites et moyennes ou dans les périphéries des grandes agglomérations, les habitants ont peu accès aux transports publics et la voiture individuelle reste le principal mode de déplacement. Pour les ménages les plus fragiles, cette situation se traduit par une grande précarité d’accès aux services publics, à l’emploi et aux commerces.
La Loi d’Orientation sur les Mobilités (LOM) votée le 20 novembre 2019 par l’Assemblée nationale, tient compte de ces enjeux et en a fait un axe fort de ses apports. Des solutions existent et se développent pour améliorer la mobilité du quotidien dans ces territoires : lignes régulières de covoiturage, auto-stop organisé, transport solidaire, autopartage entre particuliers ou encore plateformes de mobilité. Mais elles sont souvent mal connues et peinent à se développer, faute de financements et de moyens en ingénierie.
Plus de 120 personnes étaient rassemblées pour échanger sur les enjeux de mobilité en territoires peu denses, partager des retours d'expérience et découvrir des solutions de mobilité innovantes. Cette journée a été organisée par la cellule régionale France Mobilités (Cerema, DREAL, ADEME, Banque des Territoires), en partenariat avec la région Hauts-de-France, et la ville de Fourmies.
Le maire de Fourmies, Mickaël Hiraux a accueilli les participants et a émis le souhait que toutes les parties -rurales comme urbaines- du territoire français soient traitées équitablement, notamment en matière de desserte ferroviaire.
Alexander Grimaud, sous-préfet de l’arrondissement d’Avesnes-sur-Helpe, a fait l’ouverture de la journée en rappelant que 21 % des ménages ne disposent pas de voiture particulière dans l’arrondissement d’Avesnes et restent donc fortement dépendants de solutions de transports publics.
Introduction: Retour sur la démarche France mobilités et la Loi d’orientation des mobilités (LOM)
Frédéric Marchand, sénateur du Nord a poursuivi cette phase introductive en mettant en avant l’intérêt du dispositif France Mobilités qui vise à favoriser l’innovation dans les mobilités, pour tous et dans tous les territoires. Frédéric Marchand a cité Jacques Brel : "Un homme est fait pour être mobile. Tout le malheur vient de l’immobilité".
Ainsi, avec le vote de la LOM, les deux Assemblées n’ont pas fait preuve d’immobilité. La LOM a pour but d’atteindre des objectifs dont la garantie du droit à la mobilité et s’est fixée un cap autour de 4 priorités :
- Réduire les inégalités territoriales, améliorer l’accessibilité des territoires enclavés
- Concentrer les efforts sur les déplacements du quotidien
- Favoriser la transition énergétique, accélérer le report modal
- Encourager le report modal dans le transport de marchandises.
David Caubel, pilote France mobilités (DGITM), a donné les grandes lignes de la démarche en précisant que le plan d’actions France mobilités prévoit 6 dispositifs phares :
- Une plateforme collaborative effective depuis janvier 2019 (700 contributeurs) ;
- Un guichet unique notamment pour les expérimentations (une interlocutrice « France mobilités » : Julie Gozlan à la DGITM) ;
- Un soutien en ingénierie pour les territoires peu denses grâce aux cellules régionales d’appui avec 4 acteurs (CEREMA, ADEME, Banque des territoires, DREAL)
- La création d’une culture d’innovation en mobilité (cycle de formation, master class…) ;
- Une appropriation de l’achat innovant (open data…) ;
- Une orientation des financements : cartographie des dispositifs existants et recensement des différents types de financement (européens, nationaux et régionaux) et leur mode d’emploi.
Table-ronde : présentation de la cellule d’appui France mobilités en Hauts-de-France
Cette table ronde a permis de lancer la cellule régionale France mobilités composée de ses 4 partenaires : le CEREMA, la Banque des Territoires, l’ADEME et de la DREAL. Cette cellule a pour objectif d’organiser une synergie entre les dispositifs de différents partenaires, d’assurer leur lisibilité et leur complémentarité au bénéfice des territoires avec 3 missions principales : animer l’écosystème régional de la mobilité, aider les projets des collectivités locales, centraliser les ressources documentaires régionales sur les questions de mobilité.
