Cette journée résulte d’un travail partenarial engagé depuis plusieurs années avec la direction générale de l'Aménagement, du Logement et de la Nature, la direction générale du Patrimoine et de l'Architecture du ministère de la Culture, le Centre Européen de prévention de Risque d'Inondation (CEPRI), la Mission Interministérielle pour la Qualité des Constructions Publiques (MIQCP), l'AQC et le PUCA.
En présence d’une centaine de participants, elle a permis de présenter les enseignements issus des deux palmarès puis d’échanger sur les défis pour l’avenir et sur les suites à donner à ces deux éditions du Grand Prix d’Aménagement afin qu’elles y contribuent.
Au travers d’interventions, de témoignages et d’échanges en table ronde, cette journée a permis d’aborder spécifiquement :
- Les conditions de conception de projets urbains résilients en renouvellement urbain sur des sites stratégiques pour le développement des territoires ;
- Les valorisations paysagères, culturelles ou encore agricoles des espaces inconstructibles ;
- Les apports d’une approche historique, et plus largement des sciences sociales, pour construire une mémoire collective puis une politique de prévention des risques ;
- Le rôle des services de l’Etat pour accompagner les territoires afin de concilier développement et gestion des risques par des démarches de projet.
Introduction
Cédric Bourillet, Directeur Général de la Prévention des Risques et Paul Delduc, Directeur Général de l’Aménagement, du Logement et de la Nature
Ils ont rappelé l’importance de la gestion des risques (prévention, gestion de crise, reconstruction) une semaine après les inondations dans l’Aude. Ils ont souligné le défi collectif de garantir la prévention des risques, tout en permettant le développement des territoires. Des démarches comme les Ateliers des territoires sur des territoires soumis à des risques et les deux palmarès du GPATIC témoignent de cette volonté d’accompagner les collectivités face à ce défi. Elles sont le fruit d’un partenariat entre les services de l’Etat, les collectivités locales et le Cerema qui doit se poursuivre. Cette journée n’est qu’une étape, pas une conclusion.
Le renouvellement urbain de sites stratégiques soumis aux risques (table ronde)
Animateur : Denis Crozier (Cerema)
Intervenants : Eric-Daniel Lacombe (Eric-Daniel Lacombe Architecte), Françoise Denis (Cheffe du service transports et risques à la DDTM 44), Yann Gasowki(Responsable du département hydraulique et environnement chez Artelia), Vincent Boudieres(responsable de la mission risque et DGA Cohérence Territoriale à Grenoble Alpes Métropole), Frédéric Lestelle(Germe & Jam), Jean-François Morel (directeur de Ma-geo)
Le renouvellement urbain de sites situés stratégiquement au cœur des agglomérations est une nécessité partagée, mais qui nécessite de concevoir des projets adaptés, peu vulnérables, allant jusqu’à permettre le maintien sur place des populations durant les crues lentes et longues.
Les démarches de projet du quartier Matra à Romorentin-Lanthenay, de la ZAC des Isles à Nantes-métropole, de la Porte des Alpes dans la métropole de Grenoble et la ZAC Seine Gare Vitry aux portes de Paris, sont tous le fruit d’une mobilisation partenariale itérative au long cours, qui est rarement un long fleuve tranquille, notamment entre les services de l’Etat et les collectivités.
Pour éviter les blocages sur des principes ou des points de règlement, le dialogue se construit autour de projets concrets. Des équipes pluridisciplinaires, associant des concepteurs et des bureaux d’études spécialisés, ont été mobilisées très tôt dans la vie du projet. Ceux-ci résultent de nombreux aller-retour entre le projet d’aménagement et les modélisations hydrauliques.
Accompagner l’acceptation du risque par le paysage (table ronde)
Animateur : Vincent Remy (Cerema)
Intervenants : Gérard Lancereau(Lancereau&Meyniel architectes), Gregory Morisseau(Atelier de l’ïle), Olivier Caillibot(Responsable prévention des risques à la ville de Quimperlé), Olivier Thomas (UDAP 29), Vincent Delestre (Agence Madec), Jerôme Berthelot (SILOGE)
Bien que le Grand Prix s’intitule « comment mieux bâtir », la catégorie « Aménagement d’espace public et paysager » est essentielle. En effet, la meilleure manière de réduire la vulnérabilité reste de limiter le positionnement d’enjeux en zone exposée. Pour autant, la nature ayant horreur du vide, il convient de donner un usage et une vocation à ces zones afin d’en permettre l’appropriation par les populations et les collectivités.
Les réaménagements des Berges de l’Isole à Quimperlé et de la Midouze à Mont-de-Marsan, visent tous les deux à laisser, voire à redonner, de la place à l’eau, en s’appuyant sur la rivière et sa mise en valeur pour revitaliser les cœurs de ville. Face aux pressions urbaines et économiques, le réaménagement de la Basse vallée de la Saäne, qui s’accompagne de relocalisation d’enjeux, et l’aménagement de l’Ecovillage des Noé en limite de zone inondable, montrent l’importance de proposer une vision positive avec une programmation viable et une gestion adaptée des espaces qui n’ont pas vocation à être bâtis.
