
Après avoir réalisé son Atlas de la Biodiversité Communale [1] en 2023, la commune de Rémire-Montjoly, mitoyenne de Cayenne en Guyane, a souhaité améliorer les continuités écologiques du territoire. Elle a fait appel au Cerema pour identifier les actions à mener sur des sites prioritaires.
La phase de récolte de données : un préalable à la phase terrain pour identifier les points de rupture à l’échelle communale

Depuis 2016, différents études et documents cadre (SAR[2], SCoT[3] du Centre Littoral, ABC, TRAMES[4]) ont identifié les corridors écologiques et les ruptures de connectivité, et ce à différentes échelles : de la région à celle de la commune de Rémire-Montjoly. La première étape a consisté à capitaliser l’ensemble de ces données et à analyser leur pertinence en vue de leur utilisation.
Parallèlement à cette analyse, en l’absence de base de données "ouvrages d’art" géoréférencées sur le réseau routier, un repérage sur photographie aérienne a été réalisé afin d’identifier la présence d’ouvrages nécessitant une vérification in situ. En effet, la présence d’un ouvrage de rétablissement (hydraulique ou routier) à proximité d’un point de rupture de connectivité peut être intéressante car, selon sa configuration, cet ouvrage peut potentiellement permettre de restaurer un passage pour la faune terrestre et semi-aquatique.
En définitive, 33 points de rupture de connectivité et 20 ouvrages ont été sélectionnés pour une vérification sur le terrain afin d'identifier les aménagements susceptibles d'être mis en place.
Les aménagements visant à restaurer les ruptures de connectivité doivent cibler des groupes d’espèces identifiés[5]. Ainsi, il a été identifié pour chaque point de rupture le ou les types d’aménagement pressentis.
Une phase terrain pour vérifier la faisabilité et la pertinence des aménagements à proposer
L’objectif de cette phase de terrain d’une durée de 7 jours consistait à déterminer si l’aménagement pressenti (canopée et/ou terrestre) était faisable techniquement et justifié au regard de l’environnement (vis-à-vis de la pression de l’urbanisation par exemple), ainsi qu’à vérifier s’il existait déjà un aménagement permettant la transparence des déplacements de la faune à rétablir à proximité.
Pour les points de ruptures de connectivité concernant la faune arboricole il a été recherché :
- la possibilité d’installer des passages en canopée en fonction du profil de la route, de la distance entre les espaces boisés en bordure de route (nécessité de mise en place d’un poteau intermédiaire), de possibles contraintes en présence (habitations, visibilité pour les usagers), etc. ;
- la présence d'une forêt substantielle des deux côtés de la route, l’identification de l'emplacement spécifique du pont et la longueur nécessaire (identification d’hôtes potentiels).
Pour les points de ruptures de connectivité concernant la faune terrestre et semi-aquatique il a été recherché la présence d’un ouvrage :
- s’il existait un ouvrage et s’il était non franchissable en l’état par la petite faune, la possibilité de l’aménager avec une ou plusieurs banquettes ou encorbellements (présence de berge, tirant d’air) a été évaluée
- en l’absence d’ouvrage, la possibilité d’installer à proximité des passages sous la voie (hauteur de talus, hauteur de la ligne d’eau) a été évaluée.
Des fiches issues des relevés de terrain ont été renseignées pour chaque site, quel que soit l’aménagement pressenti, terrestre et / ou arboricole, et ont été fournies à la collectivité.
Bilan de l'étude et suites de l’opération

Suite au COPIL de restitution des résultats de la priorisation, la commune doit désormais choisir, en se basant sur les informations fournies, les aménagements qu'elle souhaite mettre en place, avec un objectif de mettre en œuvre 4 à 5 passages. Ces aménagements contribueront à rétablir les déplacements de la faune terrestre et arboricole, tout en réduisant le risque que des animaux se retrouvent sur la chaussée et soient percutés par un véhicule. Ils feront l’objet d’un suivi par piège photographique afin de vérifier leur fonctionnalité.
Un travail a été initié avec différents acteurs afin d’éclairer le choix de la commune au regard de différents éléments d’aménagement (permis de construire ou autres projets d’aménagement existant). L’objectif de cette démarche est d’inciter d’autres opérateurs volontaires à intégrer ces passages à faune dans le cadre de leurs aménagements (requalification routière, Opération d'Intérêt National, etc.), voire à se lancer dans ce type de démarches. Cette étude permettra également de constituer une première base de données réglementaire utile lors de l’instruction des dossiers environnementaux (en cohérence avec la séquence Eviter, Réduire, Compenser).
Cette étude a été présentée le 09 décembre 2024, lors d’une webinaire organisé par Interco’Outremer[6] sur les continuités écologiques, après une intervention de l’Office Français de la Biodiversité. Une trentaine de participants ont pu ainsi échanger sur la notion de continuités écologiques, illustrée par le retour d’expérience de Rémire-Montjoly.
[1] Démarche qui permet à une commune, ou une "structure intercommunale", de connaître, de préserver et de valoriser son patrimoine naturel. Chaque année, l'Office français de la biodiversité soutient de nombreux projets d'ABC. https://www.ofb.gouv.fr/abc
[2]Schéma d’Aménagement Régional : document de planification qui, en Outre-Mer, fixe les orientations fondamentales dans différents domaines.
[3] Schéma de Cohérence territoriale
[4]Territoires Réseaux Aménagements Milieux Environnement Sociétés : projet visant à identifier les habitats favorables constitutifs de la Trame verte et bleue (TVB) permettant aux communes de la communauté d’agglomération du Centre Littoral de pouvoir traduire finement les enjeux écologiques définis dans le SCoT.
[5] Des passages en canopée (type corde, échelle ou autres structures métalliques) pour la faune arboricole. Des passages de type buse ou aménagement de banquettes / encorbellements dans les ouvrages existants pour la faune terrestre et semi-aquatique.
[6] Association ayant pour objectif de construire et promouvoir l’intercommunalité dans les Départements et Régions d’Outre-mer