Le changement climatique n’est qu’une facette des changements globaux puisque nous connaissons dans le même temps une érosion spectaculaire de la biodiversité.
Si le changement climatique aggrave l’état de la biodiversité, cette dernière représente a contrario un formidable réservoir de solutions puisque les écosystèmes en bon état de conservation contribuent à l’atténuation (captage et stockage du CO2 atmosphérique) et à l’adaptation aux effets du changement climatique (risques naturels comme les inondations, les tempêtes, les glissements de terrain ou l’érosion des sols).
Les possibilités en matière de solutions faisant appel à la biodiversité sont innombrables et variées. En région, les impacts du changement climatique se font déjà sentir ; il est essentiel que nous soyons acteurs de la résilience de nos territoires.
Le profil environnemental régional Centre - Val de Loire, un outil de connaissance au service des collectivités
Le profil environnemental régional Centre - Val de Loire est un outil de connaissance et de sensibilisation sur l’environnement. Il favorise la prise en compte de l’environnement dans les actions publiques et individuelles.
Il contribue également à donner un cadre de référence sur l’environnement, aux services de l’État et des collectivités locales, pour l’accomplissement de leurs missions. Une cinquantaine d’indicateurs recouvrent ainsi quinze thématiques et donnent une vision régulièrement actualisée de la situation en région.
Concernant la ressource en eau, les impacts du changement climatique attendus seraient par exemple : à l’horizon 2041-2070 pour le scénario RCP 4,5 du GIEC ; 1 à 3 jours de cumuls de pluies supplémentaires par an dans certains secteurs de la région, globalement baisse de la ressource en eau et corrélativement baisse de la qualité des eaux par eutrophisation.
Sur le volet risques naturels, une aggravation est attendue avec notamment des risques accrus de phénomènes de retrait/gonflement des argiles. Les conditions météo seront plus propices aux départs de feu.
Mais dès à présent certaines évolutions sont déjà visibles : on constate par exemple une anticipation d’une quinzaine de jours des dates de floraison en région ; les vendanges ont ainsi avancé de 8 à 10 jours au cours des 50 dernières années.
La rapidité et l’intensité du phénomène en cours nécessitent de voir comment intégrer au mieux les activités humaines face aux modifications de l’environnement. Il s’agit de faire en sorte de consolider à toutes les échelles l’armature territoriale que confère notre patrimoine biologique en privilégiant aussi l’expérimentation.
Les impacts du changement climatique sur les populations piscicoles
Plus de 20 ans de données piscicoles ont permis d’observer des tendances de l’impact du changement climatique sur les populations de poissons. Sur les 120 espèces de poissons répertoriées en France, 20% sont menacées à courte échéance. Le changement climatique va affecter les débits et la température de l’eau, qui sont les deux exigences pour les habitats des poissons.
Actuellement, il est déjà constaté une augmentation de 1,6°C de l’eau, une baisse des débits de 10 à 40 % (surtout dans le sud-ouest), et une précocité des étiages avec une baisse des débits d’étiage jusqu’à 60%. Cela impacte leur comportement (notamment leur reproduction), leur calendrier d’activité et les aires de répartition des espèces, susceptible de faire disparaître de la région certains poissons (truite fario) ou pouvant en privilégier d’autres (chevesne, barbot) si les continuités écologiques sont rétablies. Les modélisations montrent que ce sont les espèces les plus tolérantes thermiquement qui seront favorisées.
Agir dès maintenant :
La restauration des continuités écologiques (les Trames Vertes et Bleues) des cours d’eau est une des pistes d’actions, en aménageant, gérant, ou effaçant les ouvrages pour les rendre franchissables.
Adapter les prélèvements d’eau en conservant des débits minimums sur les bassins versants sensibles, ou encore restaurer les boisements des berges de rivières pour agir sur la température de l’eau, sont des solutions pour aller vers la résilience des cours d’eau.
La nature, source de solutions
Les zones humides, une clé face au changement climatique
Il est urgent de restaurer les zones humides, eu égard aux multiples services qu’elles nous rendent. Les zones humides jouent en effet un rôle vis à vis de l’épuration des eaux, du soutien d’étiages (niveau annuel le plus bas atteint par un cours d'eau), de la réduction de l’intensité des crues notamment.
La restauration du milieu naturel, ainsi que la suppression des réseaux de drainage qui assèchent les zones humides sont de premières solutions pour passer à l’action.
