11 septembre 2023
Parc éolien de Fécamp
A Fécamp, 71 éoliennes sont en cours d’installation. Elles fourniront à terme de l’électricité équivalente 60 % des besoins en électricité de la Seine-Maritime. Pour appréhender l’ensemble des enjeux de l’éolien offshore, une visite de terrain étaient organisée en septembre dernier par le Cerema, à laquelle étaient conviés des représentants des collectivités adhérentes.

"Avec une centrale nucléaire et d’importants projets de méthanisation, j’appartiens à un territoire d’énergie. Aussi c’est passionnant de découvrir ce parc dont je ne soupçonnais pas la grandeur mais aussi de constater toute l’ingénierie mobilisée. Il faut diversifier les sources d'énergie. Ce sont les grands défis d’aujourd’hui. " souligne Jérôme Lheureux, président de la communauté de communes de la côte d’Albâtre (27 931 habitants, 63 Communes), territoire voisin de Fécamp où avait lieu le 12 septembre dernier une visite du parc éolien offshore qui est en cours d’installation, au large de cette ville normande.

A l’initiative du Cerema, des élus locaux, des représentants de différentes directions de l’établissement et des services de l’État, soit une quarantaine de personnes, ont pu découvrir les 23 premières éoliennes déjà installées. Situé entre 12 et 24 km au large de Fécamp, ce parc comprendra au total 71 éoliennes espacées d’un km les unes des autres et alignées dans le sens du courant. Exploitées par EDF énergies renouvelables, elles produiront de l’électricité au fil de leur installation, avec l’objectif d’une mise en service intégrale à l’hiver 2023-2024. 

 

4 éoliennes mises en place en 5 jours

éolienne en mer
Crédit : S. Bourland - Cerema

A l’extrémité nord du parc, se dresse la plateforme d’installation des éoliennes qui se transforme en navire pour aller chercher à Cherbourg tous les mâts et les composants des éoliennes qui y ont été préassemblés. Ainsi 4 éoliennes peuvent être mises en place en 5 jours puis une nouvelle rotation a lieu soit 10 h de navigation. Fabriquée par l’usine des Chantiers de l’Atlantique, à Saint-Nazaire, la sous-station électrique raccordée par câble, va récolter l’électricité produite par les éoliennes. Cette liaison est de 50 km dont 18 km en mer, jusqu’au port de Fécamp et 32 km à terre jusqu’au site de Sainneville-sur-Seine. La présence visuelle des éoliennes offshore dès qu’un rayon de soleil se profile à l’horizon fait partie des découvertes de cet après-midi-là.

« Je ne soupçonnais pas que l’impact visuel fut si fort. J'ai été particulièrement intéressé par le côté spectaculaire du chantier. C'est une installation industrielle majeure », considère Jean-Frédéric Jolimaitre directeur environnement du Département du Calvados, « c’est encourageant que nous y arrivions enfin, car les premières études ont commencé en 2007. » 

 

Des campagnes de pêche scientifique, pendant 3 ans

Les débats publics ont lieu en 2014 et tous les recours ont été purgés. Néanmoins, l’installation d’éoliennes soulève des inquiétudes de la part des pêcheurs mais aussi par rapport à l'impact écologique sur la biodiversité. "Nous devons aujourd'hui considérer que l'aménagement d'un tel parc est une urgence. Et des compromis doivent être trouvés. Dans le département voisin du Calvados, au large de Courseulles-sur-Mer, un parc similaire verra le jour, en 2026. Une association vient de se constituer en opposition à cette infrastructure au titre de l’impact visuel néfaste engendrées depuis les plages du débarquement." détaille-t-il.

A Fécamp, une concertation a eu lieu avec les usagers de la mer, avec les pêcheurs en particulier en amont de l’installation. Les éoliennes sont disposées suivant des alignements définis avec ces professionnels pour limiter l’impact sur leurs activités. Les pêcheurs peuvent traverser le parc selon leurs besoins. De plus, des campagnes de pêche scientifique seront réalisées pendant trois années qui suivent sa mise en service, pour surveiller les effets potentiels des éoliennes.

"L'éolien en mer est une nouvelle infrastructure, d’où la crainte de perturbation de la pêche. Nous travaillons à mieux connaitre l’impact de l’éolien sur l’activité halieutique, pour localiser les zones d’implantation. Nous avons édicté une règle de co-usage, le parc n’étant pas fermé à la pêche, qui permet de dépasser les possibles conflits" précise Nicolas Ferellec, responsable de l’éolien en mer au Cerema.

 

Éolien en mer : le rôle du Cerema

Afin que les parcs éoliens en mer puissent se déployer, le Cerema joue un rôle accru, depuis 2018. Il réalise des études préalables et évalue l’impact des installations sur le milieu, dès la phase travaux.

"Dès 2009, le Cerema s’est impliqué sur le sujet de l’éolien en mer en construisant un outil d’aide à la décision pour le premier exercice de planification piloté par les préfets coordinateurs de façade et associant l’ensemble des parties prenantes. Les services de l’État nous avaient sollicité pour réaliser ce travail en raison notamment de son expertise double sur le milieu marin et la géomatique" explique Nicolas Ferellec, responsable de l’éolien en mer au Cerema. Mais depuis 2018 et la loi pour un État au service d'une société de confiance (Essoc), le rôle du Cerema a été élargi en appui au ministère de la Transition écologique. Concernant le projet de Fécamp en 2012, c’est EDF qui a réalisé les études de caractérisation du site et qui a conduit le débat public.

 

Deux types de projets

"Les porteurs de projets d’éolien en mer avaient jusque-là des difficultés à les réaliser.  L’État a donc décidé de porter une partie des études, par l’intermédiaire du Cerema, afin que les projets puissent aboutir" souligne Sébastien Dupray, directeur technique Risques, eau, mer au Cerema. En méditerranée, dans l'Atlantique et dans la Manche, Nicolas Ferellec et son équipe, travaillent en réseau au sein du Cerema, sur deux types de projets. Si le site est bien identifié, ils interviennent sur la phase débat public, études et calcul des risques. Dans une vision plus globale sur le développement de l’éolien en mer, ce sont les questions de l'adaptation des infrastructures portuaires, la méthodologie, l'impact cumulé des parcs mais aussi les différentes phases de chantier qui sont abordées. 

 

Une meilleure intégration environnementale

Le risque d'incompatibilité entre le parc éolien et la sécurité de la navigation est un aussi un sujet majeur pour le Cerema. "Sur chaque parc, un mât est appareillé d’un équipement électronique qui vérifie qu’il n’y a pas de perturbations de communication entre les navires mais aussi entre les navires et la terre. Avec l’éolien, on a construit quelque chose de fixe dans un environnement qui était jusque-là mouvant" note Sébastien Dupray. Autre axe important, la connaissance par rapport à l'impact sur l'environnement de l’éolien en mer, qui n’est pas encore complète.  "Mais il est un révélateur de notre manque de connaissances de l’univers marin et il y a aujourd’hui une volonté d’une meilleure intégration environnementale et des programmes d'acquisition de données se développent" constate Nicolas Ferellec.