La journée a été riche en échanges de pratiques et de connaissances et sera à l’origine de nouveaux développements méthodologiques.
Retrouvez le résumé complet des présentations de la journée en version imprimable en cliquant ici.
1 - Le RST air et ses activités
Fabienne Marseille, Cerema TV et Anne Laure Badin, Cerema ITM
L’identité, les missions, le fonctionnement ainsi que les productions principales du RST air ont été introduits par Fabienne Marseille et Anne Laure Badin du Cerema, notamment pour les intervenants extérieurs au RST.
Retrouvez le diaporama de la présentation ainsi que le résumé de la présentation en annexe.
Le Réseau Scientifique et Technique Air (RST Air), regroupe une quinzaine de services de l’État :
- les 8 Directions territoriales du Cerema depuis janvier 2014
- les Directions techniques : Cerema TV et Cerema ITM
- le CETU
- les Directions Générales du MTES et MCT
- l’IFSTTAR et le CEREA
Le RST air intervient dans l’élaboration et la mise en œuvre des politiques publiques visant à améliorer la qualité de l’air dans les domaines des transports et de l’aménagement.
Il permet :
- d’échanger sur les questions provenant du terrain et/ou des DAC,
- de mettre en commun des méthodes mises au point et/ou utilisées dans les différents directions territoriales du Cerema,
- d’établir une réponse commune des besoins en méthodologie ou des besoins de mesure, l’organisation d’une veille scientifique et technique,
- de mutualiser des initiatives à prendre auprès des principaux acteurs du domaine.
Le RST air dispose d’un site extranet qui rassemble l’ensemble des productions des membres du réseau ainsi que les prestations qu’ils proposent et diverses informations sur l’actualité de la thématique.
Accès Intranet : réservé au ministère en charge du développement durable
http://intra.developpement-durable.certu.i2/rst-air-r693.html
Accès Extranet : ouvert aux organismes extérieurs au ministère
http://extranet.developpement-durable.equipement.gouv.fr/rst-air-r693.html
login : siteddcertu
mot de passe : meltrstcertu
2 - Présentation de la démarche ERS illustrée par un cas pratique sur un nœud autoroutier situé au sud de Lyon
Karine Muller-Perriand – Cerema CE
Karine Muller-Perriand du Cerema a ensuite introduit techniquement la journée en présentant les pratiques actuelles du RST en termes d’évaluation des risques sanitaires (ERS) appliquées à un projet routier.
Retrouvez le résumé de la présentation en annexe.
Exemple de dossier d’évaluation des risques sanitaires liés à un projet routier visant à illustrer les méthodes de travail du réseau et initier la discussion sur les méthodes et les indicateurs.
L’ensemble des illustrations est issu du diaporama présenté en séance.
Cette étude a été réalisée une première fois en 2008 et mise à jour en 2010 ;
Contexte : Réseau saturé aux heures de pointe. Le projet permettrait de limiter cette saturation.
Les données d’entrée sont des trafics. Dans le cadre de cette étude, trois scénarios différents :
- situation actuelle - données de trafic mesurées en 2005
- situation future fil de l’eau : 2035 (soit 20 ans après mise en service de l’infrastructure ; même horizon que pour les études acoustiques) ; même vitesse qu’actuellement, ie 110 km/h sur A7 et 90km/h sur A450
- situation future avec projet + diminution des vitesses : vitesses : 90km/h sur A7 et 70km/h sur A450.
Rappel sur la méthodologie proposée par la note méthodologique air et santé de 2005 et les niveaux d’étude.
- Étude de niveau 1.
- Domaine d’étude : voies montrant des variations de trafic >10 %. Les axes retenus dans le projet présenté sont ceux directement impactés par le projet (variations sur réseau autour <10%). Détermination de la bande d’étude ; celle ci est fonction du trafic. Dans ce cas, bande d’étude maximale : 300m de part et d’autre de l’infrastructure.
- Rappels sur les étapes théoriques sur l’ERS. Initialement développé en France pour les ICPE dans les années 1980.
