Organisée par le Cerema, la DREAL Occitanie, l’Union régionale des CAUE d’Occitanie et le CNFPT, la journée du 7 novembre a abordé les différentes facettes du paysage en démontrant par des retours d’expérience tout l’intérêt de l’intégrer dans la définition d’une stratégie territoriale.
Valeur patrimoniale, bénéfice économique, ressource pour renforcer le lien social, pour engager une démarche de concertation et bâtir des projets partagés, le paysage est un atout essentiel pour construire un territoire dynamique et attractif.
Réunissant une centaine d’acteurs à Toulouse dont la moitié issue des collectivités, cette journée a conforté l’importance que revêt le paysage comme une valeur patrimoniale par excellence pour chaque territoire et particulièrement en Occitanie.
Le paysage, quels outils? comment l’aborder ?
Des outils pour une bonne prise en compte des paysages dans les projets de territoire ont été présentés.
Josiane Magne-Thomas, architecte conseil au CAUE des Hautes-Pyrénées, a exposé à partir de l’Atlas des paysages des Hautes Pyrénées, les éléments qui caractérisent un paysage : la part correspondant au socle physique (la géologie, l’eau…), à l’empreinte humaine, et aux perceptions culturelles et sociales. Comment ont été définies les unités paysagères ? Comment, sur la base de ces éléments, comprendre les paysages d’aujourd’hui, leur évolution pour construire les paysages de demain ?
Alain Guglielmetti, inspecteur des sites et référent paysage à la DREAL Occitanie a exposé la démarche « Plan de Paysage », initiée de manière expérimentale par l’État, en 1990, et qui fait régulièrement l’objet d’appels à projets nationaux depuis 2013.
À ce jour, plus de 100 territoires lauréats, de toute échelle, ont adopté cet outil, document stratégique partagé qui sert à la fois de document de référence commun entre l’État et les collectivités et d’outil d’aide à la décision. Le plan paysage a vocation à définir de manière concertée les orientations et les actions à engager pour guider l’évolution du territoire.
Isabelle Jardin, inspectrice des sites et référent observatoire des paysages à la DREAL Occitanie est intervenue pour présenter l’outil « Observatoire Photographique du Paysage ». Si la photographie offre une vision sensible des paysages, les séries photographiques permettent d’en suivre l’évolution et d’analyser les mécanismes et les facteurs de transformation. Ces observatoires sont des outils essentiels de connaissance, de sensibilisation et de médiation auprès du public. Ils permettent également d’évaluer l’impact des politiques sectorielles menées sur un territoire.
Le paysage pour définir une stratégie territoriale partagée
Lavelanet : une stratégie de "restauration-réinvention" des paysages pour redynamiser un territoire
Sylvie Dumons, paysagiste et Marc Sanchez, maire de Lavelanet (Ariège) et conseiller départemental du Pays ont présenté l’expérience de Lavelanet. La richesse paysagère de ce territoire a été occultée par des décennies d’activité industrielle aujourd’hui disparue.
La démarche entreprise a été d’impulser une nouvelle dynamique sociale et économique pour redonner vie au territoire. Concrètement, les paysages ont été restaurés et réinventés, un cours d’eau enterré a été ouvert au cœur du bourg, des points de vue sur les alentours ont été dégagés, des corridors écologiques et des liaisons douces ont été redessinés.
Confluent et Coteaux de Prayssas: le paysage comme outil fédérateur du plan local d'urbanisme intercommunal
Sarah Dreuil, responsable du pôle aménagement du territoire de la Communauté de Communes Confluent (issu de la fusion en 2016 de deux communautés de communes et rassemblant 29 communes) et Alain Merly, 1er Vice-Président de la Communauté de Communes, maire de Prayssas ont présenté la démarche qui les a conduits à bâtir le PLUi en s’appuyant sur les atouts paysagers du territoire.
Le diagnostic réalisé en amont du PLUi a révélé la présence d’une armature de centralités dont les histoires et les dynamiques économiques et sociales différent. Le lien qui a été mis en évidence est le contexte paysager composé de vallées et de coteaux aux points de vue et panoramas remarquables.
