Les objectifs ambitieux de réduction de l’artificialisation inscrits dans la loi Climat et Résilience (une division par deux de la consommation foncière à l’horizon 2030 et l’objectif de Zéro Artificialisation Nette en 2050) impliquent une évolution dans les pratiques d’aménagement. Cependant, ces objectifs se confrontent à des enjeux forts pour les territoires tels que le développement économique, la production de logements, la réindustrialisation, la production alimentaire, la préservation de la biodiversité, la protection contre les risques naturels…
Un groupe de travail pour identifier les enjeux et les outils à destination des intercommunalités
Dans le domaine des activités économiques notamment, la connaissance du foncier existant à travers la réalisation d‘inventaires du foncier économique, inscrits dans la loi Résilience et climat du 22 août 2021, est primordiale pour définir et mettre en œuvre des stratégies sur le long terme. Au-delà du recensement, ces inventaires devront fournir des indicateurs sur l’état parcellaire, l’identification des surfaces, du propriétaire et de leur occupant, ainsi que les locaux vacants (article 220).
Depuis plusieurs années, Intercommunalités de France (ex AdCF) et le Cerema mènent des travaux conjoints autour de l’aménagement et de la requalificationdes zones d’activités économiques et des stratégies mises en place pour les gérer. Les travaux conjoints peuvent téléchargés ici :
Dans le contexte de la promulgation de la loi climat et résilience, un groupe de travail a été constitué en 2021 pour lancer les réflexions autour de ces enjeux et surtout déterminer quels outils et leviers d’action partager avec les collectivités, pour les appuyer dans la mise en œuvre des objectifs de sobriété foncière.
Une enquête a été lancée en janvier 2022 par le groupe de travail auprès des intercommunalités et de leurs partenaires pour mieux cerner les problématiques foncières prioritaires en matière d’activités économiques, les réponses sont attendues avant le 15 février. Un premier webinaire d’échanges est organisé ce 3 février 2022, dont la synthèse sera partagée prochainement.
Vers un référentiel commun sur le foncier économique
Les enjeux identifiés par le groupe de travail concernent trois axes principaux, qui ont fait l’objet de sous-groupes de travail lors du webinaire :
1. Construire un référentiel partagé sur la sobriété foncière pour les activités économiques
La réalisation d’inventaires des zones d’activité économiques, qui doivent être réalisés d’ici 2024 et doivent être actualisés tous les six ans, permet d’adopter un référentiel commun pour qualifier et observer ces espaces, et établir un dialogue avec les différents acteurs concernés dans les territoires.
Deux méthodes sont possibles pour observer l’artificialisation des sols dans les ZAE : en suivant l’évolution de l’occupation des sols ou l’occupation des unités foncières. Le périmètre pris en compte dans cette observation peut aussi dépasser la stricte ZAE.
Cette analyse du foncier économique doit être menée au regard des pressions foncières globales du territoire. En effet, si les activités économiques représentent entre 21 % et 25 % des sols artificialisés selon les années entre 2009 et 2017, des réalités démographiques et économiques très différentes sont observées d’un territoire à l’autre, induisant des enjeux spécifiques à chaque intercommunalité.
L'observation du foncier économique permet aussi aux territoires de recenser les gisements fonciers et espaces possibles de densification afin d'améliorer le pilotage de l'action des aménageurs publics et des opérateurs fonciers.
2. Articuler outils et stratégies en faveur de la sobriété foncière
Les outils de l'action foncière sont multiples et peuvent jouer un rôle coercitif (Droit de préemption, zonage de mixité fonctionnelle, Opah-RI,etc.) ou incitatif (ORT, PUP, PPA, baux longue durée, etc.), et permettent de construire et développer la stratégie foncière en s’adaptant au contexte. Les dispositifs d'observation permettent d'alimenter la stratégie tandis que les instruments de contractualisation (charte foncière et charte promoteur, AFU, etc.) facilitent l'adhésion des acteurs privés aux orientations stratégiques. Cependant, ces outils seront d'autant plus efficaces qu'ils sont mis au service d'une stratégie. La sobriété foncière peut être atteinte de plusieurs manières mais chaque territoire aura sa propre stratégie et sa propre combinaison d'outils.
Urbansimul, élaboré par le Cerema à la demande de l’Etat à partir de l’exploitation des données foncières et immobilières, permet de réaliser cet inventaire et d’identifier les réserves et les unités foncières. La base de données SIRENE permettra d’identifier les occupants de la ZAE.
Il reste notamment à développer un outil pour déterminer le taux de vacance des ZAE, lequel ne peut être établi de manière fiable qu’à l’aide des données d’occupation des unités foncières détenues par la Direction générale des finances publiques sur la base des règlements de cotisation foncière des entreprises (CFE).
3. Formaliser une gouvernance autour de la sobriété foncière au service d’objectifs territoriaux communs
La disponibilité foncière ne suffit pas à attirer les entreprises. Celles-ci cherchent aussi un environnement immédiat composé de services et d'équipements favorables à leur développement et à l’attraction des salariés. Attirer et ancrer les entreprises sur son territoire s'accompagne de solutions immobilières variées en fonction des activités et de leur maturité, d'infrastructures mutualisées et accessibles (transport fluvial, ferroviaire et maritime) ou encore de services et équipements communs (stationnement, covoiturage, services RH partagés, salles de réunion, réseaux de chaleur…). Ces services et solutions doivent se décliner aussi dans une optique de sobriété foncière.
Afin de mettre en œuvre les actions nécessaires pour répondre à l’objectif de Zéro Artificialisation Nette, les acteurs doivent se coordonner pour prendre des décisions adaptées. Pour cela, établir une gouvernance transversale en faveur de la sobriété foncière sera un levier efficace mettant en relation un réseau d’acteurs issus des champs de l’urbanisme et du développement économique.
Le dialogue entre les collectivités et les entreprises, par exemple à travers la mise en place de parcours résidentiels, permet d’adapter au mieux le foncier au besoin des entreprises et de mutualiser certaines infrastructures (réseau d’assainissement, voies d’accès, stationnement) et certains services (restauration, ressources humaines, etc.).
A l’intérieur de la collectivité, la collaboration entre les services d’urbanisme, d’aménagement et de développement économique autour des questions de foncier pour les entreprises, peut être menée à l’occasion de la création des zonages d’urbanisme réglementaire (PLU, OAP, sous-destinations). Elle favorisera le partage des cultures et des approches propres à chaque service.
La collaboration de la collectivité avec les autres acteurs publics, notamment l’Etat et les régions, mais aussi les Etablissements Publics Fonciers et les aménageurs (SPL et SEM) permet de mobiliser un réseau d’acteurs impliqués dans la gestion foncière et de disposer d’une ingénierie territoriale.
Enfin, l’éventuelle opposition des habitants à certains projets doit être intégrée à la réflexion afin de privilégier des implantations en ZAE pour les activités ne pouvant être accueillies en ville et à l’inverse favoriser la localisation d’activités à proximité des zones résidentielles lorsqu’il s’agit de services et de commerces répondant à des services du quotidien pour les habitants et les actifs.
En préparation du webinaire du 3 février, un document de cadrage reprend tous ces éléments, et présente plusieurs retours d’expériences qui permettent d’éclairer les différentes stratégies pouvant être mises en place.