Étape 1 : identification du potentiel dangereux
Dans le cas présent, identification de l’ensemble des polluants émis par le trafic. Ces polluants sont ensuite hiérarchisés sur la base des quantités émises par le trafic – facteurs d’émissions - et de leur toxicité intrinsèque - valeurs toxicologiques de référence (VTR) -. 16 polluants sont ainsi retenus et présentés dans le tableau qui suit. Ces polluants peuvent présenter des effets non cancérigènes et/ou cancérigènes. Ils peuvent être toxiques pour des expositions par inhalation et/ou par ingestion et pour des expositions de courtes durées (toxicité aiguë) et/ou à long terme (toxicité chronique).
Remarques :
Présentation du tableau n° dans la note méthodologique Air et Santé de 2005 : présentation à modifier car certains polluants apparaissent cancérigènes et non cancérigènes : bien préciser qu’il s’agit des différents effets de ces polluants.
Acroléine qui aurait vu son statut évoluer en cours d’année et qui serait maintenant un cancérigène certain.
Étape 2 : estimation de la dose réponse : choix pour chaque polluant des VTR, en fonction des voies d’expositions.
Étape 3 : évaluation de l’exposition des populations (quelles populations affectées ? Inhalation ? Ingestion ? Scénarios d’exposition des populations actuels et futurs)
Détermination de la fréquence d’exposition des individus sur la base d’hypothèses simplificatrices majorantes (personnes dans la zone d’étude 24h/jour et 365 jours par an) en faisant également l’hypothèse de concentrations similaires intérieures et extérieures.
Pour le risque cancérigène : exposition vie entière : 70 ans
Étape 4 : caractérisation des risques
- Concentrations calculées pour chaque bâtiment
- Calcul de risques fait à partir des concentrations totales (concentration de fond + apport du trafic)
- Ratio de danger et excès de risques individuels et collectifs
- Seuil d’acceptabilité à 10-5 pour les risques cancérigènes.
Remarques :
Francine Marano signale qu’il existe des travaux sur les transferts et les concentrations intérieures.
Karine Muller indique que les enjeux sur la pollution de l’air intérieur sont différents avec la problématique des COV et que ces enjeux cela nous entraîne trop loin par rapport à l’exposition liée au trafic routier.
Les niveaux de pollution vont-ils diminuer ?
Entre la situation actuelle et les situations futures, on observe une diminution des concentrations en bord de voie, du fait des gains technologiques.
Entre l’état de référence et avec projet on a un léger gain lié à la stabilité du trafic entre les deux scénarios et à la baisse des vitesses.
Pourquoi ne pas avoir dissocié l’évolution des voies du fait du projet et la baisse des vitesses ?
Cela n’a pas été fait car le scénario avec projet croise les deux éléments.
Tous les polluants ne voient pas leurs concentrations diminuer :
- le benzo(a)pyrène qui fait partie des polluants non réglementés à l’échappement,
- les particules qui voient leurs concentrations maximales augmenter légèrement sur l’axe ce qui ne se traduit pas par une augmentation des effets, car pas de populations exposées dans les zones d’augmentation.
Actuellement sont étudiés un grand nombre de polluants dans l’ERS (16 dans la note méthodologique Air et Santé de 2005) alors que le NO2 et les PM10 sont les polluants qui posent le plus de problèmes en termes d’impacts sanitaires ?
Effectivement ces deux polluants présentent des enjeux forts, mais ils n’ont pas de VTR pour le moment. On dispose uniquement de valeurs guides.
Utilisation de 20 µg/m3 comme valeur guide pour les PM10 (chronique - OMS)
Question sur l’acroléine : concentrations inférieures à la limite de détection.
Se pose la question de la réactivité de l’acroléine qui se dégrade dans l’atmosphère et reste très difficile à mesurer et de l’utilisation de la limite de détection de l’appareil qui surestime fortement le risque. Rémy Slama indique qu’il y a un problème de méthodologie.
Rémy Slama demande pourquoi on n’utilise pas la méthodologie de l’EIS dans nos études et les relations doses réponses utilisées dans les études EIS ? Même si on est dans un cas particulier d’exposition à proximité d’axes routiers et non pas d’exposition à l’échelle d’une ville la méthodologie lui semble transposable et dans tous les cas plus pertinente que l’ERS. Pour Rémy Slama, cela se fait déjà dans la littérature scientifique (cas de Rome).