Ces quatre projets s’approprient également la culture du risque en mettant en scène les différents niveaux de crue (de la saisonnière à la crue de référence) et en associant les publics concernés au travers d'une communication dédiée. Le paysage, notion par définition subjective et reposant sur la perception de chacun, est utilisé comme médiateur de la culture du risque.
Conclusion de la matinée
Marie France Beaufils, Maire de Saint-Pierre-des-Corps, présidente du CEPRI et présidente du jury du deuxième grand prix
Elle a d’abord souhaité rappeler quee ce serait une erreur de penser que l’on vivra sans risque, où que nous soyons. Il apparait illusoire de penser qu’il est possible et pertinent de tout relocaliser dans des secteurs non exposés. Partant de là, elle a souligné le rôle premier du partage, entre une grande diversité d’acteurs, de la réalité d’un territoire, de son fonctionnement et de la manière dont chacun l’appréhende et le vit. Cette étape constitue une base nécessaire voire indispensable pour ensuite penser l’avenir de celui-ci. Elle formule enfin deux enseignements qui devraient guider les personnes travaillant sur le sujet de la prise en compte des risques dans l’aménagement. Le premier est le besoin d’un travail pluridisciplinaire, ouvert aux sciences sociales, qui associe les élus et la population. Le second est que ce travail doit sans doute dépasser l’échelle du projet urbain, pour être mené à minima à l’échelle de la commune.
Replacer les risques dans le contexte historique, sociétal et culturel
Emmanuel Garnier, historien des risques au CNRS
Il a rappelé, à travers une approche historique, notre méconnaissance des événements passés et notre habitude collective à considérer le dernier événement grave en date comme étant le pire de l’histoire. Cette approche historique sur de longue période pourrait permettre de lutter contre « une rupture mémorielle » et contribuer à consolider l’analyse des périodes de retour de crue. La gestion de la prévention des risques devrait être une démarche à la croisée des sciences, qu’elles soient de la nature, formelles ou humaines et sociales.
Les défis pour l’avenir (table ronde)
Animateur : Jean-Michel Jacquet (architecte conseil de l’Etat)
Intervenants : Marie-France Beaufils (Maire de Saint-Pierre-des-Corps), Pascal Chambart de Lauwe (ENSA Paris Belleville), Patrick Chotteau (MIQCP), Catherine Duret (CNOA), Mireille Guignard (PUCA), Céline Guignard (Ministère de la Culture), Eric Petitpas (conseiller auprès de l’AQC et de la MRN)
Sur la base des deux éditions du Grand Prix et dans la perspective d’éventuelles suites, plusieurs chantiers ou défis ont été identifiés et mis au débat : l’articulation du Grand Prix avec les autres politiques du Ministère, la valorisation des secteurs inconstructibles, ainsi que l’amélioration et l’innovation des techniques constructives.
Les projets lauréats des deux Grands Prix apportent des éléments de réponse aux défis actuels et doivent être vus, en cela, comme des démarches inspirantes. Ils soulignent également, par les difficultés qu’ils rencontrent et par leur faible nombre, le chemin qu’il reste à parcourir pour que l’ensemble des aménagements soumis à un risque naturel prennent en compte cette exposition et apportent une réponse qualitative.
Dans un contexte de changement climatique, où la sinistralité devrait fortement augmenter, la réalisation de projets urbain résilients, l’adaptation des constructions existantes et le développement de la culture du risque sont des objectifs que la société doit collectivement se donner et atteindre.
Conclusions
Thierry Hubert, adjoint du service des Risques Naturels et Hydraulique,
Il a conclu cette journée d’échange en rappelant que le Grand Prix d’Aménagement en Terrains Inondables Constructibles s’inscrit dans une action publique plus large avec, entre autres, les Atelier des territoires ou la labellisation des PAPI (Programme d’actions de prévention des inondations). Avec ce Grand Prix, l’objectif est de montrer, par l’exemple, qu’a travers la conception et la gestion du projet, il est possible de résoudre des situations complexes et de concilier des contraintes qui peuvent paraître localement contradictoire. C’est une démarche largement partagée, bien que le sujet soit controversé, qu’il convient donc de poursuivre. Il a ainsi rappelé, que s’il est envisageable de renouveler l’exercice avec un troisième palmarès, la faisabilité de renforcer les liens avec d’autres politiques publiques (protection du patrimoine, Eco-Quartier, etc.) ou d’accompagner des projets en phase amont seraient également étudiés.
Pour en savoir plus :
Pour compléter les échanges tenus lors de cette journée, nous vous invitons à parcourir les deux plaquettes présentant les projets retenus dans les deux palmarès, ainsi que la synthèse, des enseignements de ces palmarès, produite par le Cerema.