Cet article fait partie du dossier : Artificialisation et sobriété foncière : les outils du Cerema
Voir les 23 actualités liées à ce dossierLa conférence technique territoriale « approche stratégique du foncier » organisée le 1er juin par le Cerema Centre Est traitait de la sobriété foncière en lien avec la mise en œuvre du Zéro Artificialisation Nette. La centaine de participants issus de collectivités, services de l’État, organismes publics et privés ont pu découvrir un panel d’outils et des retours d’expériences croisant foncier, habitat, développement économique et environnement.
Cette journée a permis d’aborder un ensemble de sujet allant de :
- la nécessaire préservation des sols,
- aux outils à mobiliser pour répondre aux enjeux de sobriété foncière et de connaissance des sols,
- au décryptage de l’impact de l’échelle et des indicateurs utilisés dans l’analyse de l’artificialisation,
- à la mise en avant de retours d’expériences sur différentes approches du foncier.
La nécessaire préservation des sols, ressource indispensable et pourtant menacée
Les sols sont une ressource essentielle à la vie sur terre et leur formation se chiffre en milliers d’année. Le relief, le climat, le matériau parental, la biodiversité mais également la végétation et le temps vont contribuer à la formation de sols très diversifiés. La diversité de leur structure, de leur composition conduit à des propriétés différentes et détermine leur capacité à remplir un ensemble de fonctions et à répondre aux enjeux du territoire ; De nombreuses pressions s’exercent sur les sols dont l’urbanisation est, sous nos latitudes, la plus importante.
La loi climat et résilience, en introduisant l’objectif Zéro Artificialisation Nette, et en faisant évoluer la définition de "l’artificialisation" fait de la préservation des fonctionnalités des sols un enjeu majeur. Des objectifs de réduction de la consommation d’espace Naturels, Agricoles et Forestiers dans un premier temps et de l’artificialisation à partir de 2031 sont à décliner aux différentes échelles de l’aménagement. Des outils de suivi sont mis en place dont le portail de l’artificialisation à l’échelle nationale.
La sobriété foncière : entre opportunités et contraintes de mise en œuvre
Si en première approche la sobriété foncière apporte son lot de contraintes et demande aux acteurs de l’aménagement de faire fortement évoluer leurs pratiques, elle est également source d’opportunités. Elle permet de préserver les sols, les terres agricoles, la biodiversité et la ressource en eau. En s’attachant à réduire la vacance, l’étalement urbain elle contribue à redynamiser les centres bourgs et à améliorer le cadre de vie.
Un ensemble d’outils pour répondre aux enjeux de la sobriété foncière
La mise en œuvre d’une stratégie foncière soulève de nombreux enjeux et nécessite de disposer d’un ensemble de connaissances pour pouvoir convaincre de la nécessité de faire autrement et permettre un renouvellement des approches techniques. Pour répondre aux besoins des acteurs de l’aménagement, le Cerema a développé, avec ses partenaires dont le Ministère de la Transition Écologique, un ensemble d’outils pour accompagner la sobriété foncière :
Le portail de l’artificialisation des sols
- Ce portail donne accès à un outil de mesure et de suivi de la consommation d’Espaces Naturels Agricoles et Forestiers (ENAF). Ce suivi est actuellement réalisé en s’appuyant sur les fichiers fonciers, base de donnée nationale issue des informations fournies par la taxe foncière. Les données brutes et un ensemble d’indicateurs sont ainsi disponibles directement ou sous forme cartographique.
Il rassemble également un ensemble de documents sur les déterminants de l’artificialisation, un guide sur les leviers permettant de la limiter, …, ainsi que les données déjà disponibles dans le cadre de la base de données Occupation du Sol à Grande échelle (OCSGE), un calendrier de production pour les données à venir et l’ensemble des métadonnées nécessaires à leur utilisation.
Cartofriches
- Cartofriches est un outil de repérage et de caractérisation des friches pour faciliter leur identification et leur remobilisation. Il s’appuie sur un ensemble de données nationales et locales telles que les bases de données Basias et Basol, les sites candidats au fond friche (actuel fond vert), des contributions ponctuelles de DDT ou de l’Ademe par exemple. Dans le département de l’Ain une enquête conduite par la DDT 01 auprès des EPCI de son territoire a ainsi permis de compléter, consolider la base de données. L’outil est ouvert aux collectivités qui souhaiteraient identifier leurs friches pour les mettre en visibilité.