On écarte en utilisant l’ERS plutôt que l’EIS les valeurs issues de l’épidémiologie au profit de valeurs toxicologiques issues d’expérimentation sur animaux ce qui fausse totalement l’évaluation et met en avant des polluants « anecdotiques » au profit des polluants à enjeux NO2 et particules.
L’EIS pourrait nous amener la finesse suffisante pour discriminer les scénarios de référence et avec projet - Piste de travail pour 2014 ? Point à Creuser à travers une étude à mettre en place en 2014 ?
Question des sous estimations et sur estimations difficile ;
Question des incertitudes liées à la chaîne de modélisation ;
3 - Quels effets sur la santé des particules – Comment agissent-elles ?
Professeur Francelyne Marano - Université Paris Diderot
Présidente, SFSE ; Université Paris Diderot ; Laboratoire des réponses moléculaires et cellulaires aux xénobiotiques (RMCX) ; Unité de biologie fonctionnelle et adaptative (BFA) CNRS EAC 4413
Francelyne Marano, professeur en toxicologie, a présenté des résultats de recherche documentant les effets sur la santé des particules et leurs mécanismes d’action. Les particules (PM) sont d’origines multiples et de compositions physico-chimiques variées. En fonction de leur taille, elles pénètrent différemment dans le corps et notamment dans l’appareil respiratoire. Considérant les effets courts termes, les liens de causalité entre pics de pollution et santé cardio respiratoire sont mis en évidence. Les effets à long terme ont également été abordés ; les mécanismes conduisant à l’augmentation de la morbidité et de la mortalité sont en cours de description mais la cancerigénécité des PM est avérée. F. Marano a également introduit les suspicions de translocation neuronale et de neurotoxicité des PM.
Retrouvez le diaporama de la présentation ainsi que le résumé de cette présentation en annexe.
Impact sanitaire des particules et mécanismes d’action.
Diaporama – l’ensemble des illustrations est issu du diaporama joint.
Origine des particules
Les origines de ces particules atmosphériques sont très variées. Elles sont d’origine naturelle ou d’origine anthropique. La fraction des particules provenant du transport, et en particulier des moteurs diesel, est de l’ordre de 20 % de la pollution particulaire.
Sur le plan sanitaire, l’attention est essentiellement portée sur les particules les plus fines <2,5µm, fraction dans laquelle se retrouve la quasi-totalité des particules issues de la combustion (trafic, incinération, chauffage urbain).
Avec actuellement beaucoup de questions sur les particules secondaires notamment en lien avec les transports. Grâce aux filtres à particules, on observe une bonne rétention des particules les plus fines mais recombinaison des gaz en sortie du filtre sous la forme de particules secondaires dont on ne connaît pas actuellement la composition ni l’impact sanitaire.
Toujours en lien avec les transports, des particules plus grossières, générées mécaniquement par érosion de la voie, des pièces métalliques constituent l’essentiel de la masse mais sont peu nombreuses.
Développement des études épidémiologiques et toxicologiques pour évaluer et comprendre l’impact de la pollution atmosphérique
La problématique de l’impact de la pollution atmosphérique sur la santé a pour origine des crises sanitaires. En particulier, le great smog, brouillard photochimique londonien en 1952, a permis de mettre en évidence un surcroît de mortalité (par risque respiratoire et cardiovasculaire) important pendant un épisode de pollution par le dioxyde de soufre et par les fumées noires. De nombreuses études épidémiologiques se sont développées par la suite. A partir des années 2000 l’impact à court terme de la pollution particulaire a été mis en évidence avec des effets cardiovasculaires en plus des effets respiratoires.
Une augmentation des effets allergiques a également été mise en évidence en lien avec des épisodes de pollution particulaires.
Ce type d’études a conduit au développement des études expérimentales pour comprendre comment ces particules induisent des effets sanitaires de ce type. En effet, dans les études épidémiologiques en conditions environnementales, il est difficile de déterminer une causalité claire.