Lors de cette table ronde animée par Nathalie Pitaval (Cerema Hauts-de-France),
- Stéphane Coudert, directeur du Cerema Hauts-de-France a notamment évoqué l’accompagnement technique du Cerema auprès des territoires et son animation territoriale dans le cadre de cette cellule (organisation de la journée à Fourmies, différentes expertises dans le domaine de la mobilité à travers des prismes divers : sociologiques, géographiques, techniques…),
- Laurent Tapadinhas, directeur de la DREAL Hauts-de-France a présenté le dispositif « Fonds de mobilité active » et a notamment mentionné la mission de capitalisation de la connaissance via l’Observatoire régional des transports (ORT),
- Eric Guilpart, Directeur de projets à la Banque des Territoires Hauts-de-France a présenté l’accompagnement financier proposé aux territoires et aux porteurs de projet (ingénierie, investissement, prêts...). Il a notamment fait un focus sur Mobiprêt, nouveau système de financement qui a vu le jour suite au déploiement de la démarche France mobilités.
- Bruno Frimat, Directeur régional adjoint de l’ADEME Hauts-de-France a présenté l’accompagnement des territoires dans le cadre d’appels à projets notamment l’AMI TENMOD (6 projets en Hauts-de-France) et a lancé les premiers éléments de réflexion sur le renforcement du lien entre planification et mobilités ; assurer la mobilité des personnes ne pouvant se limiter aux seules solutions innovantes.
Présentations de solutions de mobilité d’acteurs privés
Lors de cette table ronde animée par Mathieu Chassignet (ADEME Hauts-de-France),
- Christophe BOUCREUX (Entreprise lilloise Flexineo) a présenté Cmabulle, plateforme qui permet d’organiser le partage de conduites scolaires et extra-scolaires pour les parents
- Adrien LANCELOT (Entreprise Clem) a montré quelle offre d’autopartage de véhicules électriques Clem peut proposer.
- Quentin VALCKE, coordinateur du programme I-VIATIC de l’Association I-Trans, a fait une présentation de l’offre de services aux collectivités via le Programme I Viatic. Les actions d’I-Trans sont complémentaires avec l’action de la cellule régionale d’appui France mobilités. Quentin Valcke a, par ailleurs été associé à la préparation de la journée à Fourmies.
Retours d’expériences de territoires engagés en faveur de la mobilité rurale durable
Lors de cette table ronde animée par Aurélien Balmer (DREAL Hauts-de-France),
- Xavier DESCOUTURES (CC2SO) et Agnès DESCAMPS (ADUGA) ont partagé l’expérience de la Communauté de Communes Somme Sud-Ouest (119 communes, 39 000 habitants) qui vient de voter le 12 novembre son Plan de mobilité rurale (PMRu). Ce dernier comprend de nombreuses actions et permet également de porter à la connaissance des habitants les solutions de mobilité existantes sur ce vaste territoire. Un film qui promeut le PMRu a été projeté lors de la journée et peut être visionné ici.
- Mickaël HIRAUX, maire de Fourmies et Kathy DAVID (Transdev) ont relaté l’expérience de Fourmies, qui a testé des solutions de mobilité sur son territoire au moyen d’une plateforme de mobilité afin de favoriser la mobilité inclusive et l’emploi. La mairie s’est appuyée sur la dynamique Rev 3 pour porter ses projets dans le domaine de la mobilité et dans d’autres domaines (quartier sur une ancienne friche, centre de formation sur les imprimantes 3D…).
- Christophe LEGROUX, Parc Naturel régional de l’Avesnois a fait part de la volonté du Parc naturel régional de l’Avesnois de poursuivre ses actions dans le déploiement de projets de mobilité. Il a montré dans quelle mesure la responsabilisation des citoyens est essentielle dans la réussite des projets, par exemple comme celui d’équiper les voitures de boîtiers pour promouvoir une éco-conduite, permettant d’économiser du carburant.
Rencontres et présentations de solutions de mobilité innovantes par leurs prestataires
Le temps du déjeuner a été l’occasion de se faire rencontrer les différentes personnes autour d’un buffet et aussi autour d’un Market place, forum dédié aux entreprises et associations qui ont pu présenter leurs solutions de mobilité, au théâtre de Fourmies. Co-organisé avec la CCI Grand Lille, cet événement a permis de nombreux échanges et mises en relations entre acteurs privés et publics. La liste des exposants est disponible sur cette page régionale France mobilités.
Témoignages d’élus et techniciens : quel lien entre planification et mobilités ? Quelle implication des habitants dans les projets de mobilités ?