Urbansimul
UrbanSIMUL National, outil collaboratif d’analyse et de prospective sur le foncier
- Urbansimul est un outil de repérage et de caractérisation du foncier mobilisable et du parc de logements vacants. Mis gratuitement a disposition des collectivités, il permet de visualiser les données foncières sur le territoire, d’identifier les gisements fonciers afin de construire et d’analyser des scénarios d’urbanisation. Son module « marché » complète l’analyse via la visualisation des ventes récentes -terrains nus et immobiliers- et de leurs prix.
Urbanvitaliz
UrbanVitaliz, réhabilitez vos friches plus sereinement. Ce service numérique public et gratuit apporte un accompagnement technique, juridique et financier aux collectivités et autres porteurs de projets de revitalisation de friches via :
- la mise à disposition de ressources,
- des entretiens visant à préciser les besoins et à produire des recommandations,
- l’orientation vers un ensemble d’acteurs en capacité d’apporter des réponses techniques et juridiques,
- un fléchage vers les sources de financement possibles.
La mise en relation des acteurs participant à la remobilisation du foncier en friche à travers la mobilisation de conseillers locaux tels que la DDT, l’Ademe, l’EPF, le Cerema,… est un plus de l’application par la connaissance partagée du projet qu’elle apporte ;
La méthode "MUSE" pour caractériser la qualité des sols à travers leur multifonctionnalité à différentes échelles
Projet MUSE : intégrer la multifonctionnalité des sols dans les documents d'urbanismeUne première approche de la qualité des sols est présentée à l’échelle du ScoT Métropole Savoie. L’objectif, a été de caractériser les sols sur l’ensemble du territoire afin d’identifier les sols les plus fonctionnels ou répondant à des enjeux spécifiques afin d’organiser leur préservation .
La mise en œuvre de la méthode à cette échelle s’est appuyée sur des données nationales, issues de la base de données DONESOL, associée au Référentiel Régional Pédologique. Elle permet d’identifier les secteurs présentant les sols les plus en capacité de remplir un ensemble de fonctions. Sur les secteurs à enjeux ou dans le cadre de projets, une approche plus fine peut être déployée dans un second temps en recalculant les indicateurs avec de la donnée terrain directement collectée. Un cahier des charges disponible dans la méthode MUSE permet de passer commande de la collecte de ces données.
Le second exemple correspond à la mise en œuvre de la méthode MUSE dans un projet de contournement routier. Le jeu de données disponible à l’échelle nationale a été utilisé en première approche pour discriminer l’impact d’un ensemble de variantes sur la qualité des sols. Dans un second temps, les calculs ont été précisés à partir de données terrain. La mise en regard des deux approches met en avant la nécessité d’affiner la donnée sur les zones à enjeux par de la collecte de données.
Décryptage sur l’impact de l’échelle et des indicateurs utilisés dans l’analyse de l’artificialisation
L’échelle d’analyse de l’artificialisation a également été interrogée au cours de la journée. Elle est à adapter à l’objectif poursuivi tout comme l’outil de mesure de l’artificialisation (donnée, indicateur). A l’échelle nationale, un référentiel commun permet de partager la même règle et d’assurer un suivi sur l’ensemble du territoire même si localement il peut être moins bien adapté.
À l’échelle du projet, une approche plus fine est essentielle pour identifier et valoriser des projets ambitieux permettant la préservation des sols et limitant les surfaces imperméabilisées par exemple.
Retours d’expériences sur différentes approches du foncier
Mais au-delà des outils, de la mesure, la construction de stratégies d’utilisation du foncier en réponse aux enjeux du territoire est essentielle.
Ces stratégies peuvent privilégier une approche globale et rassemblent alors les thématiques en lien avec l’aménagement du territoire qui ont besoin de foncier ou qui nécessitent de le préserver. Avec la mise en œuvre du Zéro Artificialisation Nette la connaissance des sols peut être mobilisée pour compléter la construction de la stratégie d’aménagement du territoire. Cette approche transversale, dans un contexte de sobriété foncière met en lumière la nécessité d’arbitrer entre différents projets , différents besoins ou à minima d’adapter les réponses qui y sont apportées.
Des approches thématiques peuvent également être mises en place pour répondre à des enjeux plus spécifiques tels que le développement des zones d’activités dans un contexte de sobriété foncière ou la préservation de la ressource en eau par exemple.