Les études expérimentales ont mis en évidence que les particules se déposent dans les poumons en fonction de leur taille. Récemment, nous avons démontré que les nanoparticules s’arrêtent aux niveaux supérieurs. Les particules plus grandes sont capables de se répartir dans l’ensemble des voies respiratoires jusqu’aux alvéoles. Les particules de type diesel se retrouvent au niveau alvéolaire. Or c’est là que se font les échanges gazeux et qu’il peut y avoir le plus de problèmes en matière de réponse pathologique.
Déposition des particules dans l’appareil respiratoire :
Les grosses particules restent au niveau du nez, ainsi que les très petites, de l’ordre du nanomètre, en particulier les particules secondaires.
Fraction PM2,5 – PM1 : dans les voies aériennes à différents niveaux avec accumulation au niveau des fourches.
Fraction <1µm : au niveau des alvéoles
Composition des particules
La composition des particules est variable avec la taille.
Globalement les particules les plus grossières (10µm-2,5µm) sont essentiellement constituées de poussières minérales. Les particules ultrafines sont constituées à 70 % de noir de carbone et de composés organiques.
L’utilisation d’impacteurs en cascade et l’analyse des différentes fractions obtenues au microscope électronique à balayage (et extraction pour caractérisation de la composition et de la toxicité) a montré que les particules diesel ont une structure de grappes comportant de nombreux composés organiques (HAP dont benzo(a)pyrène,
quinones) qui s’absorbent à la surface de nanoparticules, composées essentiellement de carbone minéral.
Dans l’atmosphère, ces particules (suies) absorbent des composés organiques, des métaux et des molécules organiques, telles que les endotoxines ou les allergènes. Forte capacité des suies à fixer les particules biologiques pollens, endotoxines dont certaines ont des propriétés spécifiques, allergisantes et inflammatoires.
Propriétés allergisantes et inflammatoires, qui pourraient expliquer le développement des pathologies (en particulier l’augmentation des crises d’asthme chez les asthmatiques) et des effets à distances chez les sujets atteints de pathologies cardiovasculaires. Dans la mesure où ces particules peuvent s’accumuler dans les poumons et y rester pendant de longues périodes des pathologies chroniques peuvent être développées, par exemple des bronchites chroniques chez les sujets sensibles.
En 2012, le Centre international de recherche sur le cancer a reclassé les particules diesel à la demande de l’OMS. Les particules diesel sont reclassées dans le groupe 1 « cancérigènes certains ».
Pollution atmosphérique et neurotoxicité ?
Récemment une notion nouvelle est apparue, la translocation des particules les plus fines vers le cerveau par « rétro transport ».
Des études sur l’animal (instillation nasale) ont mis en évidence la translocation de particules au niveau du sang vers le système nerveux central. Par inhalation un phénomène de translocation dans le sang de nanoparticules de carbone est également observé.
La question se pose de l’association de la pollution atmosphérique (particules ultrafines) avec certaines pathologies neurovégétatives telles que maladies de Parkinson et d’Alzheimer.
A Mexico (avec des concentrations en particules de 300 µg/m3)des signes précoces de maladie de Parkinson et d’Alzheimer ont pu être observés chez des enfants et de jeunes adultes.
Une autre étude dans des zones d’exposition aux mines de manganèse à ciel ouvert a également permis d’observer des signes précoces de maladie d’Alzheimer chez de jeunes adultes.
Mécanismes de transfert des particules
Des interactions sont observées dans l’appareil respiratoire, mais aussi des effets au niveau d’autres organes tels le cœur. Avec 2 hypothèses pour expliquer ces effets ; (1) un passage des particules les plus fines (fraction ultrafine) au niveau sanguin, particules qui iraient se loger sur les plaques d’athérome accélérant leur formation et ensuite leur déstabilisation, (2) des effets inflammatoires au niveau du poumon avec passage dans le sang de médiateurs pro inflammatoires (Cytokines).
Impact de la fraction ultrafine :
Du fait de leur très petite taille, sont observés une rétention accrue des particules ultrafines et un transfert facilité vers le sang et les différents organes (cœur, reins, foie).
Par ailleurs pour ces particules, on observe un ratio surface / masse plus élevé avec possibilité de fixer davantage de composés pro oxydants (HAP, métaux).
