Le 16 novembre 2023, dans les locaux du CNFPT à Paris, une journée co-organisée par le Cerema et le CNFPT s’est déroulée avec près d’une quarantaine de participants. Cette rencontre s’est inscrite dans le cadre des travaux du Réseau Planif Territoires, et plus spécifiquement au sein du chantier relatif à l’« ingénierie pour la planification de demain » de l’axe 1 : "Le rôle des acteurs de la planification - et particulièrement des élus – à l’heure du ZAN et de la SNBC".
Quelles compétences mobiliser dans les collectivités ?
L’objectif était de questionner les compétences mobilisées et/ou à mobiliser au sein des collectivités territoriales pour accompagner et mettre en œuvre les évolutions des documents d’urbanisme dans un contexte législatif en mutation (Loi Climat & Résilience, ZAN, trajectoire Bas Carbone). La finalité de la journée était d’établir le "portrait-robot" du / de la chargé(e) de mission planification en collectivité territoriale.
Une quarantaine de participants ont répondu présents, dont il faut noter la diversité des profils :
- Collectivités (métropole, communauté urbaine, communauté d’agglomération, communauté de communes)
- État (DGALN, DDT)
- Ingénierie (BE, consultants, Cerema, CNFPT, Fédération nationale des SCOT, Intercommunalités de France)
La matinée s’est attachée à rendre compte de témoignages d’acteurs en prise avec la planification sous des prismes différents :
- Le SCoT du Grand Pau : une approche de l’aménagement par la santé
- Communauté de Communes de la Haute Saintonge : groupement de commandes pour l’élaboration de 84 PLU
- Présentation du syndicat CINOV, syndicat des Programmistes et des AMO
L’après-midi a été consacrée à un moment de réflexion collective. 3 sous-groupes répartis en ateliers d’une durée de 2h15 ont travaillé à partir d’un jeu de carte cocréé par le CNFPT et le Cerema spécialement pour l’occasion, avec l’appui de Jérôme Arcega-Leclerq, facilitateur graphique.
53 propositions de compétences et missions constituaient les cartes (format A5) initiales, issues du référentiel métier national du CNFPT et d’échanges entre le CNFPT et le Cerema dans le cadre de la préparation de l’atelier. Un guide a été élaboré pour assurer une homogénéité dans l’animation des ateliers.
Les propositions étaient classées selon 6 catégories :
- Acteurs et Gouvernance
- Politiques publiques mobilisées
- Savoir faire
- Outils
- Savoirs
- Savoir être
L’atelier était structuré en 3 séquences :
- Prise de connaissance des différentes cartes sur l’activité du chargé de mission planification : un temps de réflexion.
A partir d’un ensemble de 53 compétences proposées, les participants devaient échanger sur les intitulés, échanger leurs points de vue faire part de leurs expériences / visions. C’était également un moyen de "faire connaissance" entre participants, sorte de brise-glace dynamique.
Ils pouvaient également à partir de cartes vierges compléter d’éventuels manques identifiés. De même, il était possible de « jeter » ce qui ne correspondait pas / plus à la réalité d’exercice des missions. Répartition des cartes par catégorie : un temps de classement
Dans la perspective d’application des exigences de la sobriété, il a été demandé aux participants de recomposer les activités du / de la chargé(e) de mission planification en plaçant chaque carte retenue dans la catégorie lui apparaissant la plus pertinente.
4 actions étaient possibles :> compétence "à garder" : considérée comme indispensable à l’exercice du poste et conservée en l’état, sans modification
> compétence "à redistribuer" : considérée comme nécessaire à l’exercice de la planification mais devant être redistribuée car la responsabilité de cette compétence n’a pas à être rattachée au / à la chargé(e) de mission mais auprès d’autres services / acteurs (interne/externe)
> compétence "à ajouter" : les cartes nouvellement créées (temps 1 mais aussi en cours de discussion en temps 2)
> compétence "à transformer" : cartes qui ont été modifiées pour être adaptées aux missions
> "Joker" : les cartes qui ne faisaient pas consensus entre les participant.es avec la possibilité d’en défausser un maximum de 3 par groupe.- Vote pour la ou les cartes qui ont le plus d’importance : un temps de valorisation
Chaque participant était invité à voter en attribuant 3 gommettes sur la ou les cartes qui représentait le plus d’importance, et montrer la valeur d’une compétence à l’ensemble du groupe. Suivent les résultats cumulés des votes par gommettes, représentés sur chaque carte.