Des stratégies favorisant une approche globale avec pour objectif de redéfinir un projet d’aménagement plus sobre
Pour Grand Bourg Agglomération, les enjeux de sobriété foncière doivent être intégrés dans toutes les thématiques de l’aménagement du territoire. L’articulation des documents de planification -SCoT, PLH, PCAET- avec la stratégie foncière en cours de rédaction est un prérequis a sa mise en œuvre. L’approche réglementaire quoique essentielle n’est toutefois pas suffisante ; Elle est complétée par un ensemble de mesures allant de la sensibilisation à l’action foncière pour constituer un plan d’actions opérationnelles à court, moyen et long termes..
Pour la communauté Urbaine du Creusot-Montceau, lauréate de l’appel à manifestation d’intérêt « Zéro Artificialisation Nette de l’Ademe » l’objectif est de définir la trajectoire ZAN à intégrer dans son PLUi en 2027 et de décliner une stratégie foncière tenant compte des besoins économiques, résidentiels et environnementaux du territoire. Trois orientations stratégiques fortes sont mises en avant :
- la réduction des extensions urbaines réinterrogées sur la base de la qualité des sols et des écosystèmes actuellement en place,
- la mobilisation du foncier mutable et invisible,
- la désimperméabilisation et la renaturation des sols dans l’enveloppe urbaine.
La stratégie produite devrait aboutir à une traduction spatiale et chiffrée du ZAN par orientations stratégiques et servir de feuille de route aux élus et services techniques de la collectivité.
Des stratégies foncières thématisées pour répondre à des enjeux spécifiques
Une stratégie foncière Eau et Milieux Naturels
La stratégie foncière "eau et milieux naturels pour croiser environnement et aménagement" présentée par l’Epage Bourbre s’est appuyée sur la caractérisation d’"espaces remarquables" ; espaces qu’elle a hiérarchisés en fonction de leur vulnérabilité pour établir des secteurs stratégiques à préserver.
Cette stratégie a vocation à être coordonnée avec les autres usages du foncier afin d’identifier les zones intéressant plusieurs usages où des arbitrages sont à conduire.
L’identification de secteurs stratégiques à enjeux, en permettant une meilleure coordination des actions de restauration portées par des politiques publiques différentes devrait, en outre, conduire à maximiser les gains environnementaux.
Comment concilier développement économique et sobriété foncière ?
Le foncier économique est actuellement à l’origine de 25 % de la consommation d’espaces naturels, agricoles et forestiers NAF en France et cette consommation n’a cessé d’augmenter ces 20 dernières années. Ce constat a conduit à mettre en œuvre un ensemble de mesures à l’échelle nationale, telles que l’inventaire des zones d’activités économiques (ZAE), relevant de la compétence des EPCI.
Une enquête a été conduite par le Cerema en 2018, mise à jour en 2022, afin de disposer d’une photographie de ce foncier économique. Ce travail a révélé qu’une part importante des ZAE seraient pleinement occupées à court terme sans mise en œuvre d’opérations de requalification.
Les freins à la requalification ont également été questionnés ainsi que les solutions d’optimisation. Plusieurs exemples permettent d’aborder des solutions à partir de retours terrains.
Comment endiguer la consommation foncière tout en répondant aux besoins des entreprises ?
Afin d’accompagner les collectivités sur le sujet, les DDT de l’Ain et de l’Ardèche ont conduit une étude visant à mieux connaître ce foncier économique et à identifier les outils mobilisables pour conjuguer développement et sobriété foncière. Ce travail a porté sur l’analyse de l’ensemble des zones d’activités économiques (ZAE) de Grand Bourg Agglomération et de la communauté de commune du bassin d ‘Aubenas.
De nombreux critères ont été regardés tels que les acteurs en charge des zones d’activités, leur localisation, la nature des activités présentes, leur âge, leur taille, leur organisation, la densité des bâtiments présents, les surfaces de parking, la qualité de la desserte, des espaces verts,….
Cette première analyse a permis d’identifier des points communs entre les deux territoires tels que l’accélération du rythme de consommation du foncier économique, des enjeux de requalification et d’optimisation de ces secteurs mais également des différences marquées concernant l’étendue de ces secteurs, la nature des activités présentes et des dynamiques.
Des leviers pour aller vers plus de sobriété foncière ont été identifiés et traduits en fiches opérationnelles pour accompagner leur mise en œuvre. La présentation a illustré à travers des exemples d’aménagement l’utilisation de ces leviers.
Dans le dossier Artificialisation et sobriété foncière : les outils du Cerema