2 juillet 2024
Modes actifs dans l'espace public
Cerema
Alors que de nombreuses collectivités envisagent de donner plus de place aux piétons et aux vélos en centre-ville, le Cerema a mené une enquête auprès des commerçants pour identifier leurs besoins, attentes ou craintes vis-à-vis des aménagements dédiés aux modes actifs.

Les centres-villes jouent un rôle essentiel pour l’attractivité économique et démographique des villes. Au milieu des années 2010, les pouvoirs publics ont fait le constat d’un déclin généralisé de ces quartiers, en particulier dans les villes moyennes, se traduisant notamment par une forte vacance des logements et des commerces. Face à ce constat alarmant, de nombreuses communes ont mis en place des programmes visant à revitaliser ces quartiers stratégiques, souvent avec le soutien de l’État [1]. 

 

Identifier les appréhensions des commerçants

Parmi les actions mises en œuvre figure généralement la requalification d’espaces publics vétustes et dédiés aux déplacements motorisés. Certaines collectivités font alors le choix de favoriser les modes actifs [2] : création de bandes cyclables, de stationnements vélos, suppression des stationnements automobiles, mise en sens unique, élargissement des trottoirs, végétalisation, installations de bancs... Cela peut aller jusqu’à la piétonisation pure et simple de certains axes. L’objectif étant de mieux répondre aux attentes des clients, mais aussi des visiteurs et habitants du centre-ville, en proposant un environnement urbain de qualité, apaisé et agréable.

Les retombées économiques des aménagements visant à donner plus de place aux piétons et aux cyclistes sont reconnues, en France comme à l’étranger [3]. Cependant, ces projets peuvent entraîner des réticences de la part des commerçants, qui craignent une baisse de leur clientèle avec la réduction du stationnement.

L’expression "no parking, no business" serait encore bien ancrée dans les mentalités, notamment dans les villes petites et moyennes au cœur de territoires peu denses où la voiture reste le mode de transport privilégié. Plusieurs enquêtes réalisées dans différentes villes européennes ont montré que les perceptions des commerçants concernant les déplacements de leurs clients sont parfois biaisées ; la place de la voiture étant surestimée. 

Dans ce contexte, le Cerema a réalisé une étude afin de connaître les besoins, attentes, ou craintes des commerçants concernant les aménagements urbains visant à développer les modes actifs. L’objectif était de donner aux collectivités des clés de compréhension des perceptions des commerçants afin que le dialogue autour des nouveaux projets puisse se tenir de manière apaisée.
 

Des résultats encourageants pour le développement des modes actifs

Pour ce faire, une enquête destinée aux commerçants a été élaborée et relayée, avec l’aide du Club des Managers de Ville et de Territoire, auprès de communes de tailles diverses :

  • Rouen (Seine-Maritime, Normandie), 114 187 habitants, environ 1 500 commerces 
  • Béziers (Hérault, Occitanie), 78 600 habitants, environ 500 commerces
  • Vienne (Isère, Auvergne-Rhône-Alpes), 30 059 habitants, environ 500 commerces 
  • Fronton (Haute-Garonne, Occitanie), 6 413 habitants, environ 50 commerces en centre-ville

Ces villes avaient pour point commun au moment de l’enquête d’avoir entamé voire achevé récemment (moins de cinq ans) des aménagements favorables aux modes actifs. Par exemple, la Métropole Rouen Normandie venait de terminer les travaux liés au projet "Cœur de Métropole", dont les objectifs étaient d’augmenter l’attractivité patrimoniale et commerçante du centre-ville tout en adaptant l’espace aux nouveaux usages des mobilités douces et en végétalisant l’environnement urbain.

Plus de 200 réponses ont été récoltées entre le 1er novembre 2022 et le 15 janvier 2023. Des entretiens ont également été réalisés avec les acteurs locaux (managers de commerce, Chambres des Métiers et de l’Artisanat...) afin de contextualiser et mettre en perspective les résultats.

 

 
Il ressort notamment de cette étude que dans les villes étudiées, les commerçants étaient en général plutôt favorables aux projets, malgré les perturbations engendrées par les travaux et les restrictions de circulation. 
Autre résultat intéressant : les aires piétonnes sont jugées plutôt positivement par les commerçants concernés. Ainsi, Les commerçants situés en zone piétonne ont une perception majoritairement positive de l’espace public environnant, souvent qualifié d’"agréable", "confortable" ou "calme". 
Ces aménagements atteignent donc généralement leur objectif premier, celui d’apaiser le centre-ville.

 

 


[1]   Par exemple via le programme national « Action Cœur de Ville » qui vise à revitaliser les villes moyennes.

[2]  L’expression « modes actifs » désigne l’ensemble des modes de déplacements qui mobilisent la force physique de l’usager : marche, vélo, vélo à assistance électrique, trottinette non-électrique, skateboard, patins à roulettes...

[3] Voir notamment à ce sujet l’article de Mathieu Chassignet, The Conversation, mai 2024 : "No Parking No Business en Centre-Ville, un Mythe à Déconstruire".

[4] Programme Innovations Territoriales et Logistique Urbaine Durable auquel est associé le Cerema.

 

Dans le dossier Dossier : Marche en ville

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