16 septembre 2019
Végétalisation en pied d'arbres à Paris
De plus en plus d’habitants et d’associations sont intéressés pour planter et entretenir des petites parties de l’espace public. Comment les collectivités peuvent-elles accompagner ou encadrer ces initiatives ? Comment favoriser l’implication des citoyens tout en s’assurant de la pérennité des aménagements ?

QUELS OUTILS POUR ACCOMPAGNER LES initiatives citoyennes ?

Des collectivités telles que Grenoble, Rennes, ou Paris, choisissent de donner de la place aux démarches ascendantes qui se développent hors des cadres institués à travers plusieurs types de dispositifs : budgets participatifs, animations, végétalisations des espaces urbains, démarches artistiques.

On assiste à une multiplication des initiatives portées par des citoyens et des associations de riverains. Cette implication des habitants et usagers dans la gestion des espaces publics entraîne un changement de posture pour la collectivité est en particulier pour ses services techniques : accompagner plutôt qu’aménager. Plusieurs modes de fonctionnement, qui peuvent se combiner, s’offrent alors à eux.

 

Mettre à disposition des espaces aux habitants

Jardins familiaux à Suresnes
Arnaud Bouissou - TERRA

La demande de végétalisation des espaces de proximité augmente parmi les habitants. Pour répondre à ce besoin, la collectivité peut mettre à disposition des bacs, créer des fosses plantées sur le trottoir, voire proposer des espaces verts existants (c’est le cas à Grenoble : les "jardins à adopter"). Des démarches telles que "Du vert près de chez moi" pour la ville de Paris ou "Jardinons nos rues" à Grenoble ont été instituées ces dernières années.

Selon la taille des espaces, les démarches mises en place par la collectivité sont soit destinées à des individus, soit réservées aux associations et/ou des collectifs d’habitants. La signature d’une charte de végétalisation, suivie d’une autorisation d’occupation du domaine public (AOT) peut facilement être mise en place afin d’encadrer administrativement ces démarches. En voici quelques exemples : charte de Bordeaux, charte de Norville (Seine-Maritime, 1000 habitants), AOT de Lomme (59), charte valant AOT de la communauté d’agglomération Grand Paris Seine Ouest.

Des collectivités et associations mettent aussi à disposition des outils d’aides à la rédaction de conventions, par exemple : le formulaire de la métropole Nice Côte d’Azur pour des jardins partagés, ou bien le guide de l’association « Cap ou pas cap » pour l’installation d’un frigo solidaire devant un magasin.

 

Accompagner les habitants dans l’entretien des espaces

Les démarches de végétalisation entraînent une évolution des missions des techniciens chargés de l’entretien des espaces verts vers un rôle d’accompagnateur des habitants-jardiniers : analyse des demandes de végétalisation, conseil sur le choix des essences (pas de végétaux allergènes ni invasifs) , sensibilisation sur les espaces végétales locales ou à éviter l’usage de produits phytosanitaires. Cette évolution du rôle des services techniques est bien illustrée dans la présentation « les trottoirs vivants » de Bordeaux Métropole lors d’une journée UneVoiriepourTous. Certaines collectivités prennent également en charge une partie de l’investissement matériel : fourniture du matériel, subvention pour l’achat de matériel, distribution de plants…

Dans un contexte rural, à Trémargat (22), l’aménagement de la place du bourg a été réalisée par les habitants eux-mêmes. Le CAUE 22 a alors assisté les habitants pour la phase de conception, interrogeant les postures traditionnelles du tryptique habitants – collectivités - acteurs locaux.

 

Assurer la pérennité

Permis de végétaliser de la ville de Paris
Permis de végétaliser de la ville de Paris

Les démarches qui s’appuient sur les initiatives citoyennes questionnent la continuité des modes de gestion participatifs lorsqu’ils dépendent uniquement d’un groupe de citadins ou de volontés individuelles. Une complémentarité citoyen – collectivité – acteur privé est à envisager, en particulier pour des espaces assez grands, des projets urbains, des friches en reconversion. Les services techniques de la collectivité doivent alors s’organiser de manière à assurer une continuité de l’entretien des espaces végétalisés lorsque des habitants déménagent ou ne sont plus en mesure de s’occuper les espaces dont ils ont la charge.

La contractualisation entre les habitants et la Ville permet de repérer et d’assurer un suivi des lieux concernés, voire d’en transférer l’entretien à un autre groupe d’habitant. A Lyon par exemple, une sollicitation en faveur de la végétalisation d’espace public doit nécessairement être collective. L’enjeu est aussi de minimiser le travail supplémentaire des agents des services techniques, d’où l’importance du choix des plantes, vivaces et robustes, du type de matériaux, ou de la réversibilité des installations.

Ce suivi est aussi utile lors de l’animation d’un espace par un collectif ou pour veiller à l’état de mobiliers urbains co-fabriqués par les habitants. Le rôle de veille de la collectivité apparaît comme essentiel afin que les espaces urbains ne soient pas délaissés.

 

 

Différents modes de gestion d'un espace public
Un parc, une plate-bande semi-privée, un jardin partagé, des bacs en gestion libre, un square, des arbres fruitiers ... cette succession d'espaces végétalisés sur un périmètre restreint montre un bon panel des différents modes de gestion possibles (avec autant de formes différentes de « contractualisations » entre citoyens et collectivités). (Lyon quartier Sans-soucis)

 

QUELLES RESPONSABILITES ?

Ces modes de faire posent également des questions en termes de responsabilité et de sécurité. Offrir la possibilité à des citoyens d’installer du mobilier urbain astreint la collectivité à s’assurer du respect des réglementations et normes en vigueur pour ce type d’aménagement : code de la route, code de la voirie routière, code des collectivités, code de la construction, normes d’accessibilité de la voirie et des espaces publics, normes liées au mobilier urbain, normes sur les matériaux et revêtements... L’enjeu est de garantir la sécurité des participants et de tous les usagers sans pour autant perdre l’aspect « dynamique » d’une action citoyenne.

La collectivité joue également le rôle de tiers facilitateur. Elle peut aussi arbitrer des conflits qui pourraient survenir entre différents usagers de l’espace public à propos d’une initiative citoyenne. Mais dans la mesure où la plupart de ces interventions se font dans un cadre expérimental et local, le partage des responsabilités et la posture d’accompagnateur des initiatives citoyennes restent à inventer.