Une charte paysagère a été adoptée et aujourd’hui reprise dans le PLUi. Cette charte permet de réunir les communes dans un projet de territoire, en préservant le patrimoine naturel et le bâti, et en accompagnant l’émergence de projets d’aménagement, de construction ou de rénovation à hautes valeurs paysagères et architecturales : extensions raisonnées, respect des formes urbaines, aménagement de zones de transitions entre zones agricoles et résidentielles, protection d’espaces naturels et agricoles, préservation de points de vue...
Canigo : le paysage pour définir une stratégie territoriale paratgée à l'échelle d'un Grand Site de France
Florian Chardon, directeur du Syndicat mixte Canigo Grand Site, a présenté la stratégie adoptée dans le cadre du plan de paysage Canigo Grand Site.
Le Canigo, "montagne sacrée des catalans" est un massif emblématique méditerranéen et pyrénéen. Le diagnostic paysager réalisé dans le cadre du Plan de Paysage a mis en valeur les composantes du territoire (massif, piémont, balcons, vallées), ses richesses paysagères, écologiques, géologiques, historiques, son appropriation par l'homme (espaces religieux, agricoles, industriels touristiques,..) mais aussi leurs liens visuels et fonctionnels.
De cette prise de conscience est né un projet de territoire, partagé par tous les acteurs, au sein duquel chacun identifie sa contribution à la cohérence d'ensemble.
Le plan de paysage du Canigo Grand Site a permis ainsi une lecture renouvelée et consolidée du territoire, une définition d'orientations et de principes d'actions mises en application.
Depuis la validation du Plan Paysage en février 2018, la requalification paysagère des portes du site classé ou la mise en valeur des balcons ont été engagées. D'autres actions sont programmées telles que la valorisation du passé minier, l’amélioration de la signalétique, la réflexion sur la transition énergétique, la mise en place d'un observatoire des paysages.
Une ressource économique
Evaluation des services écosystémiques, supports pour une nouvelle démocratie environnementale
Patricia Detry, cheffe de projet au Cerema à Aix-en-Provence a présenté le concept de services écosystémiques, développé dans une approche nouvelle de démocratie environnementale et adapté par le Cerema et l’École Centrale de Paris au projet d’aménagement de la rivière Taravo (Corse).
La notion de services écosystémiques s’entend comme les avantages, directs ou indirects, que les sociétés retirent du fonctionnement des écosystèmes.
Dans le cas du Taravo, les retombées économiques de deux scenarii ont été comparées : la construction d’un barrage hydroélectrique ou le développement de l’écotourisme. L’étude consistait à approcher dans le cas du deuxième scenario, la valeur des services écosystémiques offerts par la rivière Taravo (montant que la population consentirait à payer pour une rivière offrant les mêmes caractéristiques en termes de baignade, paysages emblématiques culturels et naturels…) et de la valeur des biens marchands liés aux écosystèmes (production agricole, eau potable et pêche récréative).
Les résultats de l’étude ont mis en évidence une valeur plus importante accordée aux services rendus et a permis au maître d’ouvrage d’orienter ses choix d’aménagement.
Le paysage, haute qualité identitaire de Gaillac-Graulhet
Sabine Brosse, directrice de l’Office de Tourisme Bastides et Vignoble du Gaillac de Gaillac-Graulhet Agglomération et Paul Salvador, président de Gaillac Graulhet Agglomération sont intervenus pour présenter leur démarche sur le territoire de l’agglomération Gaillac-Graulhet. 
Les éléments du paysage (vallons, forêts et bocages) ont été identifiés au niveau du SCoT comme des atouts à préserver et à valoriser en termes d’identité, de cadre de vie et d’attractivité.
Trois objectifs ont été définis : protéger les paysages et les patrimoines, maîtriser l’organisation et l’urbanisation des vallées, valoriser les points remarquables et les entrées de ville.