Un portrait-robot qui illustre la diversité des missions
Après ces travaux collectifs, la compilation des choix, des propositions et des ajouts ont permis de dégager un "portrait-robot". Ce dernier illustre un "super-héro", un "mouton à cinq pattes" qui finalement ne peut exister. Et pourtant les documents de planification existent ! Il ne s’agit donc pas d’un portrait-robot unique mais d’une réalisation collective illustrant une pluridisciplinarité forte et des évolutions de la posture en interne et externe à la collectivité à engager. Pour autant, il indique d’importantes exigences en matière de planification et montre combien le champ d’intervention est large et requiert de nombreuses aptitudes.
Il en est ressorti 3 niveaux d’importance des compétences pour l’exercice des missions de chargé de planification : indispensables, essentielles, facilitatrices. Ci-après, les compétences relevant des 2 premiers niveaux.
INDISPENSABLES | ESSENTIELLES | |
Acteurs et gouvernance | Impliquer et mobiliser les élus Susciter la coopération territoriale et accompagner le dialogue territorial | Savoir repérer les acteurs et métiers de l’aménagement impliqués dans les transitions territoriales |
Politiques publiques mobilisées | Mettre l'habitant au cœur des politiques publiques | Intégrer les problématiques d’étalement urbain, d’artificialisation et de renaturation et favoriser les continuités écologiques |
Savoir-faire | Piloter et engager les procédures d’élaboration, de révision et de modification des documents d’urbanisme Traduire les orientations au regard des objectifs de la collectivité en matière d’aménagement du territoire
| Superviser l’intervention des prestataires Contribuer à la rédaction des cahiers des charges de consultation des bureaux d’étude (commande technique, critères de choix, analyse des offres) Établir ou contribuer au diagnostic et à l’analyse des dynamiques territoriales, leurs évolutions ainsi que leurs incidences en matière de politiques publiques d’aménagement
|
Outils | Mobiliser les outils SIG pour produire des données et de la cartographie | Connaître l’existence et l’usage des observatoires |
Savoir | Connaître la réglementation de l’urbanisme, de l’aménagement et de l’environnement | Suivre les enjeux, les évolutions et le cadre réglementaire des politiques publiques d’aménagement du territoire Développer et mobiliser des connaissances et savoirs pluridisciplinaires |
Savoir-être | Animer et fédérer | Faire preuve de pédagogie Accompagner la décision |
La reprise du portrait-robot avec la distinction en 3 catégories permet de rendre compte des compétences charnières et plébiscitées. Les "facilitatrices", les compétences dites de 3e niveau, sont tout aussi importantes, mais seulement plus diffuses ou ponctuelles selon les situations locales.
Conclusion : enseignements et perspectives
Cette journée a permis un temps de rencontre et de partage entre différents acteurs impliqués dans le champ de la planification. Les échanges et les réflexions qui en sont issues ont rendu compte de la complexité du sujet et de sa diversité d’expression selon les niveaux de collectivités, leur acculturation et leur structuration pour faire face aux enjeux conférés à cette discipline de la planification.
TEMPS DE REFLEXION | TEMPS DE CLASSEMENT | TEMPS DE VALORISATION |
Une diversité des approches et des perceptions sur ce qu’est la planification en collectivité selon la structuration locale | L’option "Joker" a été peu utilisée. Beaucoup de cartes conservées ce qui montre le socle de base des compétences et révèle sa complexité | Un effet "groupe" lors des votes avec des choix homogènes |
Une importance à reconsidérer les verbes à employer (ex. Connaître vs maîtriser) | Une forte nécessité de redéfinir les contenus ("à transformer") pour correspondre aux réalités : besoin d’un gradiant de la qualification des compétences | Une dimension systémique dans les choix et justifications |
Une unanimité sur les nouvelles compétences à mobiliser et/ou à renforcer | Des divergences sur la redistribution des compétences selon la structuration locale (juridique, SIG, etc.) | Des interventions invitant à "ouvrir" le sujet pour y donner une suite : nécessité d’un approfondissement sur la base des compétences identifiées, tout en interrogeant les organisations de travail |
Un temps de débat utile pour prendre de la hauteur et susciter des questionnements chez les participant.es |
Contact Cerema
David-Marie Vailhé, chef de projets stratégies territoriales et foncières