En partenariat avec le Forum des Marais Atlantiques (FMA), le Cerema a organisé une journée technique le 3 décembre 2019 à Rochefort pour les identifier et en connaître les enjeux pour les préserver dans les projets d’aménagement.
La journée a réuni près de 80 participants des services de l’Etat, des collectivités territoriales et des organismes socio-professionnels.
Préserver et gérer durablement ces zones précieuses
Les zones humides (marais, prairies humides, lagunes, tourbières), en eau en permanence ou par intermittence, représentent des espaces naturels riches et précieux. Elles abritent une forte diversité biologique caractérisée par un grand nombre d'espèces de plantes et d'animaux.
Au cours de la seconde moitié du XXème siècle, ces espaces entre terre et eau ont été négligés, abandonnés, voire dégradés ou détruits.
Depuis, l’Homme a pris conscience de leur importance et des dangers encourus en cas de perte. De nombreuses études et recherches ont démontré leur importance notamment pour la gestion qualitative et quantitative de l’eau, et leur rôle majeur pour la biodiversité et la préservation des paysages. Le cadre législatif et réglementaire a intégré l’intérêt et la nécessité d’une préservation et d’une gestion durable de ces espaces.
Une Journée pour identifier, comprendre et protéger ces espaces de vie dans les projets d’aménagement
Introduite par les représentants du Forum des Marais Atlantiques (FMA) et du Cerema, Monsieur Gilbert Miossec et Madame Catherine Léonard, la journée a débuté par le rappel de la définition juridique et technique d’une zone humide pour ensuite présenter deux méthodes d’évaluation des fonctions des zones humides :
- méthode nationale d’évaluation des fonctions des zones humides (MNEFZH) ;
- boîte à outils nationale pour l’évaluation de l’évolution des zones humises du projet MhéO.
En fin de matinée, une analyse des doctrines nationales et locales et des exemples de prise en compte des zones humides dans les PLU(i) a été restituée.
L’après-midi fut consacrée à la prise en compte des zones humides dans les PLUi et les projets d’aménagement au travers des exemples de Nantes Métropole, de Saint-Jacques-de-la-Lande (Ille-et- Vilaine) et de la commune de Rocheservière (Vendée).
Les interventions de la journée en bref
Définition juridique et technique des zones humides
Par Albert Noireau, DREAL Nouvelle-Aquitaine
La présence de l’eau est une caractéristique indispensable pour définir une zone humide (loi du 26 juillet 2019 modifiant l’article L.211-1 du code de l'environnement).
Une présentation des travaux soumis à procédure, la méthode de délimitation, les protocoles sol, flore, habitat, la prise en compte des milieux humides dans la planification urbaine a été effectuée.
Quels enjeux pour les zones humides liées au cours d’eau ? Conséquences pour les aménagements du territoire
Par Albert Noireau, DREAL Nouvelle-Aquitaine
Les six enjeux essentiels pour les zones humides ont été présentés : limitation des inondations, recharge des nappes, soutien de l’étiage, épuration de l’eau, stockage du carbone, maintien de la biodiversité.
Favoriser les infiltrations et limiter les ruissellements restent l’objectif majeur pour les aménagements du territoire.
Méthode nationale d’évaluation des fonctions des zones humides
Par Ludovic Lucas, Forum des Marais Atlantiques
Cette méthode permet une évaluation rapide des fonctions des zones humides continentales (au sens de l’Art. L.211-1 du Code de l’environnement) en France métropolitaine mais également de vérifier qu’un certain nombre de principes de la compensation sont bien respectés. Elle s’adresse à un public technique en charge de la réalisation, l’instruction ou d’avis techniques de dossier « loi sur l’eau » portant sur les zones humides.
Trois fonctions hydrologiques, cinq fonctions biogéochimiques et deux fonctions en rapport avec l’accomplissement du cycle biologique des espèces sont évaluées sur un site impacté et un site de compensation.
Le résultat des évaluations sur le site impacté avant et après impact et sur le site de compensation avant et après action écologique permet d’évaluer la vraisemblance d’une équivalence fonctionnelle, indicateur par indicateur, fonction par fonction, à l’issue des mesures de compensation.
Des améliorations de la méthode sont envisagées suite aux retours d'expériences recueillis sur la période 2016-2019 (version V2 en 2020).
Le suivi des milieux humides par l’évaluation de l’évolution de leurs fonctions – Boîte à outils nationales MhéO
Par Stéphanie Hudin, Fédération des Conservatoires d’Espaces Naturels
Le projet MhéO porte sur le partage et l’harmonisation des suivis et de l’évaluation des fonctions des milieux humides. Il constitue l’une des actions du plan national en faveur des milieux humides (PNMH).
Les objectifs de cette boîte à outils sont multiples : faire le lien des dynamiques amorcées dans les bassins et contribuer à faire le lien entre elles, définir les besoins en outils communs, mutualiser les productions d’outils, contribuer à l’appropriation par les gestionnaires, viser une boîte à outil national répondant aux questionnements de l’évaluation de l’évolution des zones humides (long terme) et de l’évaluation de l’impact des travaux (court terme), etc.