Dans les alvéoles, les particules vont se trouver en contact avec des surfactants et dans les tissus elles vont se couvrir de protéines ce qui va faciliter leur transfert à travers les parois et conduite à des effets autres que respiratoires (cardio vasculaires notamment).
Mécanisme d’élimination des particules dans le système respiratoire
Élimination et piégeage des particules par le mucus sauf pour les jeunes enfants (l’age de 5 ans est donné mais est très protecteur) et en particulier pour les bébés ainsi que pour les personnes atteintes de pathologies telles que l’asthme ou la mucoviscidose.
Autre système d’élimination : les macrophages alvéolaires, mais faible efficacité sur les très petites particules.
Conclusions
L’évaluation de risque ne peut pas se faire de manière mécanique. Il est vraiment important d’avoir en tête les mécanismes qui interviennent.
Les effets avec seuil/sans seuils : points de divergence entre épidémiologistes et toxicologues. Les études épidémiologiques globalisent les phénomènes.
Discussion :
Part de la qualité de l’air dans les déterminants de santé ?
Dans les préoccupations des gens, la qualité de l’air fait partie des facteurs qui arrivent en haut des préoccupations. On voit également le bruit.
En termes de santé, la qualité de l’air même si elle a moins d’impact que le tabagisme impacte tout le monde. La PA extérieure s’ajoute à la pollution de l’air intérieur et au tabagisme passif. On observe depuis une quinzaine d’année une augmentation très importante des maladies respiratoires : asthme, BPCO.
Dans les autres préoccupations il y a les résidus que l’on trouve dans l’alimentation. Mais l’alimentation est très réglementée, analyses très fines, même si on voit au niveau des perturbateurs endocriniens que des questions se posent.
PB liés aux expositions professionnelles, pesticides dans le domaine agricole.
L’accumulation des particules est-elle proportionnelle à leur concentration ?
Chez l’animal on a montré une relation dose - accumulation.
Quid de l’effet seuil ? Et pourquoi dit on qu’il n’y a pas d’effet seuil pour les particules ?
Le fait que l’on soit exposé en permanence à une pollution de fond et qu’il y ait accumulation des particules dans le système respiratoire rend les particules toxiques même pour de faibles concentrations.
4 - Influence de la pollution atmosphériques sur la reproduction humaine
Rémy Slama - Inserm
Directeur de recherche à l’Inserm, département oncogenèse et biotechnologie, équipe d’épidémiologie Environnementale Appliquée à la Reproduction et la Santé Respiratoire.
Rémy Slama, DR en épidémiologie, a fait état de recherches portant sur les effets de la pollution atmosphérique sur la fertilité, sur le développement du fœtus durant la grossesse et sur le poids de naissance ainsi que les premiers mois de la vie. Ont été présentées diverses méthodes d’étude qui peuvent être mises en place pour évaluer les effets de la pollution atmosphérique sur la reproduction. Les designs expérimentaux utilisés en épidémiologie : des approches de l’exposition aux mesures des effets sur la fertilité, la reproduction ou la grossesse, ont été présentés. Parmi les résultats mentionnés, ceux de l’étude ESCAPE montrent que chaque augmentation de 5 µg.m-3 en PM2,5 de l’exposition pendant la grossesse majore de 18 % (5 et 23%) le risque d’hypotrophie (poids de naissance < 2,5 kg). L’utilisation de cette relation dose-réponse permet de déterminer qu’entre 8 % et 33 % des petits poids de naissance pourraient être attribués aux particules fines (scénario avec PM10>10µg.m-3) (même ordre de grandeur que pour le tabagisme actif).
Retrouvez le résumé de la présentation en annexe.
Sont évoqués, les effets sur la fertilité, sur le développement du fœtus durant la grossesse et le poids de naissance ainsi que les premiers mois de la vie.
La dernière revue de l’OMS sur l’impact de la pollution atmosphérique a confirmé ses effets sur la mortalité et la morbidité à court et à long termes. Les effets sur la morbidité sont observés pour des concentrations inférieures aux seuils de l’OMS.
Cette revue a par ailleurs fait émerger de nouveaux effets pour lesquels on avait jusque-là peu de données tels que le développement de l’athérosclérose, des effets sur la santé respiratoire de l’enfant et sur les issues de grossesse.
