Cet article fait partie du dossier : Les Rendez-vous Mobilités du Cerema
Voir les 58 actualités liées à ce dossierCette conférence en ligne visait à proposer un point détaillé sur le concept de mobilité intelligente, son cadre juridique, les nouvelles pratiques et innovations en cours, et l’usage des données numériques pour construire des services innovants, tels la régulation des trafics et la mobilité connectée et coopérative (C-ITS).
Cet événement qui a rassemblé jusqu’à 250 participants, est disponible en "replay" ci-dessous.
L’ouverture de ce rendez-vous mobilités a été réalisée par Stéphane Chanut, directeur du département mobilités, espace public, sécurité au Cerema Territoires et Ville et responsable du "domaine mobilité" du Cerema.
Mobilité intelligente: de quoi parle-t-on ?
Fabrice Reclus du Cerema Territoires et ville, a présenté en introduction les premiers éléments de cadrage de ce webinaire.
La mobilité intelligente est un domaine d’activités en forte évolution ces dernières années, porté par l’application des technologies du numérique, de la géolocalisation et des télécommunications au domaine des transports et de la mobilité. Ceci optimise et accroit la production et la collecte de données, l’analyse et la connaissance des mobilités, ainsi que l’offre de nouveaux services de déplacements et d’information aux usagers.
La mobilité intelligente s'appuie sur le cadre réglementaire des systèmes de transport intelligents, défini au Code des Transports (Art. L1513-1) par l’Ordonnance n°2012-809 du 13 juin 2012, et dans la Directive européenne "ITS" (Directive 2010/40/EU) .
Les principaux champs d'application de la mobilité intelligente sont les suivants:
Connaissance du trafic routier, capteurs et données de mobilité ;
Mobilité automatisée et connectée – Véhicules connectés (C-ITS) ;
Trois collectivités territoriales ont ensuite partagé leurs expériences et présenté des solutions opérationnelles actuellement déployées sur leur territoire, et pour certaines les résultats de leurs évaluations.
Le projet ECOBONUS, programme de péage inversé unique en France
La Métropole Européenne de Lille, représentée David Herquelle, a présenté le programme Ecobonus, dispositif de "péage inversé" inspiré d’exemples étrangers et unique en France. Le programme vise à rémunérer les usagers du réseau autoroutier en heure de pointe pour "effacer" leurs trajets. Il a été lancé en 2023 sur le secteur Sud (A1 et A 23). Les principaux objectifs du projet sont de:
- limiter la pollution de l’air et les émissions de gaz à effet de serre par une réduction du trafic routier de 6% en heures de pointe,
- favoriser l’utilisation des moyens de transports alternatifs à la voiture particulière pour des déplacements pendulaires du quotidien,
- soulager les principaux points de saturation de l’agglomération,
- enfin améliorer la fiabilité des temps de parcours des usagers sur les infrastructures routières.
La présentation a permis de décrire dans le détail les clés de montage du projet, son financement, les différentes phases réalisées en 2023 puis celles à venir en 2024, les modalités pratiques de mise en œuvre, en particulier le principe de fonctionnement des vérifications de trajets des usagers, ainsi que la cohérence du programme avec l'ensemble des autres actions de mobilités de la métropole.
Le bilan provisoire indique que les premiers enseignements sont favorables, même si plusieurs facteurs entrent en jeu et n’excluent pas les effets d’aubaine.
Le programme a ainsi attiré à ce jour près de 3 500 participants sélectionnés, et représente actuellement une moyenne de 1 500 effacements réalisés quotidiennement, ceci grâce à un report des usagers sur le télétravail, le déshorage, les transports en commun, le covoiturage et les modes doux (cf. chiffres détaillés).
L'évaluation finale du projet, à venir, portera sur la mesure de l’impact du projet au regard de la baisse de pollution liée au trafic routier (en lien avec l’Ademe), sur la densité du trafic routier (en lien avec le Cerema et la DIR Nord), et l'analyse du dispositif incitatif au report modal Ecobonus (en lien avec l’Université de Lille).
Le laboratoire de l’innovation du quartier de Paris-La Défense
Le Département des Hauts-de-Seine, représenté par Charles Chemama, et le Cerema Île-de-France, représenté par Frédéric Fabre, ont présenté la mise en œuvre et les résultats d’évaluation du Laboratoire de l’innovation RD993 LAB, déployé depuis quatre sur le quartier de Paris-La Défense.
Ce laboratoire est destiné à transformer La Défense en quartier de l’innovation et améliorer le cadre de vie autour du boulevard. Suite au lancement d’un appel d’offres le 12 mars 2019, quatre projets ont été retenus par le jury et expérimentés :
- SOFFT V2x (société Aximum): Transformer le boulevard circulaire en une route intelligente, connectée et sécurisée.