Des actions ont été menées comme la qualification de quatre Sites Patrimoniaux Remarquables sur les bourgs centres, la reconstruction du bocage, le développement d’itinéraires de randonnées et la mise en place de tablettes d’interprétation des paysages sur les points emblématiques. Le retour d’évaluation des démarches engagées et les pistes d’améliorations envisagées ont été détaillés.
La dune du Pilat, la protection d’un site naturel au service de la préservation d’un cadre de vie
Maria De Vos, directrice du syndicat mixte du Grand Site de la Dune du Pilat a présenté les résultats d’une étude portant sur l’évaluation des retombées socio-économiques générées par la dune du Pilat. L’ensemble naturel, historique et paysager unique en Europe que représente ce site contribue fortement à l’attractivité du territoire et induit une concentration sur ses abords immédiats d’activités marchandes.
Les dégradations occasionnées par la fréquentation intense du site et de ses alentours en haute saison touristique a entraîné progressivement le rejet des riverains et la difficile acceptation des réglementations qui s’imposent pour la protection du site classé. L’intérêt de l’étude a été de démontrer l’opportunité que représentait la mise en œuvre d’une gestion publique, visant à protéger les espaces naturels, et donnant ce faisant, la garantie d’une préservation du cadre de vie.
Au-delà de l’intérêt général, cette politique publique sert aussi l’intérêt des acteurs économiques, des habitants et permet d’assurer la satisfaction renouvelée du visiteur. Le syndicat de la Grande Dune du Pilat s’est appuyé sur cette étude pour orienter ses décisions en terme d’aménagements et de protection du site.
Un bien commun au bénéfice du lien social
Verdun-sur-Garonne: la réappropriation sociale de la Garonne par ses habitants
Ambre Girou, chargée de mission au Syndicat Mixte d'etudes et d'Aménagement de la Garonne a présenté les actions menées dans le cadre du plan Garonne. Valérie Corbineau, maire de Verdun-sur-Garonne a présenté les axes du projet de revalorisation du village de Verdun-sur-Garonne.
Le territoire, situé dans la vallée de la Garonne est le support de nombreuses activités socio-économiques : extraction de granulats, agriculture intensive, production d’électricité, etc. Au cours du siècle passé, la Garonne s'est éloignée de la façade fluviale.
A la recherche d'un emplacement pour des jeux pour enfants, la commune de Verdun-sur-Garonne, accompagnée d’un paysagiste, s’est saisie de l’opportunité du Plan Grand Fleuve Garonne pour redessiner le lien entre le bourg et le fleuve en aménageant notamment des espaces de convivialité intergénérationnels sur les berges.
La population s’est appropriée le projet et l’a prolongé. Des initiatives citoyennes ont émergé avec la création d’une guinguette et l’organisation d’évènements culturels et sportifs.
Le succès de cette opération a amené la collectivité à poursuivre et à proposer un nouveau projet à plus grande échelle avec la commune de Grisolles sur la rive opposée, pour favoriser la découverte des paysages de la vallée, des mémoires d'habitants et des points de vue sur le fleuve.
Destination Occitanie: la qualité du cadre de vie au service du lien social
La journée s’est terminée par l’intervention de Maryse Boy du Comité Régional de Tourisme. Le tourisme en Occitanie affiche des valeurs humaines autour notamment des notions d’hospitalité, de partage, de respect et d’équilibre du cadre de vie.
Près de 244 communes occitanes sont labellisées « Villes et Villages Fleuris », label national de qualité de vie.
La commune de Blaziert située dans le Gers a obtenu le label 4 fleurs. Cette obtention résulte de plusieurs actions qu'elle a mené en répondant à une demande sociale de bien-être au quotidien: valorisation du patrimoine bâti et des paysages, et organisation d'animations pédagogiques et de sensibilisation à l'environnement.
Le séminaire s’est clôturé par l’intervention de Sylvie Brossard-Lottigier de la DREAL Occitanie. La cheffe de la division Sites et Paysage a souligné l’intérêt de chacun des projets qui s’inscrivent dans une démarche d’ensemble pour construire les paysages et les territoires de demain.