C’est sur ce dernier point qu’est centrée la présentation, point réalisé à partir de travaux basés essentiellement sur des données épidémiologiques. Des travaux sur des lapines exposées à des particules ultrafines (nm) montrent que ces dernières passent dans le placenta ainsi que leurs effets sur l’axe hypothalamus hypophysaire.
Comment évaluer l’exposition des personnes
En épidémiologie différentes approches de l’exposition sont possibles :
- Concentration d’exposition évaluée à partir de concentrations mesurées ou modélisées à proximité du domicile (station de mesure AASQA par ex ou modèles de dispersion).
- Niveaux personnels d’exposition à partir de capteurs passifs ou actifs sur les participants,
- détermination de budgets espace temps à partir de questionnaires renseignés par les participants ou à partir de GPS ou Smartphone et croisées avec les niveaux de concentrations évalués dans les différents espaces.
- Biomarqueurs d’exposition, mais temps de vie dans l’organisme très courts (adduits à l’ADN pour exposition aux HAP)… Les différentes approches sont à adapter à la durée du suivi (expositions court et long terme), aux polluants à suivre… A noter :
- La prise en compte des déplacements ne modifie pas fondamentalement les niveaux d’exposition des personnes.
- La prise en compte des niveaux d’exposition en air intérieur à un impact beaucoup plus fort sur les concentrations d’exposition.
Effets observés sur la reproduction :
- Avant la conception : fertilité des couples
- Après la conception : fausses couches spontanées, mortinatalité, croissance du fœtus, naissance avant terme, malformations congénitales, poids de naissance,
- Santé de l’enfant : champs qui émerge.
Fécondité/fertilité des couples
Travaux conduits en république Tchèque dans une zone de haute activité industrielle
Fécondabilité : en moyenne 25 % dès le premier cycle après arrêt contraception
Association du niveau d’exposition et fécondabilité : association avec le niveau d’exposition aux particules, avec le niveau d’exposition au NO2. Pas d’association avec les niveaux d’ozone et de HAP.
A noter : les niveaux de particules et de NO2 sont liés.
Les niveaux d’exposition dans cette étude sont très supérieurs aux niveaux observés en France.
Croissance du fœtus - premiers travaux dans les années 2000.
Travaux conduits en Californie qui s’appuient sur des registres en ligne qui donnent accès à un très grand nombre de cas (74 000 naissance). Paramètre observé : le poids de naissance.
Une tendance à la diminution du poids de naissance est observée avec l’augmentation de l’exposition aux particules durant la grossesse.
- exposition >18µg/m3 versus <12 µg/m3 → diminution du poids de naissance de 36 g Diminution similaire à la diminution observée pour la consommation de 2 cigarettes par jour durant la grossesse.
Dans l’étude ESCAPE, les taux d’exposition moyens aux PM 2,5 pendant la grossesse variaient selon la zone entre 10 et 30 microgrammes/m3.
Les concentrations en polluants ont été mesurées à l’adresse du domicile de chaque femme, la densité du trafic sur la route la plus proche et le volume total de trafic sur toutes les routes principales dans un rayon de 100 m autour du lieu de résidence.
Chaque augmentation de 5 µg/m3 en particules fines (PM 2,5) de l’exposition pendant la grossesse majore de 18 % (5 et 23%) le risque d’hypotrophie (poids de naissance inférieur à 2500 g). Les effets des particules fines se feraient sentir sur la croissance fœtale, même pour des concentrations inférieures à 25 µg/m3, la limite fixée par les normes européennes.
L’utilisation de cette relation dose-réponse permet de déterminer qu’entre 8 % et 33 % des petits poids de naissance pourraient être attribués aux particules fines (scénario avec PM10>10µg/m3). Même ordre de grandeur que pour le tabagisme actif.
Le risque individuel est bien plus important pour le tabagisme actif, mais le nombre de femmes exposées à des concentrations en particules >10 µg/m3 est bien plus important que le nombre de fumeuses. Ce résultat montre l’intérêt de calculer un risque individuel et un risque collectif.