- Gestion intelligente du trafic (sociétés Citeos et Qucit): Prévision du trafic à +15min sur huit sections du Boulevard circulaire.
- Luminoroute (société Eiffage): Eclairages à LEDs basse consommation et pose d’enrobés en granulats clairs.
- Flowell (société Colas): Signalisation horizontale lumineuse et dynamique.
Le retour d'expérience du Laboratoire RD 933 montre qu'il s'agit d'un réel projet transversal au sein des services du Département des Hauts-de-Seine. Il a créé une véritable dynamique autour de l’innovation et représente un formidable vecteur de communication pour le Département. En particulier, le retour d’expérience sur le projet Flowell a contribué à l’Arrêté du 11 avril 2023, qui a instauré la création de la signalisation horizontale dynamique dans la réglementation.
Déploiement de services numériques de mobilité coopératifs (STI-C) à Bordeaux
Eric Monceyron a présenté le retour d’expérience de Bordeaux Métropole en matière de mobilité intelligente, avec un focus sur le déploiement de services numériques de mobilité coopératifs (STI-C).
Depuis plusieurs décennies, Bordeaux Métropole s’appuie sur des solutions STI globales pour gérer le trafic, notamment avec le système de gestion centralisée des carrefours à feux dénommé Gertrude (Gestion Electronique de Régulation en Temps Réel pour l’Urbanisme les Déplacements et l’Environnement).
Elle expérimente également d’autres solutions de mobilité intelligente (report modal, bonus mobilité, stationnement intelligent, …), dont une grande partie a été adoptée au fil des années : M-ticketing, appli TBM, stationnement Easypark, etc. Aujourd'hui, le site pilote C-ITS de Bordeaux propose des services numériques déployés à grande échelle, par le biais de partenariats public-privé.
Il s'appuie sur l'application smartphone C-The-Difference (et Coopits), qui intègre plus de trente services de mobilité. Par exemple, plus de 580 carrefours à feux diffusent le service GLOSA, qui fournit des prescriptions de vitesse à l'approche des feux tricolores, et permet ainsi de réduire les émissions de CO2. Ou encore l’emplacement et la disponibilité des parkings, le signalement des voies réservées au covoiturage ou aux transports en commun.
Cette application peut se superposer à un navigateur numérique préinstallé (ex. Waze). Elle est développée sur la base de standards internationaux, pour garantir son interopérabilité dans le cadre de projets européens (InDID "infrastructure digitale de demain", plateforme d’harmonisation C-Roads).
Concernant les cas d'usage, ils visent à répondre aux défis de la mobilité urbaine, avec deux périmètres distincts : le cœur d'agglomération et la couronne périurbaine. Sur les centres agglomérés, les services proposés visent à encourager l'écoconduite, sécuriser et favoriser les usagers vulnérables de l’espace public, encourager les automobilistes à la prudence aux abords des écoles, etc.
Sur les secteurs périurbains, ces services numériques diffusent les informations des panneaux à messages variables à l'intérieur des véhicules, pour renforcer la régulation du trafic, fournir des informations sur les parkings relais pour favoriser le report modal, et améliorer la sécurité routière.
Avec près de dix ans d'expérimentations menées sur son territoire, Bordeaux Métropole travaille à présent au passage à l'échelle de ces services, notamment la mise à disposition des messages issus des gestionnaires de voiries vers les média et applications de navigation grand public, conformément aux préconisations de la Directive STI européenne.
Bordeaux Métropole envisage de poursuivre ses actions en matière de mobilité intelligente, autour des enjeux de la multi-modalité, de la zone à faibles émissions et le déploiement de nouveaux cas d'usage STI-C.
L’association ATEC ITS France : ses activités et le prochain congrès annuel 2024
Martial Chevreuil, Président d’ATEC ITS France, a pour sa part présenté le rôle et les actions emblématiques de l’association au sein de l’écosystème de la mobilité intelligente, depuis plus de 50 ans.
Le prochain grand rendez-vous de l’association sera le 51ème Congrès ATEC ITS France, programmé les 23 & 24 janvier 2024 à Paris, et auquel Martial Chevreuil a chaleureusement convié l’ensemble des participants.
Annabelle Ferry, Directrice du Cerema Territoires et ville, a conclu ce "Rendez-vous Mobilités" en rappelant le statut et le rôle du Cerema auprès des collectivités territoriales, et les actions mises en œuvre (expertise, études, méthodologie, formation, etc.) pour les accompagner sur les champs d’application de la mobilité intelligente.
Le replay :
Dans le dossier Les Rendez-vous Mobilités du Cerema