L'équipe de Recherche DIMA du service Chimie du laboratoire d'Aix-en-Provence développe une méthodologie analytique pour la détection et la quantification des HAP dans les agrégats d’enrobés par Chromatographie Liquide à Haute Performance (CLHP ou HPLC).
Problématique du recyclage des agrégats d'enrobés bitumineux
L’ensemble du réseau routier français (1 000 000 km) représente potentiellement un gisement de plusieurs milliards de tonnes d’agrégats d’enrobés issus du fraisage ou de la démolition d’enrobés bitumineux. Dans un contexte d’économie circulaire fort, ces agrégats d’enrobés, considérés comme des déchets routiers, recèlent un potentiel de propriétés techniques qu’il est important de valoriser tout en respectant des exigences technologiques, mécaniques, environnementale et de santé publique (protection des travailleurs).
Cependant, ces agrégats d’enrobés sont soumis à la réglementation sur la gestion des déchets et doivent faire l’objet de test préalable afin de savoir s’ils contiennent des substances dangereuses tels que le goudron. Ce goudron de houille, utilisé jadis en construction routière comme liant hydrocarbonné, contient de fortes teneurs en Hydrocarbures Aromatiques Polycycliques (HAP). Certains HAP sont classés officiellement par le Centre International de Recherche contre le Cancer (CIRC) comme cancérogènes avérés pour l’homme. C’est pourquoi, il est important de rechercher la présence de ces polluants contenus dans le déchet routier afin d’en déterminer la concentration et orienter au mieux le déchet vers des filières de stockage ou de valorisation adaptée (ré-emploi, recyclage..).
D'une méthode de détection globale des HAP sur chantier...
Afin de juger de la qualité “inerte” d’un déchet routier, permettant ainsi sa réutilisation dans de nouvelle formulation de matériau, il est possible de se référer à l’arrêté du 12 décembre 2014 relatif aux installations de stockage de déchets inertes (ISDI). Ce texte définit les conditions à respecter en fixant des valeurs limites d’acceptabilité en différents éléments polluants. Cette caractérisation environnementale vise à évaluer le potentiel polluant du déchet ainsi que son comportement à la lixiviation. Le seuil d’acceptabilité pour l’analyse en HAP est de 50 mg par Kg de déchet sec. Les HAP étudiés font parti de la liste de 16 HAP considérés par l’agence de la protection de l’environnement des Etat-Unis (US EPA) comme étant les plus toxiques.
Des méthodes de détection rapide du goudron (PAK Marker, tache au toluène...) utilisées sur le chantier permettent :
- de reconnaitre la présence ou non de HAP dans le déchet et adopter les mesures adéquates de prévention et de protection pour le travailleur (précautions d’exposition, EPI..)
- d'orienter le déchet vers différents scénarios possibles
... VERS une méthode analytique plus performante en laboratoire
Les méthodes de détection rapide sur chantier ont des seuils de détection trop élevés (100 mg/kg) et ne permettent pas de différencier les HAP présents.
L'équipe de recherche DIMA au sein du Service Chimie du laboratoire d'Aix-en-Provence s’est intéressée à développer une méthodologie analytique pour la détection et la quantification des HAP dans les agrégats d’enrobés par Chromatographie Liquide à Haute Performance (CLHP ou HPLC).
Un protocole expérimental adapté à ce déchet routier particulier a été mis au point. Il est constitué de deux phases :
- une phase minérale
- une phase organique
C’est dans la matrice organique constituée de liant hydrocarboné que sont potentiellement présents les HAP. La méthode utilisée permet de déterminer, dans un premier temps la concentration en HAP dans le liant hydrocarboné extrait des échantillons d’agrégats d’enrobés et d'exprimer dans un second temps la concentration finale en mg de HAP par kg d’agrégats d’enrobés à partir de la quantité de liant présent dans 1kg d’agrégat d’enrobés.
Comité Innovation Routes et Rues (CIRR)
Ce protocole est expérimenté dans le cadre d’un suivi d’innovation du Comité Innovation Routes et Rues (CIRR).
Les résultats de ces essais permettront d’établir un point de comparaison avec les méthodes de caractérisation des enrobés en usage.
Ce sujet fera prochainement l’objet d’un article dans le magazine Techni.Cités.