Les suies et le NO2 sont également associés à un plus faible poids de naissance mais les 2 polluants sont corrélés aux Particules.
Prise en compte des comportements et de l’air intérieur
Suivi d’une cohorte de femmes (cohorte EDEN) durant leur grossesse, équipées de dosimètres passifs (BTEX).
Diminution du diamètre pariétal avec l’augmentation du niveau d’exposition de la mère au benzène. Le phénomène est observé par échographie dès le milieu de la grossesse.
Ces quelques illustrations montrent ce qui peut être mis en place pour évaluer les différents effets des particules sur la reproduction.
Question : faudrait-il prendre en compte les femmes enceintes dans les études d’impact ?
Francelyne Marano indique qu’elles sont prises en compte dans les publics cibles pour les messages spécifiques lors des pics de pollution.
5 - Impacts sanitaires de la pollution atmosphérique en Île-de-France
Sabine Host de l’Observatoire Régional de Santé Île-de-France (ORS)
Sabine Host de l’ORS IdF, a présenté la méthodologie d’étude d’impact sanitaire ainsi que le résultats de plusieurs études menées pour évaluer les impacts sanitaires de la pollution atmosphérique en Île-de-France ainsi que l’impact de vivre en proximité du trafic routier. Notamment, l’étude APHEKOM a mis en évidence un gain possible de 6 mois d’espérance de vie (à 30 ans) pour Paris et sa proche couronne, sous l’hypothèse d’amélioration de la QA au niveau des recommandations de l’OMS (PM2,5 : 10 µg.m-3). Par ailleurs, sur l’agglomération parisienne, en évaluant la population résidant dans des bandes de 75m d’axes routiers, ont été décomptés 2 M de personnes dont 70 000 jeunes de moins de 17 ans et en utilisant la relation de causalité déterminée dans la littérature scientifique, 16 % des cas d’asthmes pourraient être dus au trafic.
Retrouvez le diaporama de la présentation ainsi que le résumé de cette présentation en annexe
Les Études d’Impact Sanitaires (EIS)
Pour plus d’informations : cf diaporama – l’ensemble des illustrations est issu du diaporama joint.
Les niveaux de pollution atmosphérique couramment observés en zone urbaine présentent des risques sur la santé. Des risques à court et à long terme et des associations ont pu être établies. La nature causale de la relation entre la mortalité et la PA est considérée comme plausible notamment grâce aux apports de la toxicologie. Et de fait on peut appliquer ces relations pour réaliser des EIS.
Les EIS sont conçues comme des outils d’aide à la décision (outil de communication et de sensibilisation). Elles permettent d’intégrer les enjeux sanitaires liés à la QA dans les politiques publiques locales et la surveillance des polluants.
Des relations « exposition/risque » issues de l’épidémiologie
Les études épidémiologiques permettent d’établir des relations quantitatives des effets sanitaires en lien avec la PA pour l’exposition d’une population donnée (droite violette).
Les liens sont exprimés sous la forme d’un risque relatif - relation exposition-risque qui mesure la probabilité additionnelle de voir un événement sanitaire se produire du fait d’une exposition.
L’EIS permet de quantifier l’impact sanitaire dans une population donnée. On estime l’impact de la pollution (nombre de cas attendu) en comparant le niveau observé à une valeur cible et en utilisant la relation dose/réponse.
En pratique, on sélectionne les polluants, on évalue les niveaux de polluants que l’on met en relation avec des indicateurs sanitaires (nbre de décès ou d’hospitalisation). Les résultats sont exprimés en nombre de cas évitables, en termes de gains, d’espérance de vie ou une évaluation économique.
Harmonisation européenne - Récemment le projet APHEKOM (2008-2011), dans la continuité de l’APHEIS.
Enseignements des études épidémiologiques en termes de risques sanitaires
Le risque sanitaire est fonction de l’exposition de fond et de proximité.
En fonction du design des études épidémiologiques on ne va pas évaluer tout à fait les mêmes effets.
Divers types d’études possibles :
- Suivi de l’évolution temporelle des concentrations de fond sur une agglomération : on évalue alors les impacts à court terme de la pollution atmosphérique.
