La taille effective de maille est en effet l’une des trois nouvelles mesures de la fragmentation introduites par Jochen Jaeger (2000)(1) et modifiée par Brigitte Moser (2007)(2). Elle caractérise la pénétration anthropique des paysages d’un point de vue géométrique et est calculée à partir de la taille des fragments naturels de paysage (ou "patch").
Cet indicateur reflète à la fois la surface des espaces naturels dans le territoire et leur degré de fragmentation. Son calcul repose sur la probabilité que deux points choisis au hasard – l’un sur le territoire étudié, l’autre sur le même territoire ou en dehors – soient connectés, c’est-à-dire qu’ils ne soient pas séparés par des obstacles anthropiques (routes, voies ferrées, aménagements urbains…). Autrement dit, il quantifie les possibilités de déplacement de la faune locale dans un paysage plus vaste.
Plus la taille effective de maille est importante moins le territoire est fragmenté.
Contexte et objet de l’étude
Le Cerema travaille depuis plusieurs années au développement du calcul de cet indicateur au niveau national, pour le compte du ministère de la Transition Ecologique et de la Cohésion des Territoires. En cohérence avec la Stratégie Nationale Biodiversité, afin d’appuyer les territoires porteurs de contrats de relance et de transition écologique (CRTE, devenus Contrats pour la Réussite de la Transition Ecologique) dans la réalisation de leur diagnostic initial, et notamment leur état des lieux écologique, le Commissariat Général au Développement Durable (CGDD) a proposé un socle de 13 indicateurs. La taille effective de maille a été retenue pour évaluer la fragmentation des espaces naturels.
Le Cerema a ainsi calculé cet indicateur en 2021 (millésime 2018) pour chaque CRTE (périmètres au 5 septembre 2021) de France métropolitaine et les résultats ont été publiés sur CeremaData. Etant donné la nature et la précision des couches géographiques disponibles et utilisées pour la définition des espaces naturels, l’indicateur ne pouvait alors pas rendre compte d’actions liées aux pratiques agricoles (bocage…) ou de restauration des continuités écologiques (passages à faune…), pourtant essentielles pour améliorer la connexion et la fonctionnalité des espaces naturels.
En 2022, la Direction générale de l’aménagement, du logement et de la nature (DGALN) a confié au Cerema une étude sur l’amélioration de la robustesse de l’indicateur. L’objectif étant de le rendre plus représentatif encore de la réalité du terrain, grâce à un apport de nouvelles données géographiques, de suivre plus finement et plus régulièrement les évolutions de la fragmentation des espaces naturels dans les territoires, et notamment mesurer les réponses apportées par les aménageurs. Ces résultats ont été publiés sur CeremaDoc.
Pour améliorer la robustesse de l’indicateur de fragmentation des espaces naturels
Pour répondre à la demande de la DGALN, le Cerema a proposé de tester sur le département du Gers, une méthode pour construire la couche d’espaces naturels et semi-naturels continus après fragmentation anthropique sur la base de nouvelles sources de données, étant entendu que la formule mathématique de l’indicateur, elle, ne change pas : taille effective de maille méthode "Cross-Boundary Connections (CBC)" (Moser, 2007). Le pluqin FragScape(3) a été utilisé pour calculer l’indicateur dans QGIS.
Les choix de bases de données et de la méthode de construction de la couche géographique des espaces naturels et semi-naturels continus après fragmentation anthropique ont été proposés et débattus en comité de pilotage de l’étude composés d’experts de la donnée et de la biodiversité, puis testés sur le département du Gers. L’occupation du sol à grande échelle (OCSGE) produite par l'IGN en collaboration avec le Cerema et l'INRAE (Institut national de recherche pour l'agriculture, l'alimentation et l'environnement) à la demande du ministère de la Transition Ecologique et de la Cohésion des Territoires, est la principale base de données proposée pour la création de la couche géographique des espaces naturels continus après fragmentation anthropique. Elle a été choisie pour :
son échelle d’utilisation (1 : 2500) de précision métrique et compatible avec le référentiel à grande échelle de l’IGN,
sa double nomenclature qui permet par croisement entre la couverture et l’usage du sol de sélectionner les espaces naturels et supprimer ceux strictement fragmentants,
le repérage des réseaux de transport routier et ferré principaux fragmentants constituant « l’Ossature nationale ».
L’OCSGE couvrira à terme la France entière. Elle est la principale source de données mais pas la seule, en effet le croisement entre couverture et usage du sol dans la nomenclature ne permet pas de juger du caractère naturel ou fragmentant des surfaces d’eau et de l’usage agricole du sol ; essentiellement les formations herbacées.
L’OCSGE est ainsi complétée par :