Cette dernière table-ronde, animée par Jérôme GRANGE, directeur de l’ADUGA, fut séquencée en deux temps de débats autour de témoignages d’élus ou de leurs techniciens sur des questions de liens entre planification et mobilités, et de concertation avec la population et d’adhésion aux projets de mobilités en zones peu denses.
Ainsi, Christian LEROY, président de la Communauté de Communes du Pays de Lumbres a présenté leur démarche dans le cadre de l’élaboration du Plan local d’urbanisme intercommunal (PLUi) pour illustrer le lien entre planification et mobilités. Les questions de mobilité sont en particulier traduites dans le PLUi : une orientation d’aménagement et de programmation (OAP) sur les mobilités douces a été conçue. Des expérimentations ont été réalisées : mise en place de bornes de recharge électrique, flotte de véhicules électriques et de vélos, autopartage de véhicules électriques, offre touristique de location de VTT...
Sur la question de l’adhésion des citoyens au PLUi, Christian LEROY se fait le témoin d’une forte participation des habitants et d’une démarche de concertation très poussée menée par la Communauté de Communes (mise en place d’un comité des usagers, d'un comité technique, d'un comité des élus…). Pour assurer la réussite de la concertation, elle fut menée avec les habitants tout au long de la procédure.
Magalie Boyez-Fourmestraux (Communauté de Communes Pévèle-Carembault) a présenté le projet qui vise à développer une offre de lignes de covoiturage entre les territoires de la Communauté de Communes Pévèle Carembault (territoire aux portes de la Mel qui présente certaines caractéristiques propres aux zones peu denses) et de la Métropole Européenne de Lille. L’objectif est de proposer un parcours intégré à l’usager grâce à une présentation unique des offres existantes. Ce projet répond à un besoin de mise en cohérence des outils et des efforts d’animation des deux territoires dans le but d’amplifier leurs effets en ciblant les parcours usagers correspondant aux principaux flux. Pour faire adhérer les citoyens au projet Pev Mel et le faire connaître, diverses animations ont été réalisées (speed datings, interventions dans les entreprises, via les bulletins municipaux, dans les écoles par des spots et banderoles,..).
Pierre Van Neer (Pays PETR Ternois 7 Vallées) a présenté le territoire couvert par le Pôle d’équilibre territorial et rural, peu dense (avec une densité de 60 hab/km²) et qui compte 16 % des habitants ne se déplaçant pas. Pierre Van Neer a développé le « concept de motilité » : développement de la capacité des différentes catégories de population à se déplacer.
Dans le cadre de l’élaboration du PCAET, le PETR a identifié 4 domaines d’expérimentation :
- Communication sur les services existants (édition d’un flyer recensant ces solutions),
- Education et accompagnement à la mobilité (ateliers, programmes et événements adaptés à chaque public visé: scolaires, jeunes en filière technique...),
- Développement de nouveaux services de mobilité (promotion sur Ternoiscom de la plateforme régionale de covoiturage, Pass pass Covoiturage, en lien avec les grandes entreprises du territoire, déploiement du service d’autostop Rezo Pouce sur 7 Vallées com),
- Hubs ruraux (qui visent à concentrer spatialement les solutions de mobilités dans les bourgs centres et la mise en cohérence des horaires pour améliorer l’efficacité des transports en commun et favoriser la multimodalité).
Conclusion de la journée par Franck Dhersin, vice-président en charge des Transports et des infrastructures de transports, Région Hauts-de-France
Franck Dhersin, a clôturé cette journée en insistant sur le rôle de la Région comme chef de file de la mobilité et en particulier dans le domaine de l’intermodalité. La Loi d’orientation des mobilités va redistribuer la carte des autorités organisatrices de la mobilité (AOM). La Région devra proposer tous types de services et de solutions dans les territoires où aucune collectivité n’aura pris la compétence d’AOM.
Par ailleurs, la LOM prévoit que des contrats opérationnels de mobilité (COM) soient conclus entre acteurs de la mobilité (départements, AOM…). La mise en place de la cellule d’appui France Mobilité marque le début d’échanges entre les partenaires privés et publics pour oeuvrer en faveur des mobilités dans les Hauts-de-France.
Capitaliser les connaissances : mission de la cellule régionale d'appui
Retrouvez les présentations des intervenants ainsi que des vidéos des personnes interviewées le 26 novembre à Fourmies ci-dessous.
Le programme de la journée ainsi que la liste des exposants au forum "Market place" qui s'est tenu lors du déjeuner sont aussi disponibles.