Le Syndicat de l’Œuf, la Rimarde et l’Essonne a ainsi restauré le marais du Moulin de la Porte. Cette zone de 20 ha, anciennement humide, a retrouvé son fonctionnement hydraulique initial suite à la remise en eau de parcelles, à laquelle s’est ajoutée la recréation de frayères à brochet et la restauration d'alignements de saules têtards.
Cette restauration de grande ampleur permet de réduire les inondations sur les secteurs habités en aval et d’améliorer les débits estivaux des cours d’eau.
Le végétal en ville, source d’atténuation et d’adaptation
Le Cerema Est a mené, en partenariat avec la ville de Metz et Metz Métropole, un projet sur l’évaluation de l’adaptation des essences végétales dans le territoire messin face au changement climatique.
Cet outil permet d’identifier les arbres en fonction de la réponse que l’on souhaite apporter dans un projet de végétalisation en ville.
Des fiches techniques très concrètes par essences d'arbres précisent leurs bénéfices en termes de qualité de l'air, de support de biodiversité, d'atténuation des îlots de chaleur, de stockage de carbone, de cadre de vie et d'adaptation au changement climatique. A noter également que l’implantation des arbres est également déterminante dans la régulation du micro-climat.
La place du végétal en ville a fortement évolué, preuve apportée par nombre de cartes postales anciennes qui faisaient la part belle à la nature dans les cœurs de bourgs.
En travaillant sur ces thématiques, il s’agit de déconstruire des logiques actuelles du "tout voiture" et de s’interroger sur le fleurissement et la place du végétal dans les bourgs. Il est nécessaire d’apporter aux élus et aux équipes techniques des solutions sur les espaces problématiques comme les trottoirs, raccords et jonctions avec les murs, au vu du temps passé et des résultats obtenus.
Dans le cadre de l’initiative "Jardinons nos villages" développée en Loir-et-Cher, des ateliers participatifs de plantation de massifs ou de pieds de mur sont ainsi organisés avec les habitants avec des plantes mises à disposition par les communes. Une façon de redonner une place à la nature en ville pour embellir les rues, tempérer le caractère routier et atténuer les phénomènes d’ilots de chaleur.
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Les Ateliers
Au cours de cette session d’ateliers, élus, techniciens, associations naturalistes, urbanistes et entreprises ont pu échanger et lancer la réflexion vers la transition des villes/villages en réintégrant la nature comme solution pour répondre à une multiplicité d’enjeux. Les débats et les questions qui ont animé chaque atelier ont démontré l’intérêt des participants pour ces thématiques.
Atelier 1 : Les espaces verts ou jardinés et les espèces résilientes
Comment adapter la végétalisation des territoires au changement climatique ?
Témoignage de Ludovic Bernachot - Ville de Bourges : présentation des actions communales de plantations liées au changement climatique (plantation d’essences méridionales en parallèle d’espèces "Végétal local" pour donner un maximum de solutions d’adaptation aux modifications climatiques).
Témoignage de Jane Dumont – Agglopolys : présentation des actions développées pour adapter notamment le fleurissement aux restrictions d’eau estivales et repenser la nature en ville.
Animation de l’atelier par Jérôme Lesage - association "Hommes et Territoires" qui a apporté un éclairage complémentaire en présentant l’action « Bords de champs – bords de chemins ».
Les points saillants des débats :
- Importance de former et sensibiliser les élus et décideurs mais aussi les techniciens des collectivités en transversal
- Trouver des solutions qui répondent à plusieurs enjeux simultanés et à une forte potentialité de résilience
- Importance de diffuser les retours d’expériences aux acteurs des territoires et pouvoir les reproduire ailleurs (listes d’espèces, approvisionnements pour aider à la mise en œuvre concrète) pour favoriser l’essaimage de bonnes pratiques et développer les filières locales d’approvisionnement de semences, arbres et arbustes.
Atelier 2 : L’arbre porteur de solutions
La haie et l'arbre assurent de nombreuses fonctions comme le stockage de carbone, la lutte contre l'érosion, la résilience au changement climatique, mais comment susciter des volontés de plantations de haies ?
Témoignage de Sylvie Maino - Pays Vendômois, et de Hubert Désiré - Chambre d’agriculture du Loir-et-Cher.
Présentation du "Plan Bocage" mis en œuvre permettant la replantation de haies : La Chambre d’agriculture, la Fédération des chasseurs, le syndicat de rivière, la Maison Botanique, les jeunes agriculteurs, ainsi qu’une ethnologue s’associent pour conseiller et accompagner les projets d’agriculteurs volontaires qui souhaitent replanter des arbres. Le projet vise à inventer collectivement une nouvelle place pour l’arbre dans les exploitations, en phase avec le fonctionnement et les attentes des agriculteurs.