Comment préserver les zones humides dans les PLU(i) ? Analyse des doctrines nationales et locales et exemples d’application
Par Vanessa Rauel, Cerema
La prise en compte des milieux humides dans les Plans Locaux d’Urbanisme intercommunaux (PLUi) a fait l’objet d’une étude dans le cadre du Plan National Milieux Humides (PNMH).
52 guides et doctrines ont été recensés entre 2016 et 2019 et ont tous fait l’objet d’une analyse qui a abouti à l’élaboration d’un rapport d’analyse, d’un document de synthèse des enseignements et des illustrations et d’une plaquette de communication (en cours d’édition).
En conclusion, il a été précisé les points essentiels pour une bonne prise en compte des zones humides dans les PLU(i) : une bonne connaissance du territoire, une volonté politique, l’importance de la concertation entre services planification/environnement/instruction de permis de construire, la sensibilisation/communication autour du sujet, l’évaluation de l’effet de l’aménagement du territoire sur les zones humides, la cohérence des politiques publiques et l’intégration des dispositions des documents de planification de rang supérieur (SDAGE, SAGE).
La prise en compte des zones humides dans le PLU métropolitain (PLUm) de Nantes Métropole
Par Hélène Garnier, Nantes Métropole
L’intervention, très illustrée, a présenté le territoire de Nantes Métropole et ses enjeux en matière de zones humides, la démarche d’évitement dès la phase stratégique du projet spatial métropolitain et la prise en compte de ces habitats dans les pièces réglementaires.
Ainsi, dans le règlement écrit du PLUm, il a été précisé que le respect de l’intégrité d’une zone humide implique l’interdiction de tout projet entraînant une modification du sol ayant pour impact un changement des espèces caractéristiques de zone humide et/ou une occupation du sol perturbant l’alimentation en eaux, en qualité et en quantité.
Loi sur l’eau – Séquence « Éviter Réduire Compenser »
Par Nathalie Ollivier, DDTM 17
Après un rappel réglementaire sur la séquence « Eviter Réduire Compenser » - ERC (principe de non-régression, absence de perte nette de biodiversité, réparation de préjudice écologique) et du déroulement de la procédure d’instruction, il a été rappelé l’importance de l’état initial. Cette étape est fondamentale pour une prise en compte adaptée des zones humides, tant sur leur définition que sur leur délimitation et leurs fonctionnalités. Ces propos ont été illustrés par un cas concret d’aménagement.
Les différents types de mesures d’évitement ont été illustrées, particulièrement en phase travaux, puis les mesures de réduction et les difficultés rencontrées durant leur mise en œuvre.
En fin de présentation, le principe de la compensation a été présenté : objectifs à atteindre, principes à respecter (proximité spatiale et temporelle, équivalence, faisabilité, efficacité et pérennité, additionnalité, cohérence et complémentaire) ainsi que les études à mener au préalable.
En conclusion, les motifs d’irrégularité relevés dans les dossiers lois sur l’eau ont été rappelés : aire d’étude insuffisante, absence de caractérisation des fonctions des zones humides, absence de démonstration de l’application de la stratégie de réduction, absence de bilan entre pertes et gains de fonctions, etc.
Quand le territoire organise le projet urbain. L’exemple de St-Jacques de la Lande
Par Anne-Sylvie Bruel, Atelier de paysages Bruel-Delmar
Le projet d’aménagement de la commune de St-Jacques de la Landea été présenté au travers d’un support très illustré.
La planification de l’urbanisation a permis de préserver les zones humides : organisation du schéma de récolte des eaux pluviales, visibilité et compréhension de la dynamique écologique liée à l’eau, alimentation des zones humides, liaison urbanisation et milieux naturels, création d’un parc au cœur de la ville comme lien entre quartiers et centralité (création d’une roselière pour dépolluer, valorisation de la collecte des eaux urbaines et des ouvrages de gestion du parcours de l’eau).
Allier préservation des espaces de nature et urbanisation – La zone humide de la Caillonnière
Par Antoine Orcil, Commune de Rocheservière
Sur la commune de Rocheservière, une zone humide était au cœur d’une ZAC de 37 hectares, espace du développement urbain pour les 15 ans à venir.
Cette zone était en voie de fermeture naturelle progressive du fait de l’abandon des pratiques agricoles. Le projet a consisté à intégrer la zone humide dans le projet urbain en associant tous les acteurs avec comme objectifs : dresser un état des lieux en termes de biodiversité, proposer des mesures concrètes pour mettre en place une gestion à long terme et favoriser la biodiversité, envisager l’accueil du public.
Les travaux réalisés (restauration des zones prairiales par débroussaillage, curage et restauration des berges des mares, gestion des abords arborés des mares) ont notamment permis une reconquête floristique et faunistique.
Cette journée fut riche d'enseignements et d'échanges. Le programme a alterné cas théoriques et pratiques pour davantage d'appropriation.
Les participants ont apprécié les présentations qu’ils ont jugées pertinentes, complémentaires, instructives et répondant à leurs préoccupations.
Les temps d’échanges intervenants – participants, jugés constructifs, ont également été appréciés.