- On peut également comparer des villes qui présentent des niveaux de pollution contrastés en se focalisant là encore sur les concentrations de fond et on a alors accès à l’impact à long terme de la pollution atmosphérique.
- D’autres études sont basées sur les contrastes spatiaux au sein d’une même agglomération par exemples liés à la distance à la voie. On se sert pour ces études des concentrations mesurées à proximité des grands émetteurs tels que les axes pour évaluer l’exposition de la population.
L’étude APHEKOM a mis en évidence un gain possible de 6 mois d’espérance de vie (à 30 ans) pour Paris et sa proche couronne en ramenant les valeurs moyennes des concentrations de fond aux recommandations de l’OMS (PM2,5 : 10 µg/m3 ). Il s’agit d’une évaluation partielle sans prise en compte de l’exposition à proximité des axes.
De nombreuses études sont produites actuellement sur le fait de résider à proximité de voies à fort trafic. L’ORS a fait une synthèse de ces études et a pu mettre en évidence l’impact du trafic routier sur la genèse de certaines pathologies :
Asthme : 1 étude américaine, résider à moins de 75 m d’un axe de trafic supportant au moins 10 000 veh/jour augmente la survenue de nouveaux cas d’asthmes de 64 % chez les enfants.
Si on déroule le raisonnement sur l’agglomération parisienne, en évaluant la population résidant dans des bandes de 75m de part et d’autres d’axes (recensement de l’INSEE croisé avec le bâtiment) on décompte 2 M de personnes dont 70 000jeunes de moins de 17 ans. En utilisant la relation précédente on évalue que 16 % des cas d’asthmes pourraient être dus au trafic.
Dans le projet APHEKOM d’autres pathologies sont étudiées :BPCO et pathologies coronariennes.
ESCAPE (projet européen qui utilise des données multicentriques de plusieurs cohorte européennes) qui peut être une source de donnée très importante pour avancer dans l’utilisation des EIS, aller vers une utilisation + large des résultats, et peut être à termes utiliser les relations doses réponses de ce travail pour des études d’impact sanitaires dans le cadre de projets routiers plutôt que des Études de risque sanitaires.
Discussion :
Épidémiologistes/toxicologues : les toxicologues considèrent que les particules ne peuvent pas induire de réponse allergique (asthme en l’occurrence) chez les personnes qui ne sont pas allergiques. De fait les pics de pollution vont exacerbent les symptômes mais ne seront pas à l’origine de nouveaux cas. Les épidémiologistes dans l’étude APHEKOM parlent de 16 % de nouveaux cas d’asthmes induits par le fait de résider à proximité d’axes circulés.
La méthodologie de l’EIS pourrait-elle être adaptée pour évaluer les risques dans le cadre de projets routiers à la place de l’ERS ?
Les EIS sont construites sur les concentrations de fond pour calculer des indicateurs moyens à l’échelle d’une zone d’étude de l’ordre de l’agglomération.
En proximité des axes de trafic : quel budget Espace-Temps ? Dans l’EIS on n’intègre que les lieux de résidence, comme on le fait dans l’étude d’épidémiologie qui permet de bâtir les relations doses – réponses.
L’EIS permet d’obtenir des ordres de grandeur en vue de communiquer avec des décideurs. Sur des zones d’études + petites, perte de sens. On va arriver à 2-3 décès anticipés, quelle signification au regard des incertitudes ?
A noter, que des questions assez similaires se posent aussi pour l’ERS.
Il est décidé au regard de la discussion qu’il serait intéressant de tester la démarche de l’EIS dans le cadre de nos dossiers d’études d’impact de projet routier. Un appui pourrait alors être demandé à l’ORS pour nous aider à évaluer la pertinence de la méthode appliquée à la problématique routière.
Cette étude pourrait alimenter les discussions à venir dans le cadre de l’évolution de la note méthodologique Air et Santé.
Pour finir : le travail d’Airparif en partenariat avec l’IAU IdF sur l’exposition des personnes sensibles à proximité du trafic : à savoir, bâtiments sensibles étudiés écoles, crèches, maisons de retraite, hôpitaux et stades. En Île-de-France, densité de population importante autour des axes et il apparaît nécessaire de poursuivre l’effort pour diminuer les concentrations.