Le projet CompAg a été coordonné par l’INRAE, et a impliqué le Cerema, le CNRS, l’Université Côte d’Azur, ainsi que la Fédération des Conservatoires d’espaces naturels, l’entreprise Agrosolutions et le réseau Terre de lien. Il avait pour objectif de déterminer dans quelle mesure les opérations de compensation écologique des projets d’aménagements peuvent contribuer à financer et/ou à accélérer la transition agro-écologique, et augmenter ainsi les bénéfices attendus de la compensation écologique.
Une opportunité pour la transition agro-écologique?
La compensation environnementale est une obligation réglementaire qui concerne également des territoires agricoles. Le projet CompAg s’inscrit dans le cadre de l’obligation d’appliquer la séquence Eviter, Réduire, Compenser des impacts environnementaux les plus importants entraînés par les projets d’aménagement, et vise à prendre en compte les impacts dans leur globalité afin d’atteindre l’objectif de zéro perte nette de biodiversité inscrite dans la loi Biodiversité de 2016.
Le projet avait l’ambition de déterminer comment la transition écologique des pratiques agricoles pouvait être encouragée dans le contexte de la mise en œuvre de mesures compensatoires. L’enjeu était également de ne pas limiter les réflexions relatives aux mesures compensatoires aux seules espèces protégées comme c’est l’usage, et d’intégrer l’ensemble de la biodiversité et des fonctions écosystémiques présentes sur le site.
Etude de la bibliographie et études de cas
Une étude bibliographique portant sur 189 articles scientifiques a été réalisée et a permis de montrer que l’agriculture conventionnelle peut fournir des services écosystémiques même sur de petits espaces naturels.
Cette étude bibliographique a également montré que la réflexion pour déterminer les mesures compensatoires est menée à l’échelle de la parcelle alors que l’appréhension des gains écologiques implique de réfléchir à des échelles plus larges, comme celle du paysage dans son ensemble.
L’analyse d’une cinquantaine d’études de cas a par ailleurs révélé deux situations types dans la mise en œuvre de mesures compensatoires par des agriculteurs : la remobilisation d’espaces délaissés ou marginaux pour y pratiquer l’élevage extensif, ou l’extensification voire l’arrêt de pratiques agricoles sur des espaces productifs, qui induit ainsi une diminution de la productivité de l’exploitation.
Définir un modèle de démarche de compensation en territoire agricole
A travers quatre axes de travail, l'objectif était de déterminer un modèle de démarche de compensation adapté aux territoires agricoles, fondé sur 74 indicateurs de services écosystémiques procurés par l'agriculture conventionnelle :
- Le premier axe visait à définir le concept de "nature ordinaire" dans une perspective opérationnelle afin d’outiller sa prise en charge dans les pratiques: il s‘agit d’espaces de nature qui ne sont pas protégés, ont un fonctionnement peu complexe et sont en relation avec les activités humaines. Dans la même perspective, cette partie a permis de faire l’état des connaissances sur le potentiel de gains écologiques de l’agriculture conventionnelle à travers la production de services écosystémiques : régulation des nutriments dans le sol, lutte contre les animaux ravageurs de cultures, pollinisation, séquestration du carbone, fourniture de biodiversité sont les services écosystémiques les plus souvent attendus selon l’étude bibliographique. Au total, 74 indicateurs différents de services écosystémiques dans les agrosystèmes conventionnels ont été identifiés.
- Le deuxième axe visait à évaluer le consentement des agriculteurs vis-à-vis du portage de mesures compensatoires (4423 agriculteurs ont été interrogés en 2017), et proposait une définition de la nature ordinaire pouvant être appropriée dans la mise en œuvre concrète de la compensation.
- Le troisième axe était une analyse sociologique et juridique de la mise en œuvre actuelle de compensation écologique en milieu agricole afin d’éclairer les limites qui se manifestent lors du passage de la théorie à la pratique. Ce travail a fait apparaître que certaines mesures compensatoires sont largement privilégiées : l’entretien de prairies et moins souvent la création de haies et d‘habitats écologiques. Ces mesures peuvent avoir un impact négatif sur la production et entraîner des compensations, mais elles peuvent aussi contribuer à un gain de production. L’acceptation des mesures est fortement liée à la disponibilité du foncier.
- Le quatrième axe se projette dans l’amélioration de la compensation écologique, en modélisant une application qui prendrait en compte l’incertitude de l’efficacité des mesures (nécessitant donc davantage de surfaces) et l’enjeu de maintien de la structure du paysage.
Le Cerema a particulièrement contribué à l'identification et à la caractérisation des projets et mesures compensatoires qui concernent des territoires et acteurs agricoles, grâce à sa connaissance des outils de capitalisation des mesures ERC. Il a apporté son expertise relative au processus d'instruction des autorisations administratives, et mis en relation les différentes équipes avec les agents des services instructeurs concernés par cette thématique.
Enfin, il a piloté la rédaction de la fiche 4 relative aux exploitations possibles des bases de données capitalisant les mesures ERC, et participé activement à la phase de compilation et de rédaction finale des livrables.
Les publications du projet CompAg :
Retrouvez le rapport de l'étude, la synthèse et les 10 fiches focus réalisées par les partenaires à l'issue du projet, pour accompagner la mise en œuvre des mesures compensatoires en milieu agricole.