Animation de l’atelier par Nina Fenateu - CAUE 41
Les points saillants des débats :
Enjeu économique et valeur ajoutée :
- Responsabilité partagée par rapport à l’arbre, besoin d’intelligence collective entre agriculture, entreprises, collectivités… pour lui redonner sa place ;
- Caractère expérimental et reproductible face au changement climatique : diffusion des expériences indispensable pour créer l’envie et montrer le champs des possibles ;
- Se questionner sur comment convaincre autour des services rendus par l’arbre, pour rentrer dans une phase active.
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Atelier 3 : espaces végétalisés : atout gagnant pour infiltrer les pluies
Comment anticiper l'impact du possible changement de régime des pluies en sortant du "tout-tuyau" pour aller vers une dés-imperméabilisation des sols et une infiltration in-situ ?
Gérer l’eau de pluie en favorisant son infiltration au plus près de là où elle tombe est une solution à gains multiples. Les aménagements créés embellissent les quartiers, favorisent le développement de la biodiversité et luttent contre les ilots de chaleurs. Tout cela à un coût moindre qu’une gestion traditionnelle enterrée. Ce choix urbanistique est très favorable pour la protection de la qualité de l’eau car cela évite la surcharge les réseaux et donc les déversements non maîtrisés.
Témoignage de Claude Bordier - maire de Naveil (commune du nord du Loir-et-Cher) : présentation du projet « zéro rejet » pour les constructions nouvelles en place depuis 2008 sur la commune afin d’éviter les rejets d’eau pluviale qui accentuaient les débits de crues du Loir.
Témoignage de Jacques Joselon - adjoint au maire de la ville de Chambray-lès-Tours : présentation de la prise en compte de la gestion de l’eau dans l’éco-quartier de la Guignardière, née d’une réflexion interservices.
Animation de l’atelier par Mylène Moreau - Agence régionale de la biodiversité
Les points saillants des débats :
- Motivation des collectivités par le prisme de la problématique de ruissellement et des inondations ;
- Les solutions naturelles d’infiltration in-situ permettent de répondre à d’autres fonctions : tourisme, cadre de vie, dépollution, rafraichissement, biodiversité ;
- Besoin fort d’appui technique, de conseils, d’exemples qui donnent des idées de faisabilité et permettraient de faire émerger des projets en région, tant sur la création des nouveaux quartiers que sur la restauration d’infiltration des eaux de pluies dans les quartiers anciens ou les bâtiments déjà construits.
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Atelier 4 : L’implication citoyenne, un moteur pour agir
Comment impliquer les citoyens pour agir face au changement climatique ?
Témoignage de Didier Papet - Loiret Nature Environnement. Présentation de la prise en compte de la biodiversité lors de la rénovation énergétique de bâtiments par la pose de nichoirs à Martinets expérimentaux, au-dessus des fenêtres..
Avant la rénovation, les Martinets faisaient leurs nids dans les boitiers de volets roulants. Pour compenser leur disparition, 250 nichoirs ont été posés sur un ensemble d’immeubles en cours de restauration. Ces mesures se sont avérées positives car toute la colonie a pu être récupérée, avec un report total des nicheurs.
Témoignage d’Hervé Cividino - directeur adjoint du CAUE 45. Présentation d’outils pour la participation des habitants comme la création d’un réseau d’ambassadeurs en urbanisme, aménagement et paysage ou les démarches de concertation dans les réflexions d’aménagement des territoires. Plusieurs collaborations numériques sont également développées comme le S-PASS Territoires (observatoire des arbres), le projet « Jardins de rue » qui recense les points de végétalisation participative, le fleurissement participatif avec un portail dédié
Animation de l’atelier par Pauline d’Armancourt - Agence régionale de la biodiversité
Les points saillants des débats :
- Les actions qui réussissent sont celles qui associent les citoyens : sensibiliser et donner du sens aux projets, partager les connaissances (éducation à l’environnement, pédagogie, lever des idées reçues du type : « l’environnement c’est accessoire », « ce n’est pas une priorité économique »), informer ;
- Aller chercher des collectifs déjà constitués, travailler sur des ambassadeurs, Inventaires de la Biodiversité Communale (IBC) levier vers les citoyens, aménagement de mobilier urbain
- Travailler en local et au plus près des réalités du territoire ;
- Aller plus loin que la valorisation de l’emblématique et du remarquable, argumenter sur l’utilité environnementale, les fonctionnalités écologiques.