La préservation de la qualité de l’écosystème aquatique est un enjeu fort dans un contexte de changement climatique, où l’on observe à la fois une diminution de la ressource en eau, de sa qualité, et de la biodiversité.
Quels indicateurs pour évaluer l’impact des polluants routiers ?
Le Cerema s’est penché sur la question de l’impact des eaux pluviales ruisselant des routes vers les cours d’eau, en se chargeant potentiellement d’hydrocarbures et de nombreux éléments chimiques issus des différents matériaux de la chaussée, des véhicules et des équipements. Les indices biologiques de qualité des cours d’eau utilisés actuellement (basés sur les végétaux ou animaux aquatiques) amènent à conclure à l’absence d’impact de ces eaux pluviales sur la qualité des cours d’eau.
Cette étude porte sur la pollution chronique (liée à l’infrastructure et au trafic) et saisonnière (fondants routiers et herbicides), mais pas sur les pollutions émises lors de la phase de travaux, ni les pollutions accidentelles (aucune n’est d’ailleurs survenue sur le site durant l’étude).
L’impact éventuel sur un milieu aquatique des pollutions chroniques routières peut être difficile à appréhender, notamment en raison de leur caractère intermittent (car lié aux événements climatiques), de leur nature toxique qui peut avoir un effet immédiat ou sur le long terme, de leurs effets combinés, ou la capacité de résilience du milieu récepteur en rapport avec la fréquence des rejets…L’étude bibliographique a montré que l'identification des macro-invertébrés aquatiques pouvaient être le groupe biologique le plus pertinent pour rendre compte de cette pollution, et un enjeu était d'affiner cette mesure.
Un site d’étude a été sélectionné le long de l’A31, près de Thionville (avec un trafic allant jusqu’à 75.000 véhicules par jour) se rejetant dans le ruisseau du Veymerange, où les perturbations anthropiques autres que celle de la route sont minimes. Il n’y a pas de bassin de pollution mais seulement des fossés enherbés.
Les mesures de terrain sur les macro-invertébrés
Quatre campagnes de mesures ont été réalisées de 2019 à 2021, au printemps quand le cours d’eau est à son débit maximum et en été quand il est plus bas. Trois stations de prélèvements ont été sélectionnées : en amont du rejet, en aval proche (120 m) et en aval éloigné (300 m). Ces distances, pour ce site, sont suffisantes pour un bon mélange des eaux.
Ce travail a confirmé la bibliographie : les outils biologiques actuels basés sur les macro-invertébrés (IBGN et I2M2) ne permettent pas la mise en évidence d’un impact de polluants physico-chimiques sur le Veymerange.
Au cours de cette étude, le Cerema a donc réfléchi à une méthode de collecte et d’exploitation des listes de macro-invertébrés. Cette méthode a permis de mettre en évidence un impact, de manière certaine, des eaux pluviales routières de l’A31.
Cette méthode est basée sur plusieurs points importants, comme le choix du site, soumis uniquement à la pollution à étudier (situation de plus en plus complexe à trouver), la comparaison avec une station de référence "vraie", c’est-à-sans perturbation anthropique connue, ainsi que l’exploitation des données, au niveau de l’espèce, basées sur deux outils : l’indice de similitude de Jaccard et le taux d’espèces polluosensibles, par rapport à la station de référence.
Les résultats de ces analyses ont montré un écart significatif par rapport à la station de référence (indice de Jaccard) et une baisse importante de l’abondance des espèces présentes les plus sensibles à la pollution. Par exemple, cette baisse est de 86 % en avril 2021, pour la station aval éloignée, pour le substrat "pierres", pour la vitesse de courant rapide.